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  • Incertitudes sur l’avenir politique de Madame Hillary Clinton

    Incertitudes sur l’avenir politique de Madame Hillary Clinton

    Les résultats très serrés du caucus de l’Iowa conduisent à douter du charisme supposé de Madame Clinton qui se croyait déjà à la Maison Blanche. Certes, elle n’est pas femme à céder si facilement mais les résultats de ce matin vont refroidir ses ardeurs, quoiqu’elle en dise.

    Comment s’explique cette déconvenue qui est en réalité une véritable défaite électorale ? Il me semble, qu’en plus de la personnalité de son challenger qui vise les classes moyennes, la lutte contre Wall street, une meilleure répartition des richesses et une réforme fiscale, il y a la personnalité de la candidate qui se croit toujours la première dame des USA et promène à la ronde une arrogance aristocratique que rien ne vient justifier… Madame Clinton a besoin d’un zeste d’humilité et de modestie, même quand elle fait semblant de remercier ses militants qui se dépensent sans compter, on sent bien qu’elle se croit nettement au-dessus de ce petit peuple auquel elle accorde l’insigne honneur de la servir. Et qu’elle aura vite oublié…

    Une autre chose joue contre elle, le parfum de la revanche qui se dégage de sa campagne : nul n’a oublié le tonitruant : Shame on you, Barack Obama (Honte à vous, Barack Obama). Personne n’a cru à leur réconciliation, même lorsque cette dame devint secrétaire d’Etat. Hélas, il y eut tous ces courriels classifiés Top secret qui se sont retrouvés sur son mel personnel. Ce fut une imprudence incommensurable. Sans même parler de ce qui s’est réellement passé à Benghazi avec le personnel diplomatique US, massacré sur place ! Et là je pense, cependant que l’on exagère sa responsabilité.

    Je pense que ce qui va jouer contre elle n’est autre qu’elle-même= cette excessive assurance, cette arrogance et cette sensation de supériorité la desservent. Peut-être aussi un aspect physique : ce n’est plus la gracieuse petite femme du temps jadis, mais une personne âgée, même un peu boudinée (pardon) qui ne se meut plus avec ll’aisance nécessaire et qui remonte à quelques années. Elle devrait faire un régime pour perdre quelques kg.

    Mais l’essentiel, c’est cette distance qu’elle établit entre elle et les autres, même quand elle se blottit contre son époux, considérablement amaigri avec ses cheveux blancs. Le retour risque d’être difficile. Il est très difficile de changer en profondeur. Les remèdes cosmétiques ne trompent personne. Si on se veut proche du peuple des électeurs, on ne fait pas la moue, on évite ce port altier qui n’est pas de mise ici…

    Mais qui sait ? Souhaitons lui tout de même un redressement de sa côte de popularité. Et peut-être l’arrivée dans un fauteuil dans ce bureau ovale qu’elle connaît si bien…

  • L’OBJECTION de José Manuel Lamarque, Manifeste pour en finir avec la pensée unique (Jacques-Marie Laffont)

     

     

     

     

    L’OBJECTION de José Manuel Lamarque, Manifeste pour en finir avec la pensée unique (Jacques-Marie Laffont)

    C’est au hasard d’une heureuse rencontre, dans le cadre splendide d’une grande ambassade européenne, que je dois la connaissance de cet auteur, grand reporter à France-Inter. Je ne regrette absolument pas cette rencontre, surtout après la lecture attentive de cet ouvrage passionnant.

    Je peux dire d’emblée la chose suivante : alors que la plupart des maux contemporains nous viennent de la mauvaise tenue des journalistes, de leur inculture et deleur superficialité, José Manuel Lamarque redore le blason d’une profession généralement très mal vue et devenue, au fil des ans, la cible de tous les puristes de la terre. Mais l’auteur ne fait pas que critiquer, il passe en revue cent vingt notions qu’il redéfinit ou repense à sa manière, dans le bon sens, selon moi. Et si je devais donner un autre sous titre à cet ouvrage, ce serait le suivant : Plaidoyer passionné en faveur d’une dignité humaine retrouvée.

    José Manuel Lamarque s’en prend à l’une des vaches sacrées de notre époque, intouchable, protégée et inaccessible au commun des mortels, la notion de progrès ou plutôt ce qui tente de se présenter comme tel… D’ailleurs, en égrenant toutes ces notions, il commence par les abeilles et finit avec la vie. Pourquoi les abeilles ? Eh bien, parce que notre gestion de l’expansion économique menace la survie de cette espèce, qui, si elle venait à disparaître, entraînerait, en peu d’années, dans sa chute tout le genre humain.

