La déportation des juifs par les chemins de fer français, hollandais et slovaques…
Hier soi, alors que venait de se jouer la demi finale de la coupe du monde de foot ball, rassasié de ce type d’informations aliénantes, je me suis rendu sur ARTE qui diffusait un saisissant reportage documentaire sur la collaboration des sociétés de chemin de fer d’Europe occupée avec les Nazis : il s’agissait de transporter les juifs de France, de Hollande et de Slovaquie vers les camps de la mort, notamment Auschwitz.
Eh bien, figurez vous que la SNCF, les chemins de fer hollandais §oui, hollandais) et slovaques ont transporté des milliers de pauvres juifs dans des wagons à bestiaux (oui, des wagons à bestiaux) sans songer un seul instant aux conditions inhumaines de cette déportation. Détail insupportable : treize jours avant la libération de Paris, un convoi de juifs était parti vers les camps de la mort, ce qui n’empêcha pas la SNCF de présenter la facture aux troupes allemandes. La télévision a montré le fac-similé de la facture.
La même chose pouvait s’observer pour les Hollandais qui ont continué à transporter les juifs. Il y eut des interviews de rescapés, de survivants et de proches des protagonistes. Par exemple, le fils d’un ancien ministre de l’intérieur slovaque qui interrompit les déportations depuis la Slovaquie durant quelques mois en 1942. C’est que des rescapés juifs étaient voir l’évêque local et lui avaient décrit ce qui se passait dans le cadre de la solution finale. En bon fils de l’Eglise, le prélat signifia au dit ministre son écoeurement et sa grande réprobation. Le transport s’arrêta et ne reprit que lorsqu’un nouveau de l’intérieur fut nommé. Preuve que lorsque les gens intervenaient, quelque chose pouvait changer.
Mais les Hollandais, pourtant connus pour leur solidarité avec le peuple juif, n’ont pas mieux fait. Ils ont fait un juteux commerce avec les Allemands (plus de deux millions de couronnes perçus) qui payaient en confiscant les biens des juifs déportés. Rares sont les traces de ce sinistre commerce, mais des Hollandais patriotes ont, au péril de leur vie, prit des photos, seuls preuves de ces moments affreux : un responsable des chemins de fer hollandais fit même un film où l’on voit des soldats et des policiers hollandais prêter main forte aux forces d’occupation.
Mais le pire, car c’est chez nous, est représenté par nos chemins de fer. Il y a eu les procès retentissants de la famille Lipiez (polytechnicien et député écologiste européen) dont le père fut déporta mais échappa à la mort. On a vu cet homme, décédé depuis 2003, décrire le mode de transport de ses compagnons : 36 heures, enfermés debout dans un wagon à bestiaux, sans boire ni manger, parvenant à peine à respirer et lorsqu’on ouvrit les portes des wagons, un tiers des occupants étaient déjà morts, étouffés.
Les juifs passaient par l’ancienne gare de Bobigny, laissée depuis à l’abandon. La SNCF, prestataire de service pouvait-elle ignorer dans quelles conditions elle transportaient ces «voyageurs sans bagages, munis d’un aller simple… ?» J’ai vraiment honte. Il ne s’agit de fulminer un anathème ni de brandir des accusations, mais j’ai simplement envie de dire qu’on est jugé par ses actes et sa conscience, si on en a une.
Bravo à Jacques Chirac pour son discours du Vel d’hiv…
Seigneur, comment la France, patrie des droits de l’homme, ayant pour devise la formule que l’on sait, a-t-elle pu agir de la sorte ?
Quand je partis me coucher, il me fallu lire un texte philosophique allemand durant plus d’une heure avant qu’un sommeil salvifique ne vienne me soustraire à mes sombres pensées.