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Vu de la place Victor-Hugo - Page 523

  • L'appel déguisé de M. Valls à une union nationale

    L’appel du pied de Manuel Valls au centre

    C’est indéniable, le gouvernement et sa majorité actuelle sont en parfaite inadéquation, l’un avec l’autre. Mais depuis quelques jours, la crise se précipite et tous se rejoignent dans la discorde, le PS de son côté, le premier ministre de l’autre. Je dis le premier ministre car on ignore ce que pensent les membres du gouvernement. Le fait que Manuel Valls ait été rappelé à l’ordre, même par le chef du PS, montre la profondeur de la ligne de fracture. Mais cela va bien plus loin, puisqu’on peut désormais parler d’une crise de régime ou au moins de gouvernement. Car que vient de faire M. Valls ? Il a, ni plus ni moins, menacé d’ouvrir la porte au centre, menaçant ainsi de changer la composition de la majorité. Il faut vraiment être sourd ou aveugle, ou tout simplement de part pris, pour ne pas reconnaître la situation. Certains pensent que cet appel au centre, auquel seul un dirigeant a timidement répondu, est une façon déguisée d’avancer à pas comptés vers un gouvernement d’union nationale. Les autres leaders du centre ont, quant à eux, franchement repoussé l’offre, parlant d’un «gouvernement socialiste en perdition», condamné par ses propres contradictions et au sauvetage duquel ils ne voulaient pas participer. La situation, il est vrai, n’est guère réjouissante. Il est même surprenant que le gouvernement s’en étonne, regrettant amèrement que l’on ne parle que de ce qui ne va pas. Mais voilà, que l’on nous indique donc ce qui va, nous serons alors les premiers à en parler et à lui donner la place qu’il mérite. Mais aujourd’hui, il faudrait être sourd ou aveugle (voir supra) pour réagir autrement. On nous reproche de dénigrer le pays, de se plaindre, bref d’être des professionnels de la rouspétance, mais comment faire autrement ?  De plus en plus de voix s’élèvent pour dire que la fin de ce quinquennat est sérieusement compromise, certains se demandant même de manière récurrente si son titulaire ira jusqu’au bout. C’est une atmosphère malsaine dont il convient de sortir au plus vite. Comment ? En disant la vérité aux Français. En reconnaissant que la lettre de Bruxelles au sujet du budget de la France n’est pas un message de félicitations mais de critique. La demande de précisions est un véritable euphémisme. Je trouve que l’éditorial matinal de M. Christophe Barbier n’était pas d’un ton exagérément alarmiste : il a parlé d’humiliation. Je me souviens d’une phrase de Georges Pompidou qui établissait un distinguo entre un scandale et le scandaleux : ce n’est pas scandaleux de parler d’un scandale lorsque ce scandale existe réellement… En d’autres termes, ceux qui se lamentent d’une situation lamentable n’en sont ni les responsables ni les auteurs. Que le gouvernement adopte enfin l’idée claire et nette d’une union nationale, il trouvera sûrement une oreille favorable et pourra nouer une authentique alliance avec des forces politiques désireuses d’œuvrer en commun au redressement de ce pays.

    Une occasion à ne pas laisser passer. Même au sommet de l’Etat.

  • Orthodoxie et libéralisme

    Comment est née l’idée même de réforme ou de libéralisme au sein du judaïsme ?

    Historiquement dans l’aire culturelle germanique, sous l’impulsion, volontaire ou involontaire, de Moses Mendelssohn (mort en 1786) et de la science du judaïsme qui domina les esprits juifs du XIXe siècle. Mais des théologiens et des rabbins libéraux veulent voir en des sages renommés du Talmud les véritables initiateurs du mouvement, notamment rabbi Yohanan ben Zakkaï, d’une part, et rabbi Akiba, d’autre part.

    Le premier est à l’origine du judaïsme rabbinique puisqu’il réunit autour de lui le fameux synode de Yabné (90-100 de notre ère) où le culte sacrificiel en vigueur au Temple, désormais détruit, ne pouvait plus se poursuivre et fut donc remplacé par la prière et le culte intérieur. Ce qui suffit à faire de cet homme un réformiste, aux yeux des rabbins libéraux du XXe siècle. Et le second, rabbi Akiba, contemporain de Bar Kochba (vers 130 de notre ère), a lui aussi contribué à substituer les Docteurs des Ecritures aux prêtres puisque le temple était détruit. Akiba aussi pouvait donc faire figure de sage réformiste et de lointain ancêtre de la réforme et du libéralisme.

     Mais ma préférence va aux  explications plus solidement historiques car elles sont plus vraisemblables et ne tentent pas de substituer leurs propres idées à celles des sources juives anciennes..

