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  • L’HOMELIE DU PAPE A LA VEILLE DE NOËL A ROME

    L’HOMELIE DU PAPE A LA VEILLE DE NOËL A ROME

    Si un homme venu d’une autre galaxie scrutait les gens qui se pressent dans les magasins d’alimentation et de cadeaux en tous genres à l’occasion de Noël il aurait peine à croire que la commémoration de cette fête, originellement si religieuse, avait pour objet principal la naissance de Jésus, censé apporter à l’humanité paix et justice, sans oublier le rachat de ses péchés.

    Ce martien serait d’avis que ce sixième de l’humanité (les chrétiens sont un peu plus d’un milliard) nage encore dans le paganisme et ne révère qu’un Dieu, celui de la consommation. Mais l’homélie bienvenue du pape Benoît XVI est venue opportunément remettre les choses à leur vraie place. Le pape a appelé les âmes dont il a la charge à plus de simplicité et d’humilité et à rechercher la paix.

    C’est un message qui correspond bien aux origines mêmes de cette fête qui a connu bien des mutations et surtout qui fut, aujourd’hui encore, instrumentalisée à des fins commerciales. Ceci n’est pas une condamnation du bien vivre, de partager et d’aider les autres. Non point. C’est simplement un recentrage : les Chrétiens, le pape vient de le leur rappeler, doivent se réjouir à l’occasion de leur fête et non point subvertir la solennité religieuse pour faire bombance. Il faut respecter les priorités. D’abord le recueillement, le retour en soi, la teshuva, et ensuite les agapes.

    Dans cet appel du pape, qui est dans son droit et dont c’est le devoir d’agir ainsi, je retrouve les impératifs de la vieille éthique biblique : aider, partager, secourir ceux qui sont dans le besoin et qui sont, comme nous, faits à l’image de Dieu.

    J’apprends que le Secours catholique a organisé sur cinq bateaux mouches un beau réveillon pour des gens en difficulté. C’est très bien et cela me rappelle une légende talmudique qui souligne que toute fête, toute célébration, toute commémoration comprenant un banquet doit associer à ses réjouissances des pauvres et des nécessiteux : n’est-ce pas la meilleure loi qui soit contre l’exclusion, si répandue, hélas, ces dernières années ? Ce même passage talmudique va jusqu’à reprocher au patriarche Abraham de ne pas avoir invité suffisamment de pauvres et d’indigents lors de la circoncision de son fils d’Isaac… C’est dire ! Or, un tel patriarche est réputé pour avoir offert gracieusement le gîte et le couvert aux voyageurs venus de partout… C’est dire, l’importance du partage et de la générosité.

    Avec la lecture hier des chapitres de la Genèse sur l’histoire de Joseph en Egypte, nous constatons que les cycles économiques vont et viennent. Aux années d’abondance succèdent parfois des années de famine, la croissance exponentielle peut fort bien, hélas, être suivie par le marasme économique. Et c’est justement ce qui frappe le monde civilisé depuis quelques années. Et apparemment, ce n’est pas fini. On peut se référer à mon long article d’hier consacré à l’histoire de Joseph dans la Genèse et aux lumières de Hanoukka (et justement le pape a allumé une bougie hier pour appeler enfin à la paix).

    D’où la nécessité de redonner à de telles fêtes comme Noël et hanoukka leur sens originel. Les cadeaux et les bons repas (qui ne me laissent jamais indifférent) ne viennent qu’après. Et en tout état de cause, ils doivent être partagés avec les autres. Tous les autres.

  • 'AVENTURE DE JOSEPH DANS LE LIVRE DE LA GENESE A LA LUMIERE DE HANOUKKA

    L'AVENTURE DE JOSEPH DANS LE LIVRE DE LA GENESE A LA LUMIERE DE HANOUKKA.

    POUR NOS FRERES CHRETIENS QUI FETENT NOËL CE SOIR
    Je n’ai pas encore eu le temps de vous parler de hanoukka, le fête des lumières, qui est probablement à l’origine de la fête des lumières de Lyon. Mais en plus, ce samedi, outre les quatre bougies de hanoukka (4 sur 8), on a lu à la synagogue du Centre communautaire (l’oratoire le plus marocain de Paris) l’épisode de Joseph, ce fils de Jacob / Israël, vendu par ses frères comme esclave à des Ismaélites, devenu l’intendant du chef des eunuques de Pharaon et jeté en prison parce qu’il refusait de se livrer à la débauche avec la femme de son maître… Mais comme il était expert en matière d’interprétation des rêves, il sauve le grand panetier et le grand échanson, ce dernier se souviendra de lui et le recommandera au pharaon……

    Ce qui frappe dans toute cette affaire, c’est la concomitance de plusieurs choses : l’Egypte, omniprésente dans ces chapitres de la Genèse (alors qu’elle occupe notre actualité depuis des mois), la crise économique que nous traversons (et le livre de la Genèse qui nous parle de la famine en Egypte) et le grand Joseph qui découvre pour nous les cycles économiques (expansion, régression, croissance et décroissance).

