Le PS brûle t il ?
Tout ce qui se passe aujourd’hui était prévisible et s’explique par l’attitude de l’actuel président de la République qui refuse de prendre le taureau par les cornes, fidèle à ses habitudes d’ancien premier secrétaire du PS, ce même PS qui ne croit plus en lui-même et dont les adeptes et adhérents se déchirent de plus en plus publiquement et férocement. Il faut bouger, il faut changer, prendre une initiative fracassante et l’exécutif actuel semble paralysé, mais ce qui est très inquiétant, c’est le hiatus qui s’élargit entre le Président et son Premier Ministre.
Faisons un bref récapitulatif :
a) la crise aidant, si je puis dire, quelques dizaines de députés socialistes se constituent en faction contre les mesures du gouvernement, jugées inadéquates par eux. Leur dernière initiative fut de s’abstenir lors du vote du volet recettes du budget de la France.
b) Quelques jours auparavant, mine de rien, Martine Aubry lève l’étendard de la révolte et clame son désaccord et ses exigences dans le JDD. Au lieu de saisir la perche et d ‘ouvrir le dialogue, Fr. Hollande et son Premier Ministre campent sur leurs positions, suscitant l’ire de leur contradictrice qui réplique de façon cinglante.
c) Dans cette abstention vis à vis du budget, trois anciens ministres font partie des abstentionnistes, ce qui provoque l’indignation des hiérarques socialiste. Ce n’est pas tout, le précédent ministre de l’éducation nationale, Benoit Hamon est allé nettement plus loin puisqu’il a dit que la politique menée par l’exécutif menaçait l’avenir démocratique du pays. En clair , en agissant comme on le fait depuis deux ans et demi, on fait le lit du F.N. L’attaque était si frontale que des voix au sein du PS intiment à Hamon l’ordre de quitter le parti…
d) Lors d’une cérémonie de décoration à l’Elysée, François Hollande fait de son Premier Ministre un nouveau Grand Croix de l’ONM, mais ce qui frappe c’est la pique dans le discours : Clémenceau, dit le chef de l’Etat, a bien servi son pays mais sans jamais être président de la République. On remarqua aussitôt que les traits du visage de l’impétrant se sont crispés. Cela sonnait comme un rappel à l’ordre, voire comme une mise en garde.
e) Dans une interview au Nouvel Observateur, le Premier Ministre lance une offensive générale pour la mue du PS et sa conquête, en prévision des Etats Généraux et de l’élection de 2017 dont les socialistes semblent penser qu’elles ne concernent plus l’actuel président.. Tous se mettent en position d’attaque, afin de ne pas être marginalisés et d’infléchir le PS dans leur propre direction. D’où l’offensive de Manuel Valls..
Dans cette interview, M. Valls a traité de paléographes les gardiens du temple socialiste dont il propose de changer le nom. Il va encore plus loin en écartant l’épithète socialiste de son discours, oubliant que lorsqu’il succéda à son prédécesseur, il avait clamé : je suis socialiste ! Et voilà qu’aujourd’hui, il dit vouloir en finir avec la gauche passéiste…
Que pouvons nous tirer de tout cela ? D’abord, l’inadéquation grandissante entre la politique menée et l’attitude de la majorité parlementaire. Ensuite la défiance croissante à l’égard de François Hollande dont les socialistes se demandent de plus en plus fortement s’ils doivent se ranger sous sa bannière. Enfin, une possible scission du PS menace. Et si rien n’est fait, elle finira par avoir lieu…
Le problème qui se pose est double : les deux partis de gouvernement, de gauche comme de droite, traversent une crise qui les fait trembler sur leurs bases. Quand on réalise que M. Valls tend la main au Modem de François Bayrou, on imagine le désarroi des militants socialistes de base… La même remarque s’impose du côté de la droite : alors que dans ses précédents meetings, Nicolas Sarkozy se voulait rassembleur, lors de son passage à Nice, il a entièrement changé de registre.. La confusion règne partout.
Et si vous ajoutez à tout ceci la défiance des Français à l’égard de leurs élites, vous comprenez que le pays a vraiment besoin d’un profond changement.