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Vu de la place Victor-Hugo - Page 1446

  • La Turquie, l'Allemagne et l'Europe

     

        Ces dernières semaines la Turquie, par la voix de son Premier Ministre, a fait quelques déclarations qui doivent retenir notre attention, s'agissant d'autroités politiques d'un pays prétendant ddhérer à l'UE. Tout d'abord, il nous faut présenter nos condoléances à la suite de l'incendie qui a coûté la vie à neuf citoyens turcs résidant en Allemagne.  A l'heure où j'écris, j'avoue ignorer si'l s'agit ou non d'un incendie criminel, mais si cela devait se vérifier alors ce serait très grave. Et les autorités judiciares allemandes devraient tout mettre en œuvre pour retrouver et châtier les coupables.

        C'est porbablement dans ce climat émotionnel qu'il faut situer les déclarations intempestives de M. Erdogan dont le parti, au pouvoir à Ankara, est généralement désigné comme un parti islamiste modéré…

        M. Erdogan a dit, en substance que l'assimilation exigée des Turcs en Allemagne était assimilable à un génocide culturel…  Ou bien l'homme était très ému et ces propos sont des propos en l'air ou bien il a pensé ce qu'il a dit et, dans ce cas aussi, c'est grave: que vont dire les Kurdes, les Arméniens, les Tcherkesses et les chrétiens en général qui ne disposent pas, en tant que minorités, de développement culturel spécifique et qui s'ottomanisent de toute manière?

        Il ne suffit pas d'habiter en Europe, encore faut-il y vivre, c'est-à-dire s'intégrer en assimilant la langue, les mœurs et les coutumes, ce qui ne signifie pas que les Turcs doivent abdiquer les croyances religieuses ni adopter les coutumes culinaires des pays d'accueil. Mais le minimu, c'est de bannir l'exclusivisme religieux, la ségrégation des femmes, les droits de l'homme etc… C'est d'ailleurs , ce qui est exigé d'eux pour que soit examinée sérieusement leur candidature.

        Ces idées sont à peu de choses près, illustrées par un Allemand, parlementaire européen d'origine turc , qui a donné une interview au Monde du 24-25 février (p 13). Mais cet interviex ne va pas assez loin et ne répond pas aux questions que se posent légitimement les citoyens de l'Europe, inquiets de voir frapper à leur porte un pays si différernt…

        Les échanges entre l'Europe et les pays du sud sont déséquilibrés: on compte en Europe des millions d'hommes et de femmes désireux de s'y établir alors que l'inverse n'est guère vrai. La moindre des choses serait de fournir un effort d'adaptation et les déclarations de M. Erdogan ne vont pas dans ce sens. 

  • A. MEDDEB, Sortir de la malédiction. L'islam entre civilisation et barbarie

     

     

    Sortir de la malédiction, expression empruntée au philosophe Empédocle d'Agrigente qui parlait du pré de la malédiction: il s'agit d'un vibrant plaidoyer de Meddeb en faveur d'un Islam des Lumières, un islam qui n'est pas vraiment à l'ordre du jour dans les pays concernés et qui commence à poser un sérieux problème à l'ensemble des nations.  Après une introduction de quelques dizaines de pages, solides et nouries aux meilleures sources, l'auteur critique ce qu'il juge répréhensible dans les pratiques islmaiques actuelles (et notamment les dérives terroristes) au long d'une bonne quarantaine d'articles qui pourraient ressembler à de simples tribunes dans nos grands quotidiens…

