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Vu de la place Victor-Hugo - Page 547

  • Les désorientés d'Amin Maalouf

     Les désorientés d’Amin Maalouf

                                       C’est lui (Nidal, islamiste dont le frère fut tué sur une barricade au Liban) qui   est au diapason de son temps, et c’est moi qui suis d’une autre époque  (p 372 de l’édition en livre de poche)

                               Voyage dans le temps, à dire vrai,  bien plus que dans l’espace. En apparence, je suis venu renouer avec le pays de ma jeunesse, mais je ne regarde même pas le pays, j’y cherche seulement les traces de ma jeunesse je demeure insensible aux choses et aux personnes que je n’ai pas connues dans ma vie antérieure.. (p 378)

                           Quelle est donc la vraie raison de mon retour vers ce pays bien-aimé dont je redoute d’écrire le nom, comme Tania redoute de prononcer le nom de l’homme dont elle est maintenant la veuve ?  (p 412)

    Je le dis d’emblée : j’ai beaucoup aimé ce livre alors que je lis très peu de romans. Et je ne  regrette pas d’avoir consacré tant d’heures à une lecture que je qualifierais de talmudique, c’est-à-dire détaillée, et un crayon à la main. Certes, ce n’est pas ainsi que se lit un roman, mais ce livre est bien plus qu’un roman. C’est l’épanchement du cœur de son auteur, orphelin de son pays, même si, imitant quelque peu, mais avec talent, le grand Stefan Zweig, il superpose ou juxtapose deux personnages, le narrateur et Adam, dont les développements sont imprimés en italiques… Comme dans les nouvelles de Zweig, il y a une histoire dans l’histoire.

    Comme on peut le voir à partir de l’un des passages cité en exergue, le mot Liban n’est pratiquement jamais cité, c’est le mot Levant qui connaît de multiples occurrences et qui lui ressemble comme un frère jumeau : cinq lettres dans chacun des deux, même si Levant en a une  de plus, le T final, mais qui est une lettre quiescente, elle s’écrit mais ne se prononce pas. Quand j’ai considéré le nom du principal personnage, Adam, je me suis demandé, sans faire appel à la numérologie kabbalistique, s’il ne s’agissait pas, en fait, d’un travestissement des initiales de l’auteur, au début et à la fin de ce prénom, situé aux origines bibliques de l’humanité A(min) M(aalouf)…Un peu, comme si l’auteur voulait remonter aux temps anciens, lorsque son monde existait encore et que la vie y suivait un cours normal, devenu celui d’hier (l’expression figure dans le livre) bien avant que tout ne fût emporté par une implacable guerre civile. La réponse est peut-être fournie par l’auteur lui-même quand vers la fin, il se livre à des considérations désabusées sur son prénom : de l’humanité naissante à l’humanité finissante, en voie d’extinction (p 484)… Le ton est en quelque sorte donné, du début à la fin.

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  • Israël et les médias du monde

    Israël et les médias du monde

    Tout juste sorti (provisoirement ?) du champ de bataille et pansant ses blessures, l’Etat d’Israël ne connaît pas de répit, il se voit confronté à une opération d’une tout autre nature, aux dimensions internationales, portée dans tous les foyers du monde, dotés d’une radio ou d’une télévision, l’opinion publique internationale.

    Ce sujet n’est pas nouveau et on peut même dire qu’il se renouvelle depuis l’éclatante victoire de Tsahal de 1967. Là, le jeune Etat avait déconcerté tout le monde, oui, le monde entier. Il avait défait et de manière incontestable les armées de tout le monde arabe ; il avait mis en fuite des centaines de milliers de soldats, occupé de larges portions de territoire et se retrouvait même à 101km du Caire… Ce fut l’apothéose. Mais cela n’allait pas durer.

    Dès l’instant où Israël ruinait les stéréotypes du monde chrétien où le juif était persécuté, livré pieds et poings liés à l’arbitraire de ses cruels persécuteurs et tourmenteurs, toutes ces représentations, héritées du Moyen Age et aussi du milieu du XXe siècle, disparurent pour donner naissance à des conceptions aux antipodes des précédentes. Dans l’imagerie chrétienne du combat symbolique de David contre Goliath, les rôles s’inversèrent : David devenait le méchant et ce sont les Palestiniens qui revêtaient les atours  des persécutés. Et fait incroyable, les Israéliens symbolisaient la violence aveugle et jouaient le rôle fâcheux de l’agresseur. Et pour quelle raison ? Parce qu’ils étaient les vainqueurs !  Il ne pouvait pas en être autrement. Le monde se met du côté des juifs lorsqu’ils sont dans la détresse. Vainqueurs de leurs ennemis, ils ne méritent que sarcasmes et condamnations. Et nous ne sombrons pas dans je ne sais quelle victimologie. Mais malheureusement, un tel discours, si convainquant et si clair soit-il ne passe pas. Il suffit de voir les tribunes acceptées par les grands quotidiens européens : ils ne publient que les textes qui se contentent du service minimum quant au soutien apporté à Israël

    Ce raisonnement occidental, biaisé dès ses fondements, colporté et renforcé par les médias internationaux n’en est pas un, c’est une projection d’images qui heurtent notre sensibilité.

