LE DISCOURS DE FRANÇOIS FILLON DEVANT L’UMP A MARSEILLE
En véritable homme d’Etat, François Fillon vient de nous faire l’aubaine d’un très beau discours, prononcé devant le campus de l’UMP à Marseille. Laissons de côté les attaques ou les pics à l’égard du programme électoral du PS pour nous concentrer sur l’essentiel : une analyse globale et très pertinente des problèmes de la France d’aujourd’hui et des défis auxquels elle doit faire face.
Enfin, un Premier Ministre qui en authentique homme d’Etat qu’il est, n’hésite pas à dire à ses compatriotes d’être fiers de ce qu’ils sont, des Français, un Premier Ministre qui exalte justement et avec le ton qui convient, les réalisations de ce peuple, à la fois vieux et grand, dont l’âme, dit-il, a toujours été partagée entre un fond pessimiste et un volontarisme qui lui a permis de franchir les siècles sans trop d’encombre.
Pour une fois, un chef de gouvernement qui fait appel au patriotisme sans que l’on n y voie la moindre note de xénophobie, ni de rejet de l’autre. En un mot, un discours rassembleur, adressée à la nation française dans son ensemble, qui rappelle à ses auditeurs que la désunion et les dissensions partisanes occupent trop de place dans l’histoire ancienne et présente de la France.
En écoutant le chef du gouvernement, on percevait nettement des accents rappelant le fameux discours de JF Kennedy fixant à la nation une nouvelle frontière, un grand projet mobilisateur, une raison de continuer à espérer et à croire en l’avenir.
On a rarement vu un chef de gouvernement aussi convaincu, aussi déterminé et aussi clair que près de cinq années passées à Matignon n’ont guère usé ni affaibli. Pas l’ombre d’une dissension avec les leaders de la majorité ni avec le président de la République auquel François Fillon a maintes fois rendu un vibrant hommage. Les partisans de l’intégration européenne apprécieront aussi l’articulation subtile de la nation française au sein de ce grand ensemble qu’est le vieux continent. En termes mesurés, François Fillon a fustigé le nombrilisme hexagonal auquel peu de nos compatriotes résistent vraiment. La France doit vivre l’Europe comme un moteur et non comme un frein
Il y a dans ce discours un souffle qui nous entraîne, on sent un homme animé d’une vision et porteur d’un projet, un homme qui occupe mieux l’espace, qui a pris du poids (et pas seulement politique, mais cela lui va bien) et qui a les coudées plus franches…
Les nations dont les racines, comme c’est le cas pour la France, plongent dans un lointain passé, ont régulièrement besoin qu’on les rassure, qu’on les rassérène en leur rappelant que leur avenir n’est pas derrière eux, que leur futur n’est écrit nulle part et que ce sont leurs hommes et leurs femmes qui le graveront dans le marbre, pour peu qu’ils consentent à s’en donner les moyens. En somme, un discours qui confère à l’action politique un arrière-plan moral et intellect que l’on n’espérait plus.. Les hommes politiques commettent une erreur en occultant ce volet éthique dans l’action politique, alors que complément est absolument indispensable.
Je pense au texte de Renan intitulé La réforme intellectuelle et morale (1871) où le célèbre philosophe-historien voulait préserver l’avenir de son pays face à une Prusse victorieuse. Renan, tout comme Nietzsche de l’autre côté du Rhin, tenait à montrer que la défaite militaire de la France n’impliquait nullement une défaite de la culture française face à la culture allemande. En somme, que l’âme du peuple français recelait encore suffisamment de ressources et de richesse pour se redresser et affronter l’avenir.
Parler des valeurs, de l’intellect, de l’esprit, comme vient de le faire François Fillon, enrichit le discours politique qui ne devrait plus se limiter à des algarades ou à des déclarations cyniques : le Premier Ministre tourne résolument à ce genre de discours qui n’a plus sa place dans la France d’aujourd’hui. Espérons que d’autres l’imiteront.
L’avenir, la foi en l’avenir, en l’ingéniosité et en la sagesse du peuple français : c’est ce qu’on retiendra d’un discours si inspiré.