Philippe Sands, La filière (Albin Michel)
Derrière cet énigmatique titre se cache (à peine) toute une histoire passionnante, une enquête menée comme pour une affaire criminelle. Et, de vrai, c’en fut une puisque nous assistons à un chassé-croisé, plutôt : ce sont les fils d’un officier SS de haut rang, autrichien d’origine mais aussi nazi de la première heure, devenu au cours de la Seconde Guerre mondiale, gouverneur de Cracovie et de Lemberg (Lvov), et à ce titre, responsable de la déportation et de la mise à mort de centaines de milliers de juifs et de résistants polonais. L’auteur qui nous a donné une émouvante reconstitution de ces choses avec Retour à Lemberg, a perdu son oncle pendant l’occupation de sa ville par les nazis. Et à cette même époque, c’était bien Otto von Wächter qui organisait ou avalisait tous ces massacres. Le livre est donc une confrontation entre l’auteur qui veut savoir ce qui est arrivé à son oncle Léon et l’un des fils de l’officier SS, responsable d’une partie de la Shoah. J’ai dit chassé croisé ou va et vient : on part des albums, des archives familiales, du journal intime de la femme d’Otto von Wächter Un exemple, un chapitre portant sur l’année 2002 et se déroulant à Londres ou dans l’Allemagne profonde est suivi d’un chapitre datant de 1934 à Berlin. On voit évoluer deux situations parallèles On a parfois l’impression de lire un roman policier tant le suspense est grand. La structure elle-même est étonnante et donne envie d’aller jusqu’au bout de l’ouvrage.