Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Vu de la place Victor-Hugo - Page 781

  • La France et l’Allemagne

    La France et l’Allemagne

     

    On a l’impression que les positions se figent entre les deux pays. Un récent article de l’économiste Daniel Cohen, paru dans le journal Le Monde, résumait avec beaucoup de justesse l’incompréhension franco-allemande, le contraire même de la deutsch-französische Verständigung.

     

    La chancelière fédérale ne veut plus entendre parler de ces Euro-bonds, de sinistre mémoire pour elle. La mutualisation des dettes lui fait horreur et le gouvernement français a probablement commis une erreur (en raison de sa jeunesse et de son inexpérience économique) en axant son propos autour de cette mesure. Aux yeux des Allemands, cela a réactivé l’image assez défavorable que l’on se fait des Gaulois de l’autre côté du Rhin.

     

    Il faut savoir présenter la notion de croissance d’une façon plus orthodoxe. Or, les Allemands ont peu goûté (pour parler en termes diplomatiques) les toutes premières mesures du gouvernement français en faveur de la retraite à 60 ans, le smic, etc… Aux yeux de nos voisins, on ne peut revenir à l’équilibre en creusant les déficits.

     

    Il y aura donc beaucoup de travail à faire pour rapprocher les points de vue. Cependant, on ne peut pas dire que le nouveau pouvoir n’adapte pas son discours. Il prépare progressivement le pays à de nouvelles mesures fiscales dont la charge serait équitablement répartie entre les différentes classes sociales. Au fond, c’est bien pour cela qu’il a été élu.

     

    Ce qui est frappant entre les Français et les Allemands, c’est à la fois cette nécessaire proximité et cette incontournable différence. Je me souviens de mes années passées à l’Université de Heidelberg en qualité C4 Professor : toute la journée, j’étais heureux de travailler en Allemagne, de profiter des bibliothèques, de ce sérieux germanique séculaire, mais le soir j’étais étreint par une irrépressible nostalgie ; nostalgie de la douceur de vie parisienne, de ce laisser-aller, de cette indolence des Français… Qui fait la joie de vivre. En d’autres termes, on ne vit pas que pour travailler.

     

    Mais ne dit-on pas que les couples qui tiennent le plus sont basés sur des attirances ou des répulsions surmontées ?

  • L’élection d’un islamiste en Egypte, ce n’est pas la fin du monde…

    L’élection d’un islamiste en Egypte, ce n’est pas la fin du monde…

     

    Dans les pays arabo-musulmans, rien ne se passe ni ne doit s’interpréter comme c’est l’usage en Occident. Et l’élection de M. Mohammed Morsi à la présidence de son pays en fait partie.

     

    Tout d’abord, les militaires disposent du pouvoir véritable, avant comme après l’entrée en fonctions du nouvel élu. Et les protestataires de la fameuse Place Tahrir ne sont pas plus contents de choix que les autres. A leurs yeux, M. Morsi ne présente qu’un avantage, celui d’avoir écarté un homme, le général Chafik, représentant à leurs yeux de l’ancien régime.

     

    Ce sont les militaires qui transmettront à M. Morsi le pouvoir ou ce qu’il en reste. Ils se sont déjà arrogés le pouvoir législatif et économique. Ils vont y ajouter le pouvoir sécuritaire. En fait, le nouveau président islamiste ne dispose plus que d’une coque vide, ce qui risque de poser des problèmes dans un avenir relativement immédiat.

     

    En réalité, les problèmes de l’Egypte, de la Tunisie, entre autres, sont de deux ordres : la pesanteur sociologique et religieuse, et aussi la chômage, la déshérence sociale. Et ce n’est pas D- qui peut résoudre ces deux problèmes. On peut être croyant et faire confiance à ses propres forces sans que ce soit assimilé à un comportement hérétique ou athée.

     

    Il est vrai que la cohabitation entre l’armée et le nouveau président ne sera pas de tout repos. Ce qu’il faut craindre, ce sont les réactions de la rue qui risque de manifester bruyamment et violemment ses frustrations.

     

    Mais ici aussi, ce sont les problèmes économiques qu’il faut résoudre en priorité. La politique étrangère, Israël, Gaza, tout ceci ne vient qu’après.

  • L’incident frontalier entre la Syrie et la Turquie

    L’incident frontalier entre la Syrie et la Turquie

     

    Même si la tension peut, dans les jours qui viennent, atteindre son paroxysme, il n’y a pas vraiment de raison de s’inquiéter. D’ailleurs, la réaction des Turcs, généralement dotés d’une sensibilité à fleur de peau, est largement modérée. En fait, il n’est pas exclu que cet avion dont on déplore sincèrement la destruction ainsi que la disparation de ses deux pilotes, ait été envoyé en mission afin de tester et de repérer les systèmes de défense anti-aérienne du pays voisin. Il convient de ne pas perdre de vue que la Turquie est membre de l’OTAN et que cette organisation était intervenue en Libye par la voie aérienne. Toutes les options étant sur la table pour la régler la crise syrienne, on ne peut pas exclure que les militaires aient sciemment voulu provoquer une réaction syrienne. Cela leur a permis de localiser avec assez de précision l’emplacement des batteries de missiles sol-air et de la DCA.

     

    Les états majors savent que le régime syrien se bat le dos au mur, ils savent aussi que ces gens finiront par tomber comme un fruit mûr. Aucune arme ne peut supporter une telle guérilla à un rythme aussi soutenu, sans pouvoir souffler. La rotation des divisions chargées de la répression se fait mal, les massacres sont de plus en plus révoltants et il ne se passe plus de jours sans que des soldats, voire des officiers généraux, n’aillent grossir les rangs des rebelles. J’écoutais hier soir sur al-Jazeera des journalistes demandant aux déserteurs s’ils avaient traversé la frontière avec leurs armées… La réponse fut effectivement négative mais il est évident que la frontière turque est une zone de repli et un lieu où se regroupent les rebelles pour repasser la frontière et s’en prendre aux forces du régime.

     

    Le fait que la Turquie ait demandé une réunion de l’OTAN à Bruxelles était peut-être la visée majeure de cet incident. L’Otan entre officiellement dans le jeu. Il fallait bien un prétexte et il le tient. La Syrie ne pouvait pas agir autrement, dans la logique qui est la sienne depuis le début des troubles. Si elle n’avait pas réagi, ses adversaires auraient interprété son inaction comme un signe de faiblesse. Il semble donc que cet acte ne soit pas isolé et qu’il ait fait partie d’un plan préétabli.

     

    Après tout, ce sont les Kriegsspiele des états majors…