La vie ou la mort pour Vincent Lambert ?
Je n’aimerais vraiment pas être l’un des dix-sept juges de la cour européenne des droits de l’homme qui doit rendre ce matin deux décisions sur le cas de Vincent Lambert, ce tétraplégique de 38 ans, victime d’un horrible accident de la route qui l’a privé de toutes les fonctions de l’être humain. Au point que sa propre famille se déchire : son épouse et ses frères et sœurs, à une exception près, sont pour la cessation des soins, tandis que sa mère opte, ce qui est normal, pour le maintien en vie.
Je ne prendrai pas parti ce serait folie, et je plains les juges de Strasbourg qui devront rendre leurs décisions, sauf si, fidèles à leur formation de juriste, ils se retranchent derrière des subtilités, incompréhensibles de tous, mais applicables dans de tels cas. Souvenez vous du premier arrêt du Conseil d’Etat sur le foulard islamique ! Les Sages du Palais Royal avaient refilé la patate chaude (passez moi l’expression) aux chefs d’établissements…
Qui peut décider de la vie et de la mort ? Pas même les médecins dont l’avis est nécessaire au plan clinique mais non suffisant au plan moral.
En fait, il s’agit presque d’une aporie morale. De quelle éthique se réclameront les juges de Strasbourg pour qualifier ce qui se passe ? Doit on dire que le malade doit vivre dans son état ou le contraire qu’il faudrait cesser de le nourrir ? Dans les deux cas, la question est in-jugeable, indécidable.
Pourtant, cet homme est bien là, les yeux grand ouverts : implore t il qu’on le laisse en vie ou, au contraire, qu’on lui permette de mourir enfin, comme le demandent certains membres de sa famille.
Je commence, en ma qualité de philosophe, la recevabilité de l’attitude de certains théologiens qui décident de s’en remettre à Dieu dans de tels cas. Mais même dans ce cas, la transcendance a besoin toujours besoin d’un vecteur humain pour se faire connaître et comprendre de nous, simples mortels.
Dans le cas qui nous occupe, cas qui vont se multiplier vu le vieillissement de la population et la longévité, nous voyons des yeux le mur de esprit. On ne peut pas aller plus loin : comment prendre une vie quand on ne l’a pas soi même donnée ?