L’affiche en faveur des Chrétiens d’Orient et la RATP: de la déchristianisamtion à la haine de soi...
Cette affaire est absolument invraisemblable. Comment, dans un pays comme la France, fille aînée de l’Eglise (et c’est un philosophe juif qui le souligne) une entreprise de transport, empruntée chaque jour par des millions de parisiens et de touristes, a-t-elle pu commettre une telle bévue, même si elle s’est rattrapée depuis ? Est ce que le terme chrétien (encore une fois ; je n’en suis pas !) est il soudain devenu une injure, une obscénité ? Je n’ai jamais pris parti publiquement pour telle ou telle cause religieuse, mais en l’occurrence, il s’agit de minorités chrétiennes, menacées d’extinction, dont les ancêtres avaient accueilli chez eux l’islam naissant car, on l’oublie souvent, c’est dans ces contrées orientales que le christianisme est né, qu’il y a fait ses premiers pas et s’est investi avant d’aller à la conquête spirituelle du monde.
Contrairement à ce que croient les gens, le christianisme est une religion orientale et Jésus n’avait pas des boucles blondes mais une chevelure noire et des traits sémitiques assez prononcés. Ce n’était ni un Bavarois ni un Suédois mais un Galiléen.
Je ne sais pas qui a pris cette décision inepte et qui suscite aujourd’hui une énorme vague de protestations. Enfin, on s’achemine vers l’apaisement mais le signal que cette affaire envoie est assez symptomatique, il révèle un malaise profond, une sorte de honte d’être ce qu’on est.
Sont-ce des mythes, ces massacres quasi-quotidiens des minorités chrétiennes en Syrie, en Irak et tout récemment en Libye ? Et n’oublions pas le Kenya où les shebabs somaliens demandaient d’abord à leurs victimes de réciter des prières musulmanes, et si elles en étaient incapables, elles étaient exécutées immédiatement… Ce sont ces victimes innocentes que les prêtres voulaient soutenir en appelant un chat un chat. Ce sont des chrétiens, menacés de disparition, parce qu’ils sont ce qu’ils sont. Curieux ! Je croyais que nos grandes sociétés nationales étaient dirigées par des gens intelligents et voilà qu’ils commettent des bourdes monumentales. Il est vrai qu’un détail, révélé récemment, m’avait intrigué, pour ne pas dire choqué : lorsque ces malheureux coptes avaient été égorgés par les islamistes de l’Etat Islamique, les plus hautes autorités de l’Etat avaient publié un communiqué parlant d’Égyptiens et non de chrétiens ! Or, ces pauvres hommes sont morts en raison de leur appartenance confessionnelle, car leurs collègues d’infortune, mais plus chanceux car musulmans, furent épargnés.
La France aurait-elle honte de son histoire intellectuelle et religieuse ? Comment a t on pu interpréter la laïcité dans un sens aussi restrictif, pour ne pas dire dévoyé ? En me relisant, je m’étonne moi-même de ce que j’écris : soutenir à ce point le christianisme, publiquement, je n’ai jamais eu l’occasion de le faire, même si je ne fais pas partie de cette dénomination religieuse dont les racines sont intimement mêlées aux miennes. Mais voilà mon éducation éthico-religieuse m’a appris à ne pas faire de distinction entre les hommes, porteurs des traits de leur humanité sur leur visage. Un passage talmudique nous exhorte à se conduire en homme là où les hommes sont absents (bi-mekom shé eyn ish héyé lé-ish)… En clair, on ne doit pas détourner le regard lorsque des être humains sont menacés, il faut les aider.
Il faut prendre parti pour des minorités religieuses menacées d’extermination. Alors comment expliquer que tous n’en sont pas intimement convaincus dans ce beau pays ? Nous sommes vraisemblablement en présence d’un processus d’effilochage de la culture chrétienne, une véritable déchristianisation, révélatrice d’une haine de soi largement avancée et répandue… Comment peut-on refuser d’afficher le mot chrétien ou oser proposer, en lieu et place, le mot œuvre (certes, accolé à un nom d’institution, mais que personne ne connaît) ?
Si j’étais méchant, ce que je ne suis pas, je ferai allusion aux reproches articulés contre cette grande entreprise de transports parisiens, et qui remontent à sa conduite lors de la seconde guerre mondiale… Mais heureusement, les choses se sont calmées et ont abouti à un règlement entre les parties.
La France est un pays chrétien, ou plus exactement judéo-chrétien. Le christianisme est une religion-culture qui a, certes commis des fautes et des erreurs graves (je suis bien placé pour le savoir, tant l’histoire juive est plus une martyrologie qu’une histoire proprement dite…) mais tout de même, les bienfaits du christianisme dépassent et de très loin, ses manquements et ses méfaits.
Je ne prends pas Alain Finkielkraut pour un éminent penseur mais je dois rendre hommage à l’expression «d’identité malheureuse» ; mais pourquoi donc une partie de nos élites est elle si mal à l’aise avec les fondements de notre culture ? L’Histoire, disait Hegel, est tragique, et les années de bonheur de l’humanité sont les pages blanche de l’Histoire… Mais toutes les nations ont commis des fautes, chacune s’est cru investie d’une mission quasi divine et appelée à réaliser les projets les plus incroyablement audacieux.
Il faut combattre la haine de soi, ce concept qu’un Juif allemand, Théodore Lessing (1872-1933), première victime du national-socialisme, tué par les sbires de la Gestapo à Marienbad.
La France ne doit pas chercher à cacher ses origines chrétiennes, ce sont elles qui l’ont aidé à devenir ce qu’elle est. D’un autre côté, la hiérarchie de cette église française devrait cesser de croire qu’elle a l’éternité devant elle et agir. C’est bien de s’en remettre à Dieu, mais ce vieux Monsieur a parfois besoin qu’on l’aide, voire qu’on le secoue.
Dieu, nous dit le sage talmudique Rav Hounna, est toujours avec ceux qui souffrent. Il ne fait pas de différence.