        Mais cette forme était peut-être voulue et délibérément recherchée afin de trouver un accès plus aisé aux lecteurs non avertis. De quoi s'agit-il? L'auteur dénonce avec force ce hiatus qui sépare la norme du fait, en d'autres termes l'immobilisme d'une certaine exégèse coranique qui se présente et présente sa source comme des réalités transcendantes, exclusives de toutes les autres et immuables. Pour donner de la consistance à ses sagaces propos, l'auteur recourt à une bonne érudition et à un accès direct aux sources originales. Il se tient aussi au courant des dernières recherches universitaires, notamment au très bon Dictionnaire du Coran, paru dans la collection Bouquins.
        L'auteur propose aussi une meilleure intelligence de certains versets qui avaient jusqu'ici intrigué les exégètes, mais chaque fois, il insiste sur la nécessité de tenir compte des normes du commentaire historique et appelle au dépassement de traditions visiblement dépassées.
        Comme la trame de l'ouvrage suit presque pas à pas l'actualité, l'auteur s'arrête un peu sur le fameux discours du pape à Ratisbonne, sur les timides réformes du statut personnel en terre d'islam et, assurément, sur les relations avec l'Occident.  Un petit point nous paraît intéressant et l'auteur gaganerait sûrement à l'intégrer dans l'un de ses futurs recueils.
        Il s'agit du orman philosophique d'Ibn Tufayl le Hayy ibn Yaqzan (XIIe siècle) qui fit le bonheur des penseurs juifs et chrétiens contemporains: les meilleurs esprits dont Moïse de Narbonne (1300-1362) le commentèrent et allèrent jusqu'à en hébraïser le titre (Yéhiel ben Ouriel)… Or, Ibn Tufayl fut le tout premier critique des traditions religieuses en islam. Grâce à la mise en en scène de son solitaire, Hayy, isolé sur une île déserte, il put montrer que livré à lui-même, cet homme sut décou!vrir les mystères de l'univers, de Dieu et de l'homme. Mais tout ceci, sans l'aide d'une quelconque révélation ou d'une tradition religieuse. Certes, le roman finit mal puisque le solitaire et son compagnon s'en retournent dans leur île déserte adorer Dieu suivant le culte pur et dépouillé alors que les habitants de la cité qu'ils avaient voulu convertir à leur culte épuré restaient opiniâtrement attachés à leurs mœurs.
        A une époque où l'Europe chrétienne n'avait pas la moindre idée de ce que signifiait la critique philosophieue de la religion et sa caractérisation comme un ensemble de myhes, de symboles et de métaphores, un sage musulman du XIIe siècle nous donnait avec sagesse et gravité une impérisssable leçon de dignité et de savoir-vivre… 
     
    PS: UN excellent article en allemand de l'orientaliste Timan NAGEL a été publié dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ) du 5 février sous le titre Die unzeitgemäße Macht des Scharia-Islams. Nous en vons donné un long résumé en français dans notre blog (mrhayoun.blog.tdg.ch/
     
    Meddeb, Sortir de la malédiction… Seuil, 2007.

     

    Lien permanent Catégories : Philo
  • L'auto-biographie de Benazir Bhutto, parue aux éditions Héloïse D'Ormesson

     

        Cette autobiographie ne passera pas inaperçue; certes, Madame Bhutto a dit sa vérité, sa vision des choses et de son action politique à la tête de son pays, le Pakistan, ou dans l'opposition. Mais depuis sa tragique disparition, suite à un attentat attribué à al-Quaida, cette vérité est entourée d'un halo sacré, celui d'une martyre…

        Quand on regarde la photographie de la couverture, présentant une si belle jeune femme, pleine de grâce et d'intelligence, une femme parfaitement accomplie puisque fille méritante, mère et épouse attentionnée, et enfin, leader politique inflexible, on se demande comment un pays a pu se priver d'une telle concentration de talents.

        Mariée à trente-quatre ans (ce qui est très tard dans les sociétés musulmanes si sourcilleuses quant à la chasteté des jeunes filles, B.B. suit les conseils de sa mère qui l'incite à ne pas trp tarder pour avoir des enfants… Or, lorsqu'elle deviendra Premier Minisitre de son pays, les partis les plus machistes et les plus rétifs à la civilisation réclameront son départ de son poste au motif qu'enceinte, elle ne pourra pas diriger le pays… Si l'on n'était pas au Pakistan, on croirait rêver…

        Mais dans ce cas, le rêve deviendrait très vite un cauchemar: cette femme passe le plus clair de son temps à relater ses arrestations, ses séjours en prison, les attentats manqués, les foruberies de son armée, les difficiles négociations avec l'Inde et les USA, mais surtout la fin tragique de son père, renversé par son propre chef d'Etat-Major, le dictateur Mohammed Zia al-Huq qui le fit exécuter, a moité mort et ne laissa fléchir par aucune demande de grâce.

        Mais où va le Pakistan? En lisant B.B., on réalise que le chemin de la démocratie dans ce pays n'est pas aisé: elle raconte que l'ISI, les puissants services de renseignements de l'armée écoutaient sa ligne téléphonique à la fois politique et privée, que les généraux réclamèrent sans honte un droit de regard sur les nominations les plus importantes, afin, dirent-ils, de pouvoir assurer au mieux  la défense stratégique de leur pays… Et puis, il y a cette narration d'un dialogue ubuesque avec l'actuel général président, jadis simple directeur des opérations de l'armée de terre, qui lui conseillait de violer le frontière avec l'Inde et d'occuper une ville transfrontalière, ce qui aurait provoqué de la part du puissant voisin une réaction foudroyante.

      B.B. nous  fournit l'exemple d'une femme, née musulmane mais désireuse de vivre en accord avec son temps, sans se laisser dicter sa conduite par une tradition rétrograde. Hélas, sa course s'est brutalement et tragiquement terminée lors d'un meetind à Rawalpindi. Son parti a gagné les les élections, mais elle y a laissé sa vie… Telle les héroïnes de ces tragédies grecques, son sacrifice ouvrira peut-être la voie à un renouveau tant attendu.