    En deux siècles d’évolution, les réformistes se sont, pour ainsi dire, assagis et ont opéré un recentrage en direction d’une tradition juive rénovée, mieux adaptée à son temps. L’Europe n’est plus la roue motrice du mouvement après avoir été, pourtant, son berceau et son creuset.

    Les Etats Unis d’Amérique, terre promise de la réforme ? Oui, assurément. C’est bien dans le nouveau monde que le judaïsme libéral et réformé a connu sa finalisation, c’est là qu’il s’est développé, reprenant, du moins à ses débuts, l’héritage germanique des pères fondateurs tout en l’acclimatant aux nouvelles réalités. En d’autres termes, le judaïsme allemand a été l’humus du mouvement américain qui le dépassa en en élargissant considérablement les perspectives.

    En deux siècles d’existence, ce judaïsme libéral implanté aux Etats Unis a nettement changé par rapport aux sources et à l’humus qui lui ont servi de terreau.  Abraham Geiger, l’âme du mouvement, a tout fait pour favoriser l’émergence non pas d’une religion entièrement nouvelle, mais d’une autre sensibilité religieuse qui s’étendrait à tout le judaïsme. Le  mouvement dont il fut l’initiateur a fini par abandonner cette prétention un peu irréaliste. L’ambition de Geiger englobait la totalité du judaïsme, un peu comme le protestantisme de Luther visait toute la chrétienté. Aujourd’hui, beaucoup d’idées du judaïsme réformé se sont naturellement imposées à la communauté juive dans son ensemble. Un exemple : en Israël, c’est le grand rabbinat orthodoxe lui-même qui a renoncé, de son propre chef, au second jour des fêtes de pèlerinage car il en connaissait, mieux que quiconque, la motivation : lorsque la cause n’existe plus, l’effet n’a plus de raison d’être…

     Il faut s’arrêter un instant sur l’immigration juive d’Allemagne vers les USA. Les  premiers jalons d’une émigration juive vers ce pays avaient déjà commencé du temps de Moïse Mendelssohn. A toutes ces familles expatriées il fallait des guides spirituels. Certes, les représentants de l’orthodoxie étaient, eux aussi, bien implantés sur place mais leur conception religieuse n’attirait plus de nouveaux adeptes ; leurs collègues réformés furent mieux partagés. Et ces derniers n’avaient, en guise de modèle, que le paradigme allemand d’un judaïsme réformé ou libéral. Le rabbin David Einhorn, grand admirateur du rabbin Samuel Holdheim (1806-1860) et futur collègue du plus modéré Isaac Mayer Wise, avait immigré aux USA où il prononçait ses sermons en … allemand, car c’était la langue maternelle de toute sa congrégation.

    Les conditions étaient donc réunies pour faire des USA la terre promise de la réforme. Les premières graines semées en Amérique y ont donné leurs plus beaux fruits et ont pris racine sur place puisque la communauté libérale américaine est la plus puissante et la plus dynamique au monde. Toutefois si l’on veut examiner sérieusement les tout premiers débuts du mouvement sur le sol américain, il faut remonter aux timides tentatives de quelques juifs de Charleston, en Caroline du sud, qui, dès 1826, bien avant l’arrivée des leaders européens, se constituèrent en un petit groupe de quarante-sept personnes, issues de la communauté de Beith Elohim (en hébreu la maison de Dieu) et demandèrent respectueusement à leurs dirigeants des réformes concernant le déroulement du culte.

    Voici un bref résumé de leurs principales demandes : Rien n’est plus cher, écrivaient ils, à notre cœur que le respect de notre religion et le bien-être de notre nation. En qualité de membres de la grande communauté d’Israël, nous ne voulons pas transmettre à nos enfants un exemple obscurantiste ni les priver des bons moyens d’adorer rationnellement le Dieu de vérité. En demandant que le ministre officiant (le hazan) répète les prières en anglais, nous fortifions l’attention des orants qui ne comprennent pratiquement plus l’hébreu et renforçons leur ferveur religieuse. Les pétitionnaires reconnaissent que tous n’ont pas les moyens ni le temps de se consacrer à l’étude de l’hébreu. Ils demandent donc avec raison : n’est ce pas le but de toute société religieuse de diffuser les bases de la foi parmi les pauvres et les ignorants ? Du haut de la chaire, on nous expose les fondements de notre religion dans une langue que nous ne comprenons pas.

    Mais les pétitionnaires de Charleston ne s’arrêtaient pas là, ils exigeaient aussi que l’on gardât l’essentiel et que l’on supprimât l’accessoire… Ce qui constituait une réelle révolution. Pour que la prière atteigne ses objectifs, il faut que les passages essentiels soient lus en anglais et que tous puissent les comprendre. Une dernière réclamation portait sur la lecture hebdomadaire de la péricope biblique le samedi matin : cette lecture devrait se faire en anglais afin que tous pussent en tirer profit et en être édifiés. Enfin, les pétitionnaires suggéraient que cette péricope biblique fît l’objet d’une sorte de prêche le samedi après midi afin que les fidèles pussent se faire une idée claire de ce que la Tora recommandait d’accomplir dans un certain nombre de situations.

