Les ambiguités du général Manaf Tlass…
La chaîne satellitaire arabe al-Arabiya a diffusé hier une première interview du général Manaf Tlass, ancien ami d’enfance de Bachar et chef de l’une des divisions les plus importantes de l’armée syrienne. Cet officier général avait été un peu marginalisé par le cercle le plus intime du pouvoir en raison de son peu d’empressement à développer une répressions sans limites. Il a fini par aller jusqu’au bout de son raisonnement et a quitté la Syrie, probablement exfiltré par les services français et américains. Le fait qu’il se trouve aujourd’hui en France s’explique par la présence de sa propre famille sur place, mais aussi par la position de la France dans le conflit intérieur syrien.
Dans cette interview, le général fait preuve d’une très grand prudence. Sans jamais s’en prendre directement à la personnalité de Bachar aux côtés duquel il a grandi et auquel le le lient de nombreux liens d’amitié, il en appelle simplement au patriotisme de ses concitoyens et les exhorte à s’unir pour bâtir une Syrie nouvelle.. Pas une fois il n’incite les soldats à déserter alors que chaque jour qui passe voit grossir les flots de désertions, y compris d’officiers généraux… Pas une fois, il ne réclame le départ immédiat de Bachar…
Est-ce de la prudence, de l’attentisme ou un fin calcul politique ? En d’autres termes, se met-il en réserve de la république dans l’espoir de jouer un rôle dans l’avenir ? Rien n’est à exclure.
En revanche, les leaders de l’opposition ainsi que les chefs de l’insurrection armée sur place n’ont pas oubli le pédigrée de ce général play boy. Ils rappellent volontiers qu’il est le fils du sinistre ancien ministre de la défense, Moustafa Tlass, que les Syriens nomment aussi le bourreau de Hama, l’homme qui exécuté les ordres de Hafez, le père de Bachar, et de Rifa’at, son oncle. A l’époque, au début des années quatre-vingts, on ne disposait ni d’internet ni de téléphones portables et ces messieurs ont pu massacrer leur population sans être inquiétés… Aujourd’hui le Tribunal Pénal International les mettrait en examen pour crimes contre l’humanité… On estime à 20.000, voire 30.000 morts le nombre de victimes lors de l’écrasement de la ville de Hama, foyer du soulèvement des Frères musulmans à l’époque. Il faut rappeler que ceux ci avaient attaqué une académie militaire et égorgé près de 100 jeunes cadets…
Alors qu’entend faire le général Tlass ? Pour le moment, il semble qu’il soit bien au chaud sur la côte d’Azur, sous la protection des autorités françaises qui espèrent pouvoir s’en servir pour faciliter une solution du conflit. C’est une bonne idée, mais je ne suis pas sûr qu’une telle personnalité qui a passé des décennies aux côtés d’un tel régime puisse s’acheter une conduite en quelques semaines ou quelques mois…
Le plus inquiétant, c’est Bachar reprend le dessus en dégarnissant le Golan pour que les troupes d’élite pacifient sa capitale et reprennent Alep après avoir repris Damas des mains des insurgés.
Les insurgés vont devoir repenser leur stratégie et la développer sur une plus grande échelle et avec un nouvel armement. Notamment des armes anti-chars et des missiles stinger ou cornet. Evidemment, si on trouvait une voie pacifique pour inciter Bachar à partir, cela serait nettement mieux.
Mais cela, seul Dieu ou la Russie peut le faire…