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  • Un condominium franco-allemand ?

    Un condominium franco-allemand ?

    Le précédent article sur une hypothétique germanophobie française, émanant de quelques milieux très restreints, ne devrait pas être l’arbre qui nous cacherait la forêt : il est normal que les deux plus grandes puissances, politiques et économiques, prennent les choses en main, voire saisissent le taureau par les cornes. Mais est-ce qu’une telle attitude s’apparente à je ne sais quelle visée impérialiste ou hégémonique de nature à soumettre d’autres Etats, moins puissants et ayant plus de problèmes à régler ? Ce ne me semble pas être le cas.

    Un peu d’histoire au sujet de ce terme peu utilisé, condominium : ce fut, si ma mémoire ne me trompe, le ministre des affaires étrangères de Georges Pompidou, Michel Jobert, qui avait utilisé ce terme pour fustiger une certaine connivence entre les USA et la désormais défunte URSS, deux superpuissances qui s’entendaient au mieux de leurs intérêts respectifs sans se soucier des autres. En ces temps là, la France brillait par un anti-américanisme primaire qui a très vite trouvé ses limites. Les auteurs qui ont remis ce terme à la mode (François Bayrou, si je ne me trompe ?) ont probablement voulu tirer profit de ses connotations xénophobes, voire nationalistes. Le malheur, c’est qu’aujourd’hui, ce ne sont les USA qui sont visés mais nos alliés et voisins allemands.

    C’est vrai, c’est un condominium de fait ou, pour parler comme Aristote, ce n’est pas un condominium d’intention première : les Français et les Allemands n’ont pas cherché intentionnellement à jouer ce rôle, mais il fallait bien faire quelque chose pour éviter que la plupart des membres de la zone Euro finissent comme la Grèce.

    Hier soir, sur France 2, j’ai pu suivre l’intervention du Premier Ministre François Fillon. Fidèle à son habitude, le chef du gouvernement a été rassurant et limpide. Il n’a pas cherché à dissimuler la gravité de la situation mais a su limiter l’impact de l’agence de notation (Standard & Poor’s) qui menace de dégrader une bonne partie des pays de la zone Euro, et notamment les deux, accusés de vouloir dicter leur loi aux autres. En fait, sans souhaiter que le pays se voie retirer son triple AAA, je me demande bien ce qui pourrait arriver si cela se produisait. Au fond, il y a un paradoxe à voir les USA vivre avec un A en moins tandis que des pays comme l’Allemagne et la France continueraient à en bénéficier. Et depuis cette dégradation, les USA continuent de vivre et même, dans une certaine mesure, de renouer avec une croissance (qui reste encore timide).

    Il faut une zone Euro à deux vitesse mais une Europe intégrée : nous ne pouvons pas avoir la même monnaie et les technocrates, responsables de l’introduction et surtout de l’extension de l’Euro à l’ensemble des pays de l’UE ont commis une grave faute d’appréciation. Il faut donc adopter un mécanisme correcteur : qui, mieux que l’Allemagne et la France, seraient en mesure de le faire ?

    Si certains veulent nommer cela un condominium, libre à eux. En allemand, je crois que le terme qui conviendrait le mieux serait Vorreiterrolle.

  • Faut-il interdire la prostitution ?

    Faut-il interdire la prostitution ?

    C’est un véritable serpent de mer : la prostitution revient sur les devants de la scène. Et j’en parle aujourd’hui, car le parlement français se penche une nouvelle fois sur la question et envisage, comme en Suède, de pénaliser le client en le criminalisant… Est-ce la bonne solution ? J’avoue que c’est là un problème qui divise et intrigue tout le monde, tous partis et toutes religions confondus.

    Il y a évidemment les deux extrêmes : ceux qui sont absolument contre, veulent faire la chasse aux femmes qui font commerce de leurs charmes et ceux qui optent pour tout le contraire : libéraliser, permettre le racolage sur la voie publique, dans les maisons, bref, une véritable permissivité sans aucune gêne… Je pense sincèrement que le bon sens et l’humanité envers les uns et les autres se situent loin de ces deux pôles.