    C’est une course désordonnée, voire anarchique, vers le progrès, qui a entièrement changé la face de l’avenir : on lit d’ailleurs avec quelque inquiétude la mirobolante expansion des communications (un terme que l’auteur n’aime pas, surtout au singulier) sur internet qui devrait connaître son effondrement vers 2023, en raison de sa consommation grandissante d’électricité.

    Mais ce n’est pas tout, le monde n’a d’intelligibilité qu’à travers le langage, un peu comme l’annonçait le Sefer Yetsira, premier ouvrage de cosmologie hébraïque, des VI-VIIe siècles. Or, l’auteur de ce livre signale dès les premières lignes que la première aberration dont l’humanité est victime, est la perte du sens des mots. Et là aussi, il me pardonnera, lui qui n’a pas inscrit le mot Bible dans cet abécédaire, de m’en référer à l’épisode de la Tour de Babel et de la confusion des langues : ne pas parler la même langue, ne pas donner ni laisser aux mots leur sens premier mène à l’incompréhension, et pire encore, à la guerre.

    La pensée, oui, la culture, le savoir, la bienséance, la délicatesse, le bon goût, et tant d’autres choses ont disparu sous les coups de boutoir de ce qui se présente de nos jours sous ses plus beaux atours, la bêtise, la pensée unique, la communication et les sondages, véritables girouettes guidant même nos gouvernants. Cette infatigable vélocité, cette course-poursuite, cette volonté de dominer l’Autre, alors que l’éthique la plus élémentaire nous commande de lire sur son visages les même traits humains, toutes ces déformations semblent inéluctables : J-M Lamarque n’hésite pas à parler d’aliénation, c’est-à-dire le fait de devenir étranger à soi-même. C’est probablement dû à cette substitution de la civilisation à la culture, au remplacement de l’écrit par l’image, du savoir et de la connaissance par les émissions télévisées et la littérature classique par le rap… Il suffit de suivre avec un peu d’attention la réformes des programmes scolaires pour mesurer l’étendue du désastre : au lieu de hisser les jeunes cerveaux au niveau de la vraie culture on les laisse stagner et on met des Ersatz à leur portée. Et ce saupoudrage est avilissant. Coupable populisme, condamnable démagogie.. Du reste, les meilleures œuvres, les émissions les plus éducatives, les plus enrichissantes ne rassemblent que peu d’auditeurs dont le nombre ne cesse de baisser dangereusement. Ce qui signifie que le couperet de l’audimat ne tardera pas à tomber.

    Je ne peux pas reprendre dans cette brève critique, tout le contenu de ce beau livre si suggestif et si riche, mais je note que dans la dernière page de son introduction, son auteur se dit indigné par l’équivalence suivante : apprendre ou connaître, c’est s’ennuyer !

    Comment faire pour stopper ces dérives inquiétantes de l’époque ? Voilà une tâche bien difficile. Mais on peut commencer en lisant ce livre qui se veut un cri d’alarme.

    Maurice-Ruben HAYOUN in Tribune de Genève du 1er février 2016

  • Remise de peine partielle n’est pas grâce présidentielle

     

     

    Remise de peine partielle n’est pas grâce présidentielle

    François Hollande a su se tirer d’affaire en faisant le moins de vagues possible. Il faut le féliciter sincèrement d’avoir répondu aux demandes légitimes de filles d’une accusée-condamnée sans heurter frontalement qui que ce soit : il était pris entre le marteau et l’enclume. Il a su ménager la chèvre et le chou. Il a bien fait, on lui en saura gré. Et surtout il a rendu sa décision très vite. Bravo Monsieur le Président !

    Cela permet au philosophe de tirer quelques enseignements sur la justice, son rôle et son essence dans nos sociétés modernes. Ces deux points ont revendiqué l’attention des penseurs depuis l’Antiquité biblique, la sagesse grecque jusqu’à nos jours.

    A quoi sert la justice et pourquoi occupe t elle dans une démocraties une place à part ? Depuis la séparation des pouvoirs dans les sociétés démocratiques, l’indépendance dans la justice est intangible, inaliénable. Le marqueur des régimes tyranniques ou anti-démocratiques est justement celui-là : tout pays qui n’a pas de justice indépendante n’est pas fréquentable et ses citoyens ne sont pas libres.

    Mais peut on imaginer dans une société humaine, donc faillible et amendable, une institution, un principe, un idéal, échappant à l’évolution historique des sociétés ? D’où donc la justice tire t elle sa force sinon d’un principe qui la dépasse, à savoir la souveraineté populaire ? Peut-elle prononcer des verdicts au nom du peuple français, en l’occurrence, sans avoir à lui rendre des comptes ? Et à obéir parfois à un principe qui la dépasse parce qu’il gît justement à son fondement ?

