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Vu de la place Victor-Hugo - Page 517

  • Une intifada à Jérusalem?

    Une intifada à Jérusalem ?

    Cela en a tout l’air : les événements se précipitent dans la cité du roi David qui joue un rôle central dans l’histoire juive depuis trois mille ans. C’est dire combien le sort de cette ville préoccupe les juifs du monde entier. Ces mêmes juifs qui depuis deux mille ans, date du début de leur exil, prient à toute occasion pour la libération de cette même ville et la reconstruction de leur temple. Mais voilà les cousins arabo-musulmans, eux aussi fils du patriarche Abraham, par le truchement d’Ismaël et de sa mère l’Egyptienne Agar, revendiquent eux aussi cette fameuse esplanade des mosquées que les juifs et les Judéens avant eux nommaient déjà, à l’époque d’Isaïe (VIIIe siècle avant l’ère chrétienne) le Mont du Temple (Har ha-Bayit). Depuis l’avènement de l’islam, cette ville est aussi revendiquée comme l’un de ses lieux saints. Une fameuse mosquée fut érigée en lieu et place de l’ancien temple juif. Problème : chaque fois que des juifs s’aventurent dans ce périmètre si âprement disputé . Au lieu de prier Dieu et de ne le jamais prendre comme caution pour occire d’autres hommes, croyant et priant autrement tout en étant, comme nous tous, créés à l’image du Seigneur, nous sommes condamnés à compter les morts et les blessés.… Quand donc cette hécatombe s’arrêtera-t-elle ? Je ne mets pas tous les protagonistes sur un même plan, il me semble que sans léser les intérêts ou les revendications de quiconque, on peut avancer que l’attachement des juifs à Jérusalem est le plus ancien, le plus fort et les plus poignant. Même au plus profond de l’abîme, les juifs n’ont jamais cessé, dans leurs prières quotidiennes, de prier pour Jérusalem. Est ce que ce titre de propriété est exclusif de tout autre ? Certes, je ne le crois pas, même si la folie meurtrière de quelques uns va faire passer mon discours ou mes rappels historiques pour d’aimables rêveries d’un philosophe attardé, la tête dans les nuages et qui méconnait superbement la triste réalité. Mais réfléchissons : pourquoi deux ou trois, ou quatre communautés religieuses ne supporteraient elles pas que d’autres prient le même Dieu, un peu plus loin d’elles, voire même à une distance respectueuse ? Après tout, répétons le, c’est le même Dieu. Dans une récente étude publiée ici même, je rappelais une phrase d’une profonde simplicité, dite par Franz Rosenzweig : Dieu a créé le monde mais n’a créé aucune religion… Dieu comprend et parle toutes les langues, il exauce toutes les prières. Un simple coup d’œil sur le livre des Psaumes nous prouve la valeur ce patrimoine incontesté de l’humanité éthique. Il y a aussi une phrase très profonde dans le Talmud où Rav Hunna veut répondre à une question grave : Dieu est avec qui, il est aux côtés de qui ? Rav Hunna répond : Dieu est avec ceux qui souffrent  Je pourrais m’en tenir là et conclure mais il faut revenir à la réalité. Isaïe, encore lui, plaidait en faveur de l’universalité du monothéisme d’Israël et il prédisait qu’un jour, l’humanité messianique affluerait vers le Mont du Temple qui sera alors plus élevé que toutes les autres collines environnantes. Il dit spécifiquement : et afflueront vers lui toutes les nations. Tout le monde croira en la Tora, mais celle-ci est prise dans le sens de la Révélation de la transcendance et non dans un esprit particulariste : ce serait insensé de prétendre le contraire. Est ce servir sa religion ou la cause de sa propre religion que de tuer d’autres gens qui prient, pensent ou croient autrement ? Je ne le pense pas. Pourtant, nous ne sommes pas des anges et nous vivons dans un monde partagé en des pays séparés par des frontières. C’est tout de même hautement symbolique de voir que la ville qui abrite le berceau du judaïsme, du christianisme et aussi de l’islam soit devenue l’un des foyers les plus brûlants des contestations religieuses, là où sévit la haine. Je ne crois pas que la violence parviendra à résoudre le moindre problème ni à frayer la voie vers une solution du conflit opposant les Israéliens aux Palestiniens. Habitués à combattre le terrorisme et à vivre depuis des lustres dans un environnement hostile, les Israéliens ne se laisseront pas impressionner. Mais ils doivent, malgré tout, redonner de l’espoir et ouvrir des perspectives. Il y a dans ces dernières actions terroristes un aspect de désespoir qui ne laisse pas d’inquiéter.

  • Barack Obama, une fin de mandat sans gloire?

    Barack Obama, une fin de mandat sans gloire ?

    Les instituts de sondage ne se sont pas trompés, qui prévoyaient une sanglante défaite pour le parti démocrate qui se voit condamner à payer pour l’impéritie et les incompétences de l’actuel président US. Ce ne sont pas nos propos mais la reprise de ce qui se disait aux USA avant ces élections de mi mandat où la quasi totalité des candidats démocrates ont prié B. Obama de rester chez lui tant ils craignaient que son impopularité ne rejaillisse gravement sur eux. Fait significatif, tous ces candidats ont préféré faire appel à Madame Clinton qui prépare allégrement sa candidature aux prochaines élections présidentielles.

