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  • Erik H. Cohen, hommage posthume, In memoriam

    Erik H. Cohen, hommage posthume, In memoriam

    La parution prochaine d’un ouvrage[1] dédié à la mémoire de ce grand sociologue français, disparu en 2014, encore peu connu, même au sein des cercles communautaires, m’incite à revisiter de manière succincte son œuvre qui est importante. Il s’était déjà intéressé à un tel recensement de la population juive en 1988 /89 et l’enquête sur laquelle on se penche ici, remonte à 2012 mais conserve toute sa vigueur puisque la situation de la communauté ne s’est pas transformée du tout au tout durant ce laps de temps bien déterminité.

    En effet, cet universitaire français, qui a mis en valeur un champ de recherche resté en friche durant de longues années, a marqué de son empreinte l’étude la plus marquante du judaïsme contemporain hexagonal. Certes, il y eut, avant lui, quelques tentatives plus ou moins abouties mais c’est Erik Cohen qui fut appelé à aller jusqu’au bout de sa tache. Un principe talmudique connu souligne que l’œuvre ne porte que le nom de celui qui y a mis la dernière main. (Eyn ha-melakha niqrit ella ‘al shem gomrah). Peu après la naissance de l’Etat d’Israël, on vit fleurir une nouvelle école sociologique avec des figures aussi centrales que Arthur Ruppin (un village agricole porte son nom Kfar Ruppin, non loin de la frontière jordanienne) ou Shmuel N. Eisenstadt, auteur de La société israélienne.

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  • Joseph, l’homme qui veut réparer le monde (Tikkoun ‘olam)   Pour Monsieur Ilan CHOUCROUN, en amitié                                                                                                Pour Monsieur Ilan CHOUCROUN, en amitié

     

     

    Joseph, l’homme qui veut réparer le monde (Tikkoun ‘olam)

                                                                                                      Pour Monsieur Ilan CHOUCROUN, en amitié

    La récitation des péricopes bibliques dans le culte synagogal (sidrot) des dernières semaines, avec le passage ce samedi au second livre du Pentateuque, l’Exode), m’incite à redire certaines choses concernant cette figure emblématique du groupe patriarcal : Abraham, Isaac et Jacob. Josèphe, en treize petites années, a, si l’on en croit le récit de la Genève (du chapitre 37 au chapitre 50 inclus) littéralement éclipsé son père, le patriarche Jacob, qui est pourtant l’archétype de l’identité juive… La divine Providence a confié à d’humaines mains la garde et la préservation d’un jeune homme vendu comme esclave par ses frères à l’âge de dix-sept ans et qui se retrouve, grâce à ses talents miraculeux, vice-roi ou Premier ministre de la puissante Egypte pharaonique… Avouons qu’une telle réussite n’est pas à la portée de tous et évoque par certains aspects un prodige, un miracle.

    J’ai déjà publié tout un livre sur Josèphe (Editions Hermann, 2018), mais je voudrais revenir sur certains aspects concernant le rapport dialectique à l’Egypte, à ce qu’elle représente dans l’imaginaire biblique qui brosse l’image d’un empire mythique, pratiquant en son temps une politique hégémonique, si dangereuse pour des royaumes comme la petite Judée.

    Mon propos n’est pas de m’en tenir aux interprétations traditionnelles, destinées à rassurer les consciences pieuses mais à tenter de déchiffrer le sous texte de toute cette histoire presque romanesque. Quand on lit attentivement le texte hébraïque on ne peut pas dissimuler un petit embarras : le rapport à cette Egypte, amicale, nourricière et qui accueille volontiers l’étranger, n’est pas le même selon qu’il s’agisse de Josèphe ou de son père Jacob. Je prendrais quelques exemples : quand Josèphe, entouré du faste égyptien, se fait enfin connaître de ses frères, il les charge non seulement de grain et de froment mais aussi d’une mission, passée inaperçue aux yeux des exégètes traditionnels. Josèphe dit à ses frères ceci : et vous rapporterez à mon père tous les égards dont je suis entouré en Egypte (we higadtem le avi et kol kevodi be mitsrayim)

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  • Tous philosophes ? (Gallimard, 2019)

     

    Tous philosophes ? (Gallimard, 2019) Sous la direction de J. Birnbaum

    Il fallait y penser ! De prime abord, la question ne semble guère se poser. Et pourtant… C’est une question dont la ou les réponse (s) ne va ne vont pas de soi. Et j’ai bien fait de lire l’ouvrage dans l’ordre, c’est-à-dire par le commencement. La récompense fut à la mesure de mes attentes : la leçon inaugurale de Monsieur Roger-Pol Droit est tout simplement superbe Rien à y ajouter ni à en retrancher. Rédigée dans un style élégant et sobre, énonçant des problématiques philosophiques qui s’imposent, car elles vont de soi, il a livré une contribution de premier ordre en guise de réponse à la question posée. Un vrai délice, on est loin du jargon abscons qui fait croire à des difficultés insurmontables car imaginaires. L’auteur a aussi cité une phrase de Bergson (je crois) selon lequel il n’est pas d’idée qui ne puisse être exposée de manière claire et succincte, et ce, quelle que soit sa densité, réelle ou supposée.

    C’est un vieux débat que si trouve ici revisité : RPD parcourt le jardin philosophique à grandes enjambées, de Socrate à Nietzsche, avec la fermeté d’un spécialiste, rappelant au passage que la philosophie est d’origine grecque, ce qui entraîne un certain nombre d’implications. Celles-ci se feront sentir dans un domaine qui m’est familier, notamment au Moyen Âge lorsque les trois monothéismes, fondés sur des Révélations divines, ont tenté de rapprocher la tradition religieuse de la spéculation philosophique. Les grands noms en sont Thomas d’Aquin, Albert le Grand, Maïmonide, Averroès et tant d’autres. Et dans ce cas précis, disons le bien, la socio-culture de l’époque n’autorisait pas le premier quidam venu à se mêler d’un tel voisinage, naturel ou contre-nature. La religion était alors le principal pilier de l’ »ordre social et quiconque osait récuser ses dogmes prenait des risques graves. Sous de telles latitudes et dans de telles conditions, toute la population ne pouvait pas prétendre à la réflexion philosophique… Il fallait, comme l’écrivit Maimonide dans l’introduction à son Guide des égarés, suivre les commandements de l’autorité religieuse, faute de formation intellectuelle adéquate. Maïmonide qui dépendait presque exclusivement des néo-aristotéliciens arabes (Al-Farabi, Ibn Sina, Ibn Badja, etc…) pour son bagage spéculatif, a opté pour une césure herméneutique entre la masse (l’écrasante majorité de la population) et les élites (une infime partie de l’humanité croyante et pensante.)

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