    Alors que faire ? J’avoue que mon puritanisme m’incite à réagir fermement et à interdire, mais des psychologues, des sociologues et même des médecins nous disent que des mesures coercitives ne servent à rien, que hommes et femmes sont appelés à échanger des sentiments, des objets, bref faire du troc : et d’ajouter que certains mariages sont une véritable prostitution légale, que les la plupart des gens qui vivent ensemble ne s’aiment pas, etc…

    A mes yeux, tout ceci est difficile à admettre. Vendre son corps pour de l’argent ou pour autre chose est moralement inadmissible. Mais je suis touché de voir des jeunes femmes parler du plus vieux métier du monde en se prénommant travailleuses du sexe…

    La seule chose qui soit acceptable (et encore) ce sont des Eros center comme à Hambourg, me dit-on où des personnes adultes, suivies médicalement et protégées des proxénètes et autres mafieux, se livrent à de telles activités…

    Mais cela reste quand même quelque chose de difficile à admettre. On dit que le législateur français envisage de sanctionner le client ; et voici que les mêmes travailleuses du sexe se plaignent qu’on leur retire le pain de la bouche. Ne pourraient-elles pas trouver un autre travail ?

    C’est un problème inextricable : au XIXe siècle et au début du XXe, on pouvait lire que de grandes dames bourgeoises, peu désireuses de satisfaire les besoins de leurs époux, appelaient de leurs vœux le concours si efficace de ces femmes qui donnaient à leurs hommes ce qu’elles-mêmes ne souhaitaient pas leur fournir…

    On n’en sort pas.

  • Aux origines du slogan «sionistes assassins». le mythe du meurtre rituel et le stéréotype du juif sanguinaire

    Aux origines du slogan «sionistes assassins». le mythe du meurtre rituel et le stéréotype du juif sanguinaire Par Pierre-André TAGUIEFF. Etudes du Crif numéro 20

    La lecture de cette petite étude solidement documentée et sobrement rédigée doit tordre le cou à certaines idées fausses, tout en sachant que l’on ne vient jamais vraiment à bout de préjugés qui ont la vie dure. Depuis Wilhelm Marr on parle d’antisémitisme, mais depuis que temps on a introduit le terme de judéo phobie.

    L’auteur de cette étude nous offre un beau survol de la question qui va de l’accusation d meurtre rituel qui est fort ancienne puisqu’on la trouve, sous une forme assez proche, déjà à Alexandrie sous la plume du bibliothécaire de la ville.

    En principe, et si les antisémites avaient un peu de jugeote, l’affaire aurait dû faire long feu pour la bonne raison que l’interdit de la consommation animal est formelle dans le livre de la Genèse. Sang animal déjà, a fortiori du sang humain ! Par ailleurs, comment introduire je ne sais quoi dans le rituel de Pessah, au moment où les contrôles de la cacherout sont encore plus tatillons qu’à l’accoutumée. On l’a vu dans le mémoire de Salomon Reinach sur l’accusation de meurtre rituel : rien n’y fit. Cela n’empêcha certaines affaires d’éclater …

    Notre éminent collègue P-A Taguieff montre les tribulations d’une telle accusation depuis l’Antiquité (se servant de l’excellent ouvrage de Peter Schäfer) jusqu’à un général syrien de triste mémoire, Moustafa Tlass l’inamovible ministre de la défense de son pays. ON voit qu’il existe un curieux glissement d’une époque à une autre, alors que cette accusation avait pris naissance dans des milieux exclusivement chrétiens, ce sont d’autres qui reprennent désormais le même slogan, remis au goût du jour pour critiquer certaines actions de l’armée israélienne. Et c’est de là qu’on est passé à l’accusation de juif sanguinaire et tueur d’enfants. On a même entendu un premier ministre islamiste modéré dire de Tsahal ; they kill babies !

    Hier soir sur Al-Arabya, le journaliste a recensé que l’armée syrienne a déjà toué 318 enfants sur plus de 4800 victimes. On croit rêver…

    Il fait féliciter P-A Taguieff pour son excellent travail qui servira de référence au grand public cultivé mais aussi à ceux qui veulent en savoir plus, grâce aux copieuses notes regroupées en fin de volume.