    Quelle chute ! B. Obama a pu faire illusion avec quelques slogans simples, quelques idées allant dans le sens d’une Amérique troublée, lassée de jouer le gendarmes du monde et prête à suivre le premier aventurier venu, pour peu qu’il pratiquât une politique aux antipodes de celle de Georges Walker Bush qui avait envahi l’Irak et renforçait sa présence en Afghanistan. B. Obama a beaucoup louvoyé, il a plus réfléchi qu’agi, il a évacué l’Irak et l’Afghanistan et aujourd’hui il constate que le travail à accomplir prendra des années pour remettre de l’ordre dans cette région du monde. A aucun moment, il n’a vu venir le danger de l’Etat islamique qui conquiert chaque jour de nouvelles portions de territoire, rendant bien plus aléatoire la remise en ordre. Partout où il est passé, Obama a échoué : dans tout le Proche Orient où il s’est même fâché avec le plus fidèle allié de son pays, Israël, avec les Irakiens, les Libyens et les Afghans… Partout, il a refusé de voir les choses frontalement. Ce n’est pas ainsi qu’on dirige la plus grande puissance du monde.

    Et je ne parle même pas de sa réaction face aux agissements de Vladimir Poutine qui s’est rendu coupable d’une agression caractérisée contre l’Ukraine voisine, signant des accords de cessez le feu qu’il viole aussitôt après. Plus personne ne fait confiance à l’Amérique d’Obama, il suffit de voir le budget militaire de la Pologne et celui des petits Etats baltes que le monde entier avait abandonné à Staline… C’est d’ailleurs la première comparaison qui vient à l’esprit : Poutine, un nouveau Staline ? Il semble qu’il y a ici plus qu’une rime…

    Au Proche Orient, Obama a tenté de marginaliser le Premier Ministre israélien au moment où celui-ci est secrètement loué et apprécié par les Etats arabes modérés de la région. C’est dire. Mais ces mêmes états savent qu’ils ne pourront compter que sur eux mêmes, et non sur B. Obama, s’il leur arrivait malheur, surtout face à l’Iran. Les monarchies du Golfe suivent avec effroi ce rapprochement objectif avec l’Iran des Mollahs en Irak où le chiisme est solidement implanté.

    Cela me fait penser à une déclaration de l’ancien secrétaire d’état US, le général Colin POWELL : sorti du bureau d’Arafat, assiégé à la Mouqatta par les commandos israéliens, il avait dit ceci : The guy is lost… ce type ne sait plus où il habite.

    C’est un peu le cas de Barack Obama avec un Congrès majoritairement hostile.

  • L'hébreu, langue sacrée ou langue de tous les jours; entre Gershom Scholem et Franz Rosenznweig

    Franz Rosenzweig (1925)  et  Gerschom Scholem[1] (1927)  sur la sacralité de la langue hébraïque

    L’hébreu, langue sacrée ou langue parlée de tous les jours ?

    Du côté de Franz Rosenzweig

    Dans ce qui va suivre, on lira l’étude d’un contraste. Contraste entre deux approches opposées, ou presque, émanant de deux juifs allemands, qui ont marqué leur temps et même la postérité : Franz Rosenzweig (1886-1929) et Gershom Scholem (1897-1982). Ils s’opposent[2] sur l’essence de la langue hébraïque, son usage en Palestine mandataire et la conduite à tenir face à sa nature de langue sainte ou sacrée, c’est-à-dire pour Rosenzweig, bien plus pratiquant et plus religieux que Scholem, son usage liturgique.

    Il faut dire un mot des relations entre ces deux hommes qui avaient en commun la même appartenance religieuse, leur judaïsme, le même souci de mettre un terme à cette hémorragie par lequel la religion juive perdait les meilleurs de ses fils au profit des confessions chrétiennes, la même volonté de redressement et de rajeunissement, bref la même volonté de s’affirmer en tant que juifs et d’être considérés et respectés comme tels.

    Mais ils différaient considérablement eu niveau de leurs caractères et de leurs personnalités. Rosenzweig, né quelques années avant Scholem, provenait de la grande bourgeoisie juive allemande, passablement assimilée mais n’ayant jamais envisagé de franchir la ligne la séparant de la conversion, alors que Scholem émanait, quant à lui, de la petite bourgeoisie juive assimilée de Berlin où son père, propriétaire d’une imprimerie prospère, vaquait tranquillement à ses occupations le jour de Kippour. Cette famille comptait plusieurs fils qui tous, suivirent des voies différentes : Werner, devint le député communiste le plus du Reichstag, l’autre frère votait pour la droite allemande (Deutschnational) tandis que Gershom que se nommait alors Gerhard optait pour le sionisme au plan politique et pour l’étude de la mystique juive, au plan culturel. On comprend que le père, Arthur Scholem, ait eu quelques difficulté à gérer de telles situations… surtout face à des fils qui s’écartaient de manière inquiétante de la voie qu’il leur avait tracée. Le plus rebelle de ces fils fut sans contexte Gerhard qui deviendra Gershom lorsqu’il s’établira en Terre sainte dès 1923 après avoir été chassé par son père du domicile familial.[3] Ces détails biographique touchant à la personnalité propre à Scholem expliquent, en partie, cette rencontre ratée avec le plus grand penseur judéo-allemand des années vingt, Franz Rosenzweig.  Leurs rencontres, trois au total, ne furent pas placées sous le signe de la  vive cordialité mais plutôt dans un climat de franchise, voire de méfiance caractérisée.

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