Mourir à Benghazi ?
On assiste à un incroyable retournement de situation. Il y a encore quelques jours, les grandes puissances, USA en tête, donnaient à Khadafi le choix entre une triste fin sur place et un exil doré, quelque part dans une monarchie du Golfe ou au Venezuela. Aujourd’hui, le dictateur libyen lance une contre offensive contre les insurgés et chaque jour qui passe le rapproche de la place forte des rebelles de Benghazi.
Que s’est-il passé ? C’est tout simple : les grandes puissances, à l’exception de la France, se dérobent à leurs engagements moraux envers les combattants de la liberté libyens et préfèrent sauvegarder l’approvisionnement en hydrocarbures (plus la digue contre l’immigration et l’expansion d’al-Quaida) au lieu de s’engager dans une aventure militaire en Afrique du nord. C’est, à peu de termes près, ce que vient de dire le ministre allemand des affaires étrangères… C’est là un cynisme politique inacceptable… Et il ne faudra pas s’étonner que les masses arabes, frustrées d’une victoire assurée en Libye, nous en tiennent rigueur et stigmatisent notre attitude : le pétrole d’abord, les libertés des masses arabo-musulmanes après.
La France et la Grande Bretagne avaient préconisé l’instauration d’une zone d’exclusion aérienne, un peu comme en Irak à l’époque, pour préserver les zones du Kurdistan. Les généraux, sollicités sur la viabilité de l’opération, ont indiqué qu’il fallait, au préalable, assurer la sécurité des aéronefs susceptibles de faire respecter cette non fly zone en détruisant les batteries anti-aériennes libyennes, clouer au sol les quelques avions en état de voler et neutraliser les sites de missiles, pouvant être lancés contre les avions occidentaux… Donc, des actes de guerre caractérisés avant même que de faire respecter l’exclusion aérienne. Ceci a fait réfléchir, voire reculer les Allemands.
Pour obvier à cette situation, les Français ont changé leur fusil d’épaule et se sont rabattus sur une solution a minima : neutraliser l’armée de l’air libyenne par quelques frappes ciblées… La question sera débattue devant le Conseil de sécurité de l’ONU. Et pendant ce temps, Khadafi avance inexorablement.
J’avoue ne pas comprendre cette attitude : le monde entier est en délicatesse avec le dictateur libyen, ses avoirs ont été gelés partout lorsqu’on a pu les identifier, même la Ligue arabe a contesté sa légitimité à représenter le peuple libyen, MM Obama et Sarkozy et Cameron lui ont dit de partir, et malgré tout cela, on se prépare à assister, les bras croisés à la chute de Benghazi…..
Ce n’est pas bien. Souvenez vous de ces pauvres chiites d’Irak lors de la première guerre du Golfe : on les poussa à se soulever contre Saddam et ensuite on les laissa choir, les exposant à une sanglante répression des troupes du dictateur… Les peuples ont la mémoire longue.
Mourir à Benghazi ! Quel drame et quelle honte pour nous, alors qu’en quelques heures, nous pouvons retourner la situation…
Ce n’est pas bien, ce n’est vraiment pas bien. Il faut un peu d’éthique dans les relations internationales.