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  • La France et le nationalisme turc…

    La France et le nationalisme turc…

    Alain Juppé, l’excellent ministre français des affaires étrangères, a parlé de sagesse quand il a gentiment conseillé au gouvernement turc, et plus spécialement à son chef, de ne point «surréagir» au vote par l’Assemblée Nationale d’une loi réprimant la négation de tous les génocides, notamment, en l’occurrence (et il faut bien le dire) le génocide arménien de 1915-17 .

    Je dois de prime abord féliciter le ministre (ancien élève de l’Ecole normale supérieure) pour ce néologisme (sur-réagir), cette trouvaille terminologique innovante dont peu de ses collègues sont capables. Ce schème morphogénétique (pardonnez le jargon des linguistes) est plutôt rare dans notre langue française et est bien plus courant dans la langue de Goethe dont les pré- et postpositions constituent une sorte de noyau dynamique qui confère à la langue une agilité plastique (en allemand : eine Gediegenheit) qui accroît d’autant sa palette de sens, en un mot sa polysémie…

    Voyez l’ingratitude proverbiale des Français, nous devrions être reconnaissants à l’actuel Premier Ministre turc de nous donner une rare opportunité d’enrichir notre langue ou, à tout le monde, d’être enfin conscients de ses ressources insoupçonnées. Merci donc, cher Monsieur Erdogan.

    Vous avez bien compris, ce qui manque à la sérieuse moustache de M. Erdogan, c’est de l’humour ! C’est tout de même assez incroyable ! Quand on voit les manchettes de la presse turque, aucun titre n’a eu l’intelligence de prendre un peu de distance, de se dire que ce sont des affaires intérieures, que des élections approches ou que tout simplement, cette histoire n’a pas été fabriquée de toutes pièces et que, somme toute, les Français n’y sont pour rien. Enfin, nul n’est au-dessus des lois, pas même la Turquie.

    Que cette démarche du parlement français irrite gravement certains secteurs gouvernementaux turcs, on le comprend aisément, mais que l’on menace la France des pires sanctions, voilà qui prête à sourire. Un professeur-journaliste peut le dire ici sans crainte : ce ne sont pas Turcs qui investissent le plus en France mais plutôt les Français en Turquie. Et puis, il faut que cessent ces éruptions nationalistes à répétition qui jalonnent la vie politique turque depuis des décennies.

    Certes, l’échec des négociations en vue d’une intégration européenne peuvent susciter de l’amertume et, dans cette affaire, je regrette que certains dirigeants européens aient, à la légère, fait promesses intenables aux Turcs. Il y a quelques années, j’étais invité à un colloque international à Lisbonne par la fondation Gulbenkian (encore un Arménien !) à propos du dialogue des cultures. Une députée européenne grecque, parlant parfaitement français m’a dit, lors d’un dîner, qu’une entrée de la Turquie en Europe bouleverserait tous les équilibres, tant au parlement que dans toutes les commissions, exécutives ou consultatives. Et surtout deux points, me dit-elle, soulèvent de graves objections : le statut de la femme et l’exclusivisme religieux. Depuis, ce pays a fait quelques pas en avant mais qui sont encore loin des standards européens.

    M. Erdogan devrait donc tenir des propos plus modérés et inciter son peuple à être un peu moins hystérique. Cela dit, révérence gardée.

    Mais ce qui inquiète beaucoup plus, ce sont les allusions à peine dissimulées aux racines d’un prétendu sentiment –anti-turc de la part du chef de l’Etat, un sentiment qui serait rattaché, selon certains publicistes du Bosphore, à des origines familiales partielles, situées du côté de Salomique…

    Mais comme le rappelait M. Juppé, les peuples turc et français ont tant de choses à faire ensemble et demain ils se retrouveront, apaisés, autour d’une question arménienne enfin résolue, grâce aux efforts conjugués de tous les hommes de bonne volonté.

     

    Maurice-Ruben HAYOUN

    Tribune de Genève du 23 décembre 2011