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Vu de la place Victor-Hugo - Page 1451

  • Jean-François BOSSY, Enseigner la Shoah à l'âge démocratique, Armand Colin, 2007

     

        C'est un véritable problème d'ordre pédégogique et philosophique à la fois auquel l'auteur s'est confronté dans un livre très bien informé, riche, instructif, même si parfois le jargon prend le pas sur l'exposé clair et lisible.

        Comment enseigner la Shoah dans nos établissements d'enseignement secondaire? Quels points mettre en avant: la singularité de la Shoah, son unicité (au point de retomber dans la même erreur funeste que les Nazis qui soulignaient l'étrangeté intrinsèque des juifs?), son caractère incomparable et inconmmensurable à la fois etc… Peut-on, comme le dit l'auteur dans les toutes premières pages de l'ouvrage, refroidir cette question en un sujet d'histoire comme un autre… ?

        Doit-on se fier aux historiens qui confrontent les sources, se livrent aux critiques internes et externes, en une phrase faire un vrai travail d'historien ou écouter les témoins qui livrent, de leur mieux, une expérience inénarrable et pourtant vraie?  Lisons cette phrase frappée au coin du bon sens ( p 7):  et la transmission scolaire de la mémoire de la Shoah atteste d'abord de cette difficulté persistante à faire d'Auschwitz un objet de distanciation critique et savante. A elle seule, cette phrase résume bien le caractère malaisé de l'entreprise pourtant indispensable: rendre compte dans les livres et les cours d'histoire de cette tentative des Nazis d'amputer la culture et l'identité européennes de ses dimensions juives.

        Car, c'est bien de cela qu'il s'agit. la Shoah, c'est d'abord, vue sous l'angle de la culture, le constat d'un profond divorce entre l'identité juive (telle que la se représentaient les Nzais) et la culture européenne dont iles juifs furent pourtant de substantiels contributeurs.

         le présent ouvrage montre bien le hiatus qui surgit nécessairement entre la mémoire et l'histoire. On se souvient de ce que Marguerite Yourcenar écrivait dans les Mémoires d'Hadrien, en substance, le passé, c'est la trace que les événements laissent dans notre mémoire. Or, pour faire de l'histoire et l'enseigner, il faut une matière historique. Heureusement, les historiens sérieux ne nient pas pas la Shoah, mais il faut tenir compte des difficultés ressenties par les professeurs du secondaire devant des publics dits difficiles (maghrébins, arabes, africains) qui, parfois, manifestent de l'impatience, voire même un violent désaccord lorsqu'il est question de la destruction des juifs d'Europe… Certains, dit-on, vont jusqu'à quitter la salle de cours!

       Il y a un aspect que l'enseignement de la Shoah laisse généralement de côté, c'est la cause de la Shoah. Pourquoi a-t-on organisé l'extermination des juifs? Parce qu'ils étaient juifs, évidement. Mais en quoi consistait leur judéité ou leur appartenance juive? Elle tenait à l'essence de leur religion, qu'ils l'aient ou non pratiquée.

       Et là, la perspective change du tout au tout. Or, on enseigne la mémoire de la Shoah sans rien dire de l'essence du judaïsme, même si un philosophe comme Emmanuel Levinas a apporté à cette compréhension de l'essence du judaïsme une substantielle contribution. Il a expliqué, par exemple, que l'altérité juive était plus d'ordre éthique que rituel. On m'objectera que les Nazis n'en avaient cure, et c'est hélas vrai. Mais ce travail apporterait un complément d'information indispensable.

      Enfin, cette mémoire de la Shoah qui doit perdurer et qui, je le slouligne, est l'une des caractéristiques fondamentales et incontournable de l'identité juive contemporaine ne doit pas se substituer à la mémoire du judaïsme lui-même: en une phrase, nous ne devons pas aboutir à une théologie ou une religion de la Shoah qui remplacerait la religion ou la théologie du judaïsme. Ce serait un contre sens à la fois historique et philosophique.

     Car, ne l'oublions pas, c'est parce qu'ils étaient juifs que tous ces êtres ont été impitoyablement tués. Le socle, le fondement de la mémoire de la Shoah, c'est l'essence du judaïsme, qu'elle soit religieuse, philosophique, ou culturelle au sens le plus large. 