    Un exemple : imaginons une image complaisamment diffusée ad nauseam par les télévisions du monde entier, montrant une femme en train de poignarder à mort un homme… Limité à cette seule scène, l’acte de cette femme est abject et suscite l’indignation générale. Mais si l’on remontait un peu dans le temps et que l’on montrait les images précédentes où l’homme en question est un violeur et la femme se défendant contre une agression, le problème n’est plus le même : la femme qui tue son agresseur n’est plus considérée de la même façon. Voilà, pour parler comme la Bible, le machal et son nimchal, voilà l’allégorie et son interprétation allégorique.

    La saine raison ne peut rien contre l’émotivité, la guerre des images règne sans partage. Et d’ailleurs, qui resterait de marbre devant des gens endeuillés, criant leur douleurs à la face du monde ?

    Nous avons donc affaire à un image du juif qui a radicalement changé. Les Israéliens ne cherchent plus, comme les juifs du monde entier avant sa renaissance, à susciter la pitié ou la commisération du monde entier. Ses soldats sont vaillants et se battent avec leurs armes chaque fois que leur paix ou leur survie est menacée. Et cela a du mal à passer, à être acceptée par les médias du monde entier.

    Très symptomatiques de cet état d’esprit sont les discours tenus hier par Barack Obama et par le secrétaire général de l’ONU : au lieu d’instruire le procès des crimes de guerre commis par le Hamas dont on a tant parlé, ils dirigent leurs accusations contre l’Etat d’Israël. Et comme on l’expliquait plus haut, ils jugent insupportables les images de destruction de Gaza. Ce que je peux comprendre, bien que ce ne soit qu’une partie de la photographie. Mais rien n’est dit sur cette pluie de missiles ayant même provoqué la fermeture de l’aéroport Ben Gourion. Ni sur ces milliers d’habitants du sud d’Israël, confinés, des semaines durant , dans des abris.

    C’est triste. J’espère vraiment que les pourparlers du Caire déboucheront sur une paix durable et le retour de Gaza dans le giron de l’Autorité palestinienne. Après tout, le statut juridique de cette bande côtière n’est pas clair. Et rien ne permet au Hamas d’y régner, mis à part la violence armée. Au lieu d’accuser Israël, l’ONU devriat se pencher sur ce problème juridique international.

     Je conclurai par deux citations bibliques, l’une tirée de la littérature prophétique et l’autre des Psaumes.

    Ha-émét néédérét, la justice (la vérité, l’équité) est absente.  Et tsara hi le-ya’akov u-mimménah ywwash’a : c’est un temps très difficile pour Jacob mais il en sera délivré.

  • Israël-Gaz: question sur le déroulement d'un conflit armé et ses conséquences

    Israël-Gaza : questions au lendemain d’un conflit armé

    En dépit du caractère ardu des négociations qui s’annoncent, il est très improbable que les hostilités reprennent en raison de l’affaiblissement certain des capacités militaires du mouvement islamiste. Le fait même que le Hamas ait dû se soumettre à la médiation égyptienne, alors qu’il connaît les sentiments réels que lui témoigne le pays du Nil, parle de lui-même. Déjà, le Hamas n’évoque plus de port ni d’aéroport, ni même l’ouverture des points de passage, pour la bonne raison, que l’Egypte elle-même et plus seulement l’Etat d’Israël, tient à sa sécurité et ne veut pas permettre au mouvement islamiste de menacer sa propre quiétude en important des armes ou en permettant des attaques contre ses propres soldats dans le Sinaï.

    Le première leçons que l’on tire de ce conflit porte sur la nature même du mouvement qui gouverne à Gaza. Les habitants de cette bande côtière se sont rendus compte que le Hamas et ses dirigeants sont plus des islamistes que des Palestiniens, ils instrumentalisent la cause palestinienne pour servir leur cause majeure, celle de l’islamisme radical, à savoir le mouvement mondial des Frères musulmans. La chose n’apparaît pas encore très clairement en Occident mais elle est évidente dans le monde arabe modéré, les sunnites notamment, où l’axe se dessine d’une alliance entre ces Etats modérés et Israël : c’est l’une des retombées les plus inattendues de ce conflit..

