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Vu de la place Victor-Hugo - Page 446

  • Raphaël DRAÏ ou les prémisses d'une pensée juive vivante

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    Raphaël Draï, les prémisses d’une pensée juive vivante

     

     

     

    La triste nouvelle vient d’être publiée par le site JForum : le professeur Raphaël Draï n’est plus. C’est avec une réelle émotion que l’on se penche sur l’apport considérable de cet homme, à la fois juriste, philosophe, exégète , à tous les domaines du judaïsme contemporain. Il fut un véritable éducateur de sa communauté. Toutes les communautés juives, même les plus petites, les plus éloignées de Paris, faisaient appel à lui. Et jamais il ne disait non : tous les juifs de France, et même au-delà, connaissaient ses travaux et appréciaient son dévouement aux causes du judaïsme et d’Israël qu’il défendait avec mesure et compétence.

     

     

     

    On peut dire que la source de son inspiration était la Bible hébraïque qu’il interprétait en tant qu’exégète mais aussi en tant que juriste. Je pense notamment à sa brillante réfutation de la prétendue loi du talion (lex talionis) dans laquelle des esprits tendancieux voulaient voir les racines d’un judaïsme cruel, réduit à une stricte nomocratie, par opposition à un christianisme  qui serait exclusivement porteur de charité et de bienveillance. Raphaël Draï rappelait alors avec finesse que la notion chrétienne de gracia, de grâce, n’était jamais que la traduction latine de l’hébreu héséd, grâce, bienveillance, ou selon la belle traduction anglaise : lovingkindness. Mais même cette mise au point ne fut faite qu’avec bonté, sans le moindre esprit vindicatif.

     

     

     

    Je ne l’ai pas très bien connu, je ne l’ai vraiment rencontré que deux fois, mais j’ai toujours pris connaissance avec un grand intérêt de ses écrits. Il m’est impossible, comme cela, à froid, de mobiliser toutes les idées riches et productives q’il a mises en avant. Mais on peut dégager une idée centrale qui gît aux fondements de ses activités de penseur et d’éducateur : régénérer le judaïsme, revisiter son humus biblique si fructueux et redonner de l’espoir à ceux et à celles qui étaient à la recherche d’un maître digne de ce nom. Il nous fait redécouvrir l’humanisme biblique. Il se situait tout à fait légitimement dans la lignée d’hommes illustres (André Néher, Léon Ashkénazi, Emmanuel Lévinas, entre autres) qui avaient opté pour une pensée juive vivante, engagée dans son siècle et se tenant à distance d’une érudition sèche et desséchante.

     

     

     

    A l’origine, rien ne semblait destiner à cette œuvre considérable cet homme qui fut un juriste compétent et respecté de ses collègues. Il avait été le doyen de la faculté de droit d’Amiens et son œuvre dans ce domaine reste considérable. Ces connaissances en matière juridique furent mises à profit dans ses commentaires bibliques. A la disparition du rabbin Léon ashkénazi, le célèbre Manitou, il avait courageusement relevé le défi et  entrepris de combler ce vide, assumant ce rôle d’éducateur et de dispensateur de sagesse aux Juifs de l’espace francophone. Au cours de ces dernières années, on le voyait régulièrement sur la 5 dans la belle émission d’Yves Calvi. Mais cette notoriété nationale ne l’avait jamais éloigné de ses origines : la communauté juive de France et d’Europe.

     

     

     

    Je repense à son engouement pour l’expression de banou Israël, les fils d’Israël, qui revenait régulièrement dans ses écrits. Comme Martin Buber et Franz Rosenzweig, il considérait la Bible hébraïque comme une source d’eaux vives, une parole vivante et vivifiante, celle du Dieu vivant.  Pour lui, la Bible était et restait à tout jamais le document fondamental de la vie et de la pensée d’Israël dont la vocation première était justement l’universalisme.

     

     

     

    On ne peut pas, eu égard à cette disparition soudaine, passer en revue  de manière détaillée, l’ensemble d’une œuvre qui lui survivra tant elle est féconde et riche. Il s’était aussi confronté aux idées de Freud sur Moïse et le monothéisme, rejoignant ainsi le travail d’un autre grand historien, l’américain Yossef Hayyim Yerushalmi. Je me souviens aussi fort bien de son œuvre intitulée La sortie d’Egypte, couronnée par le Prix Wizo. Il y eut aussi un autre ouvrage intitulé La communication prophétique. Sans même parler de sa Lettre ouverte au cardinal Lustiger. Il y en eut tant d’autres.

     

     

     

    Le professeur Draï avait fait quelques incursions remarquées dans le domaine des relations judéo-chrétiennes, refusant de voir dans la nouvelle religion la vérité de la sienne propre. Il n’acceptait pas cette théologie de la substitution dont même l’église finira par se distancier.