     

  • L'affaire Finaly, soixante ans après…

     

     

        Vu hier soir, samedi 9 février sur France 3 une large et belle rétrospective de ce que l'on a appelé l'affaire Finaly, un peu comme on avait parlé, quelques décennies auparavant, de l'affaire Dreyfus… De quoi s'agit-il? Un couple de jeunes juifs autrichiens, fuyant le nazisme, se réfugient en France avec leurs enfants. Persécutés et poursuivis par la Gestapo dans l'Hexagone occupé, ils confient leurs deux enfants Robert et Gérald à une connaissance qui les remet à son tour à une autre dame laquelle les place dans une institution catholique où ils sont baptisés en secret 

       A la fin de la guerre, une tante des enfants tente de les récupérer et on lui oppose un refus catégorique en lui apprenant que les enfants ne sont plus juifs et qu'elle doit donc les oublier… Cette dame, Madame ROSNER, se battra pendant près de huit ans et demi et finira, au terme d'un épuisant combat juridique, par récupérer  (en 1953) ses neveux qui vivent désormais en Israël où l'un est médecin comme son père et l'autre, industriel. L'un et l'autre sont mariés et ont chacun deux enfants…

       Retracer l'histoire par le menu serait impossible, mais quand on réalise le chemin parcouru entre juifs et chrétiens, on remercie la divine providence d'avoir suscité dans l'Eglise catholique des hommes et des femmes enfin conscients que le message du Christ dont ils se disent les dépositaires, est amour, douceur et non pillage des âmes et conversions forcées!! Surtout quand il s'agit d'enfants qui n'ont pas encore dix ans…

        Vers la fin de sa vie, j'ai bien connu le Grand Rabbin Jacob Kaplan qui avait puissamment contribué au dénouement du conflit et qui m'avait demandé de préfacer son dernier livre sur cette affaire; je commençai par refuser arguant que je n'avais pas encore trois ans lors du dénouement de la controverse, il insista et le livre est finalement paru. aux éditions du Cerf.

      Quelles conclusions tirer de cette pénible affaire? Oublier le passé, ne pas ressasser les fourberies de certains éléments ecclésiastiques qui compromirent, par leur débile inconscience, les relations judéo-chrétiennes qui se portent désormais bien et avancent en toute confiance sur le chemin d'une sérénité retrouvée.
     

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  • L'archevêque de Cantorbéry et la charia

     

        Etrange, cette déclaration de l'archevêque de Cantorbéry, la plus haute autorité religieuse du Royaume Uni, sur la nécessité, selon lui, d'aménager certaines lois britaniques afin de les mettre en conformité ou en accord, même partiel, avec la pratique juridique musulmane, en matière de statut personnel (mariage, divorce, héritage etc).

        Evidemment, le saint homme s'est attiré de sèches répliques tant du Premier Ministre que da la ministre de la justice de son pays qui ont rappelé en substance que les lois du Royaume Uni s'inspirent de valeurs britaniques et de rien d'autre …

        De quoi s'agit-il au juste? Si les rapports des agences de presse ne nous ont pas induits en erreur, le prélat propose d'assouplir certaines règles en vigueur dans le royaume afin de faire un pas en direction d'immigrés ou de naturalisés britaniques qui sont tous de religion islamique…

        Soit le saint homme a voulu braquer les projecteurs sur lui en tenant des propos inconsidérés -ce que je me refuse à croire eu égard à la personnalité de l'intéressé et surtout en raison de ses éminentes fonctions- soit il a évoqué des sujets qui le dépassent.

        Comment imaginer, en effet, que deux lois différentes puissent être appliquées aux citoyens d'une même nation, selon que leur religion varie d'un milieu à un autre? Comment supposer que le pays d'accueil change pour complaire aux nouveaux venus qu'il a la générosité d'accueillir et que ceux ci ne veuillent pas changer alors qu'ils ont quitté leur pays et milieur d'origine? Ce que nul ne les forçait à faire…

         Tout ceci est très étrange… On se serait attendu à une telle attitude chez un politicien démagogue, soucieux d'assurer une réélection compromise, en faisant fi des principes, mais de la part d'un religieux, et qui plus est en haut de la hiérarchie de son église! C'est très étonnant.

       Peut-être devons nous faire un autre constat: la lassitude, la fatigue de notre continent de ses religions et de ses idéologies… Mais tout de même, oublie t-on que de telles concessions à une autre législation n'iraiten nullement dans la direction de l'égalité des sexes, du respect de la femme, du statut personnel tel que l'admet l'Europe? On croit rêver.