    Dans ce livre qui vient de paraître Le judaïsme libéral, on examine aussi l’implantation de ce mouvement  en France. Mais en gros, depuis l’apparition de l’ULIF (Union Libérale Juive de France) d’autres communautés libérales ont vu le jour et voient leurs rangs grossir de manière constante et régulière.

  • Le PS français brûle-t-il?

    Le PS brûle t il ?

    Tout ce qui se passe aujourd’hui était prévisible et s’explique par l’attitude de l’actuel président de la République qui refuse de prendre le taureau par les cornes, fidèle à ses habitudes d’ancien premier secrétaire du PS, ce même PS qui ne croit plus en lui-même et dont les adeptes et adhérents se déchirent de plus en plus publiquement et férocement. Il faut bouger, il faut changer, prendre une initiative fracassante et l’exécutif actuel semble paralysé, mais ce qui est très inquiétant, c’est le hiatus qui s’élargit entre le Président et son Premier Ministre.

    Faisons un bref récapitulatif :

    a)    la crise aidant, si je puis dire, quelques dizaines de députés socialistes se constituent en faction contre les mesures du gouvernement, jugées inadéquates par eux. Leur dernière initiative fut de s’abstenir lors du vote du volet recettes du budget de la France.

    b)    Quelques jours auparavant, mine de rien, Martine Aubry lève l’étendard de la révolte et clame son désaccord et ses exigences dans le JDD. Au lieu de saisir la perche et d ‘ouvrir le dialogue, Fr. Hollande et son Premier Ministre campent sur leurs positions, suscitant l’ire de leur contradictrice qui réplique de façon cinglante.

    c)     Dans cette abstention vis à vis du budget, trois anciens ministres font partie des abstentionnistes, ce qui provoque l’indignation des hiérarques socialiste. Ce n’est pas tout, le précédent ministre de l’éducation nationale, Benoit Hamon est allé nettement plus loin puisqu’il a dit que la politique menée par l’exécutif menaçait l’avenir démocratique du pays. En clair , en agissant comme on le fait depuis deux ans et demi, on fait le lit du F.N. L’attaque était si frontale que des voix au sein du PS intiment à Hamon l’ordre de quitter le parti…

    d)    Lors d’une cérémonie de décoration à l’Elysée, François Hollande fait de son Premier Ministre un nouveau Grand Croix de l’ONM, mais ce qui frappe c’est la pique dans le discours : Clémenceau, dit le chef de l’Etat, a bien servi son pays mais sans jamais être président de la République. On remarqua aussitôt que les traits du visage de l’impétrant se sont crispés. Cela sonnait comme un rappel à l’ordre, voire comme une mise en garde.

    e)    Dans une interview au Nouvel Observateur, le Premier Ministre lance une offensive générale pour la mue du PS et sa conquête, en prévision des Etats Généraux et de l’élection de 2017 dont les socialistes semblent penser qu’elles ne concernent plus l’actuel président.. Tous se mettent en position d’attaque, afin de ne pas être marginalisés et d’infléchir le PS dans leur propre direction. D’où l’offensive de Manuel Valls..

    Dans cette interview, M. Valls a traité de paléographes les gardiens du temple socialiste dont il propose de changer le nom. Il va encore plus loin en écartant l’épithète socialiste de son discours, oubliant que lorsqu’il succéda à son prédécesseur, il avait clamé : je suis socialiste ! Et voilà qu’aujourd’hui, il dit vouloir en finir avec la gauche passéiste…

    Que pouvons nous tirer de tout cela ? D’abord, l’inadéquation grandissante entre la politique menée et l’attitude de la majorité parlementaire. Ensuite la défiance croissante à l’égard de François Hollande dont les socialistes se demandent de plus en plus fortement s’ils doivent se ranger sous sa bannière. Enfin, une possible scission du PS menace. Et si rien n’est fait, elle finira par avoir lieu…

    Le problème qui se pose est double : les deux partis de gouvernement, de gauche comme de droite, traversent une crise qui les fait trembler sur leurs bases. Quand on réalise que M. Valls tend la main au Modem de François Bayrou, on imagine le désarroi des militants socialistes de base… La même remarque s’impose du côté de la droite : alors que dans ses précédents meetings, Nicolas Sarkozy se voulait rassembleur, lors de son passage à Nice, il a entièrement changé de registre.. La confusion règne partout.

    Et si vous ajoutez à tout ceci la défiance des Français à l’égard de leurs élites, vous comprenez que le pays a vraiment besoin d’un profond changement.