     

     

     

    La sortie d’Egypte l’a passionné. Il sut apprécier le contenu révolutionnaire du livre de l’Exode qui marque effectivement les premiers pas d’une nouvelle nation sur la scène de l’histoire. Cet Exode, unique en son genre, dessine les contours d’un peuple qui se met en marche, animé par les impératifs de sa vocation : proclamer la doctrine révolutionnaire pour l’époque du monothéisme éthique. Cette sortie d’Egypte est le premier événement historique de portée nationale qui  signe l’apparition d’un peuple en tant que tel, sur la scène de l’histoire universelle. Certes, la formation et la sensibilité religieuse du professeur Draï ne le conduisaient pas à reprendre à son compte les acquis de la critique biblique. Je l’ai dit plus haut et le répète : la Bible était à ses yeux la Parole du Dieu vivant, celui d’Abraham et non d’Aristote, celui de Juda ha-Lévi et non de Moïse Maimonide, un Dieu qui parle aux hommes, se révèle à eux, un Dieu en quête de l’homme, pour reprendre le titre d’un célèbre ouvrage du rabbin germano-américain Abraham Joshua Heschel. A l’époque, nous avions tous dévoré cet autre ouvrage de ce même auteur inspiré, Les bâtisseurs du temps, dont l’adaptation française est due à un autre grand éducateur de son peuple, Georges Lévitte.

     

     

     

    A côté de ses multiples activités, notamment universitaires, le professeur Draï  écrivait des tribunes libres pour différentes publications, notamment communautaires où il commentait, parfois avec une sévérité justifiée, les querelles et les conflits. Il se voulait un intellectuel engagé.

     

     

     

    Né en Algérie au beau milieu de la seconde guerre mondiale, le professeur Draï était animé par cette volonté, si chère aux séfarades de ranimer le judaïsme français dont un des président du FSJU disait au milieu des années soixante, que c’était un désert. Il voulait que l’identité juive réaffirme avec forces tous ses droits face à la culture européenne. Il considérait avec raison que jusqu’en 1962, date du rapatriement des Juifs d’Algérie, les anciennes institutions avait fait au milieu ambiant de larges concessions qui avait conduit à une assimilation galopante. Mais  ce brillant juriste ne rejetait pas en bloc la culture européenne, il exigeait cependant que l’identité juive ne fût pas réduite à la portion congrue.

     

     

     

    Il est difficile de dire de manière péremptoire tout ce que cet homme a apporté à la communauté juive de notre pays. Je pense qu’il fut un éducateur, un champion de la diffusion de la culture juive : il a aidé de toutes ses forces ses coreligionnaires à redécouvrir le bonheur d’être juif sans avoir à renoncer à l’essentiel.

     

     

     

    Maurice-Ruben HAYOUN

     

  • Cuba, le seul succès diplomatique d'Obama

     

    Reprise des relations avec Cuba : le seul succès diplomatique d’Obama…

     

     

     

    Pourtant, les similitudes avec le cas iranien sont nombreuses. Pas de relations diplomatiques depuis 1961, un embargo qui a pesé lourdement sur la vie des gens, etc… avec les Iraniens, ce fut une rupture violente avec une prise d’otages, des sanctions qui ont aussi pesé sur la vie quotidienne des gens. Peut-être plus gravement encore !

    Mais avec les Iraniens, ce sera une autre paire de manche. Il y a la culture et la civilisation car les Cubains ont eu beau vivre sous la dictature communiste des frères Castro, ils n’en sont pas moins des chrétiens et des judéo-chrétiens. Il y a donc des sources communes et partant, des valeurs communes.

     

     

     

    Le président Obama a marqué un point, le seul bon point de ses deux mandats au regard de la politique extérieure. Partout ailleurs il a échoué, et notamment au Proche Orient, et pas seulement en ce qui concerne le conflit entre les Israéliens et les Palestiniens…

     

     

     

    En outre, il a tourné le dos aux alliés traditionnels des USA dans la région , y compris Israël. Pour les autres, on peut comprendre que les monarchies pétrolières du golfe, rétrogrades et parfois même barbares, ne soient pas ragoûtantes pour d’authentiques démocrates comme les Américains, mais tout de même, avoir favorisé l’émergence de l’Iran comme état leader, voire hégémonique vis-à-vis des Arabes est une erreur capitale. C’est une grenade dégoupillée sous les pieds des hommes vivant dans cette région instable du globe.

     

     

     

    Un exemple : l’Egypte qui dépasse en population l’Iran, mais qui dispose pas des mêmes ressources, et qui est sunnite et copte, n’acceptera jamais une domination perse, cela remonte à des enjeux historiques. Je cherche toujours à comprendre le raisonnement de ce président et n’y arrive point. Il fallait maintenir l’Iran dans l’état actuel alors qu’on lui a accordé tant d’avantages.

