Il y a cen ans, jour pour jour, l’Allemagne impériale déclarait la guerre à la France
Oui, on a peine à y croire, tant de choses ont changé dans cette Europe qui perdit le nord et s’infligea à elle-même de multiples plaies, les unes plus sanglantes que les autres. Deux grandes guerres, à moins de trente ans d’intervalles, et encore des millions de morts et de blessés et évidemment le plus grand génocide dans l’histoire de l’humanité, la Shoah. Et ceci est d’autant plus incroyable que tout ceci aurait pu être évité, comme nous le démontrait un colloque à l’ambassade d’Allemagne à Paris, sur la faillite de la diplomatie. Lors de la discussion avec les intervenants, les deux ministres des affaires étrangères des deux pays, France et Allemagne, un orateur souligna que les germes de la seconde guerre étaient présents dans la première, notamment dans le traité de Versailles qui nourrira la haine et le ressentiment dans le pays voisin. Avec la venue d’Hitler et la ruine du continent.
L’Europe jouit d’une paix totale depuis soixante-dix ans, c’est peu et c’est beaucoup car le reste du monde est pour ainsi dire, à feu et à sang, surtout au Proche Orient où les esprits semblent embarqués pour une guerre d’au moins cent ans. Voyez ce qui se passe en Syrie, en Libye, au Liban, à Gaza, sans même parler de l’Afrique noire où les guerres ne le cèdent même plus à des épidémies encore plus meurtrières.
Quand on constate l’étendue de l’entente entre les deux ennemis d’hier, l’Allemagne et la France, on tente d’expliquer pour quelles raisons la même paix ne règne pas ailleurs entre des ennemis d’hier et d’aujourd’hui. En dépit des différences de sensibilité et de culture, ces deux pays participent d’un même système de valeurs et se rattachent à un même berceau culturel, la Grèce antique, et à un même credo religieux, le christianisme et le judéo-christianisme. Contrairement à ce certains pourraient penser, cela suffit à créer des liens. Voir la vie de la même manière, même si l’on a suivi des cursus différents, peut favoriser les rapprochements.
Certes, de ce côté ci du Rhin, vous ne trouverez jamais un Bismarck français dont l’adage sera affiché dans toutes les classes de toutes les écoles, du genre : l’homme n’est pas sur terre pour être heureux, mais pour accomplir son devoir… Un slogan comme celui-ci est l’exergue d’une nation soldatique, ce que la France n’a jamais voulu être, même si parfois, grâce à France Info, j’entends des chants mobilisateurs dont je ne pouvais pas soupçonner l’anti germanisme… Autres temps, autres mœurs.
J’ai déjà eu l’occasion de parler longuement ici même de la correspondance de deux grands intellectuels, l’un autrichien, l’autre français, Stefan Zweig et Romain Rolland. Ce dernier, réfugié à Genève où il travaillait en tant que bénévole pour le comité international de la Croix Rouge, fait part à son ami de l’horreur que lui inspire une telle guerre.
J’ai écouté tout à l’heure sur I-Télé un reportage faisant intervenir de très jeunes étudiants français et allemands qui doivent mesurer l’étendue de l’horreur et s’engager en faveur de la paix partout dans le monde et pas uniquement en Europe.
Tout s’exporte, et très vite, et notamment la haine de l’autre.