    Dans ses Principes de la philosophie du droit, Hegel prend ses distances par rapport à la transcendantalité de Kant et à l’absolu de Fichte qui considère le droit comme une science. Mais la question demeure entière : comment agir selon le droit, comment agir selon la morale ?

    Kant, dans son traité intitulé De la paix éternelle (Zum ewigen Frieden), n’a pas pu résoudre cette aporie au motif qu’elle est simplement insoluble. En outre, il se lance dans des développements abstraits qui le conduisent à parler des fondements métaphysiques du droit. Et dans ce cas, on peut faire remarquer qu’il centre ses développements autour d’une autre matière, d’autre chose : ce n’est plus de la justice qu’il parle mais du droit, notion nettement plus abstraite. En somme, même si lo monde n’existait pas, même si nous n’étions plus là, le droit conserverait sa légitimité : c’est trop ! Cela fait penser à la répartie de Charles Péguy : le kantisme à les mains pures, mais il n’a pas de mains

    Le vieux principe romain de Fiat justitia et pereat mundus se traduit ainsi : que la justice soit, le monde dût- il en périr ! Hegel n’est pas d’accord et il a bien raison. La justice est là pour permettre aux hommes de vivre dans l’harmonie. Elle doit leur permettre d’être heureux en respectant les règles de la justice humaine. Elle ne doit pas les broyer à la seule fin de sauver un principe abstrait.

    Et pour le cas de Madame Jacqueline Sauvage, il ne s’agit pas d’accorder à certaines femmes le droit de tuer. Je partage pleinement l’émoi des juges dans de telles circonstances. Mais les juges auraient dû réfléchir avant de condamner un être humain à deux reprises à une si lourde peine alors que cette personne, en l’occurrence une mère de famille, a vécu un véritable calvaire, battue, violentée depuis près d’un demi siècle et ses filles victimes d’un père incestueux. Malgré tout, je n’ose pas dire que ce bourreau d’enfants méritait la mort mais puisqu’elle lui a été donnée, on ne saurait considérer ce geste comme un acte purement criminel : il fallait le relier au contexte qui a conduit la victime de ces traitement inhumain à une réaction éminemment coupable dans l’absolu.

    Mais les juges que nous avons, souvent jeunes et mal formés, peuvent il dire qu’ils vivent dans l’absolu ? Existe t-il un dogme de l’infaillibilité judiciaire ? Qui oserait le prétendre au vu de tant d’erreurs judiciaires et de mauvais jugements ? Mais c’est une vieille affaire : les premier verset du Livre d es Juges dans la Bible est éclairant à ce sujet : Et il advint du temps de la judicature des Juges… On l’interprète aussi de la manière suivante : et il advint du temps où l’on jugeait les Juges , où ils devaient (eux-mêmes) comparaitre devant les tribunaux…

    C’est pourquoi je trouve que le droit de grâce est une institution des plus honorables. Il faut qu’existe une autorité capable de décider en son âme et conscience qu’il faut apporter un correctif à une décision, même émanant d’un tribunal des assises : les juges sont des hommes et des femmes comme les autres !

    Le président de la République a fait honneur à sa fonction suprême. Il n’existe pas, au dessus de lui, d’autre autorité, étant entendu qu’il ne viole aucun principe. En agissant comme il vient de le faire, il a simplement aménagé la peine de cette dame, il est resté dans le cadre de la loi. Et j’espère qu’aucun petit juge ne cherchera à se médiatiser en refusant d’examiner favorablement la demande de remise en liberté conditionnelle de Madame Jacqueline Sauvage. Et s’il le faisait, eh bien, il assumera sa décision et en rendra compte devant sa conscience. Après tout, les magistrats rendent leur verdict en notre nom, nous le peuple français.

    Le président François Hollande a très bien agi. Cette fois-ci, on sent que l’affaire lui tenait à cœur : pas de jugement à la Salomon, pas de tentative de synthèse boiteuse à la Premier secrétaire du PS, mais une belle décision humaine, humaniste, équilibrée et courageuse.

    Cela n’a pas dû être facile, prendre une telle décision en moins de quarante-huit heures. L’Histoire retiendra, quelle que soit l’issue en mai 2017, que le président de la République François Hollande a agi ; et qu’il a agi vite et bien.

    Maurice-Ruben HAYOUN in Tribune de Genève du 1er février 2016