     

     

     

    Si une crise survenait demain ou après-demain, les USA devront compter sur leurs alliés d’hier. Lesquels ne donneront peut-être plus leur accord automatique.

     

     

     

    Obama fait preuve d’une grande imprévoyance. Mais ce n’est pas la première fois.

     

  • L'Iran et les USA: des relations diplomatiques un jour?

     

     

    L’Iran et les USA : pas de rétablissement des relations diplomatiques ?

     

     

     

    Est ce que le président Obama s’est fait avoir, a t il conclu un marché de dupes avec les Iraniens dont l’élite dirigeante est en proie à des violentes contestations concernant l’attitude à adopter envers l’hyper-puissance qu’ils qualifient de grand Satan ?

     

     

     

    Il faut avancer avec précaution. Le fameux Guide suprême de la révolution sait qu’il doit naviguer avec adresse entre les différents écueils ; or, le corps des Pasdarans qui a fait un coup d’Etat qui ne dit pas son nom en Iran, est très puissant et violemment anti-américain. Il a fallu que les sanctions produisent leur effet dévastateur pour que les forces conservatrices les plus anti américaines admettent le principe même d’une négociation avec les USA sur le nucléaire.

     

     

     

    Il faut se souvenir que chaque vendredi à la fin de la grande prière la foule, enturbannée et aux cheveux blancs ou poivre et sel crient Merg Israël, Merge America (Mort à l’Amérique et mort à Israël). Comment voulez vous passer d’un tel point de vue à un autre qui serait aux antipodes ? D’où les efforts laborieux du Guide suprême pour dire qu’il n’y a pas d’arrangement possible avec les USA et que les négociations avec eux ne portent que sur le nucléaire. D’où la conclusion logique : on ne normalise pas les relations, on ne rétablit pas les relations diplomatiques avec notre ennemi juré, les Etats Unis d’Amérique !

     

     

     

    Mais est ce bien la pensée profonde du Guide suprême ? Ce n’est pas sûr. On a beau être un homme de Dieu, on n’en doit pas moins tenir compte de la situation socio-économique d’un pays de près de 80. 000. 000 d’habitants avec des besoins, des envies et servitudes. Or, les sanctions ont entièrement mis l’économie iranienne à genoux et la population subit de plein fouet le contre coup de l’érosion monétaire.

     

     

     

    Cette fameuse autorité religieuse suprême sait très bien que chaque matin que Dieu fait, il faut boire, manger, se chauffer, dormir, se vêtir, bref dépenser de l’argent et de l’énergie. Les gens ne se nourrissent pas que de slogans : la propagande n’a jamais calmé la faim ni étanché la soif. A trop nier les évidences, les barbus risquaient d’avoir sur le dos des émeutes populaires et perdre le pouvoir.

     

     

     

    Les différentes factions du pouvoir iranien vont donc respecter un long round d’observation. Le président Rouhani est plus inventif qu’on ne le pense, mais il se sait surveillé. De son côté, il compte sur l’effet bénéfique des investissements étrangers dans son pays et de la vente de ses hydrocarbures dans le monde pour renforcer sa position à l’intérieur : les gens vont penser de lui le plus grand bien et restreindre l’influence de l’autre bord, celui de l’extrémisme et le camp du non.

     

     

     

    Ce n’est pas par hasard que le Guide a renouvelé son soutien aux pays où l’Iran intervient militairement (Syrie, Irak, Bahreïn, Yémen et Liban). Cela signifie en clair : notre politique ne change pas, nous restons fidèles à nos combats et à nos idéaux, les USA ne peuvent pas nous acheter.

     

     

     

    Mais ici encore, on ne sait pas si le Guide ne se laisse pas une petite porte ouverte, derrière la scène, pour faire à des événements nouveaux. Si tout le pays opte pour la main tendue et l’ouverture (ce que ne cesse de répéter Rouhani) alors il se ralliera.

     

     

     

    Et puis, il y a la vie. L’âge, la maladie, les changements brutaux, les changements de régime, toutes choses bien connues dans ces régions du globe.

     

     

     

    Mais dans tout cela on ne discerne toujours pas la stratégie d’Obama qui pense dans des catégories mentales de nature paradisiaque ou, à tout le moins, iréniques.. Or il a affaire à des diables.

     

     

     

    Ou alors est ce un marché de dupes ? Oui. Obama se complaît à dire publiquement que nul ne lui a proposé d’alternative viable. C’est inexact, c’est lui qui pousse le pacifisme congénital des Démocrates jusqu’au bout au point de rater tout rendez vous avec l’Histoire.

     

     

     

    Patience : quinze mois passeront vite.