    Cette prise de conscience des habitants de Gaza qui comprennent enfin que le combat du Hamas n’est pas le leur et que celui-ci les traite comme de la chair à canon, va modifier la donne.

    L’armée israélienne a exhibé à la télévision des manuels de la guérilla urbaine où l’on explique clairement aux terroristes qu’il faut se servir de la population comme d’un bouclier humain, heurter la conscience de la communauté internationale en montrant des enfants morts ou blessés et en soulignant que l’éthique de Tsahal lui interdit de dégager une grande puissance de feu en raison des dommages collatéraux.

    Un autre point généralement oublié par les médias : la demande insistante du Premier Ministre Benjamin Netanyahou en faveur de la reconstruction de Gaza, l’offre à cette population civile de certaines garanties de paix et de sécurité, la possibilité d’y développer des industries et de donner du travail  et un avenir meilleur à tous. Cette reconstruction en général et ce développement économique en particulier doivent éclairer un horizon totalement bouché par la guerre qui ressurgit tous les deux ans. En clair, Israël demande fermement la démilitarisation de cette bande côtière, au besoin, il  est même prêt à l’imposer, et le désarmement de la branche armée du Hamas. Après tout, ce groupe terroriste peut suivre la même évolution que le Fatah ou l’OLP : ils ont commencé par être des terroristes avant de devenir au fil des décennies, un simple mouvement politique dont l’appareil sécuritaire collabore vraiment avec les services israéliens.

    En tout état de cause, il faut redonner un espoir et des perspectives d’avenir à ces quelques 2 millions d’hommes et de femmes vivant dans cette région.

    Enfin, il y a toute une série de questions ou de remises en question en Israël même.

    a)    contrairement aux affirmations des autorités civiles et militaires, Tsahal ignorait tout de ces tunnels qui débouchaient au sein même des localités juives dans le pourtour de Gaza. Pourtant, l’affaire Schalit aurait dû donner l’alarme, sonner l’alerte, il n’en fut rien. Je rappelle que la première grosse perte de Tsahal (8 hommes dans un véhicule ancien et non blindé) est survenue à ce moment et aurait pu être évitée. Et les cinq réservistes, stationnés à 1400 mètres de Gaza qui furent exécutés par des assaillants surgis d’un tunnel. Comment l’Etat major de la zone sud n’a t il pas inspecté toutes les positions pour vérifier leur état de préparation et mettre les soldats en état d’alerte maximum ? On constate avec tristesse le résultats de cette impéritie. Comment a t on pu agir avec tant de laisser-aller ? Il faudrait tout de même que cet Etat major rende des comptes ou au moins s’explique. Ce ne sont  pas des accusations mais des questions.

    b)    La position politique d’Israël n’est pas claire et ne l’a jamais été dès le début du conflit. Cette imprécision a éclaté au grand jour lors de l’opposition entre le Premier Ministre et son ministre des affaires étrangères.  L’échelon politique a mis du temps à se décider et à aucun moment il n’a pris de décision tranchée. Les tunnels ne sont devenus la première préoccupation de Tsahal qu’après ces incidents sanglants évoqués plus haut. C’est seulement à cet instant que leur destruction est devenue un impératif absolu. Enfin, le gouvernement ne savait pas s’il devait anéantir le Hamas ou simplement l’affaiblir, de peur que des extrémistes encore plus fanatisés que lui ne lui succèdent… Cette indécision, cette irrésolution, ont pesé lourd. Certes, en tacticien consommé, Benjamin Netanyahou a su adopter une position à géométrie variable. A-t-il convaincu ? Ce n’est pas sûr. Les lendemains de guerre sont toujours les plus périlleux quant à la survie tous les gouvernants.

    Je connais des gens qui me sont très proches et qui résident à 6km à vol d’oiseau de Gaza. Ces gens qui n’envisagent pas de rentrer chez eux et ne sont guère convaincus par des assurances données par des hauts gradés qui, il y a encore trois semaines, ignoraient tout ou presque de la réalité des tunnels…

    Enfin, à aucun moment, Israël n’a cherché à chasser le Hamas de Gaza. C’est son affaire, mais que veut il au juste ? Là est la question.

    Mais pour l’instant, il faudra bien négocier pour réduire l’influence du Hamas sur place et remettre en selle Mahmoud Abbas. Et dans ce cas, on doit s’attendre à ce que se pose la question d’un Etat palestinien… Avec tout ce que cela implique.