Nicolas Sarkozy : le retour du pareil au même ?
Il faut éviter les caricatures et les déformations. J’ai suivi la longue intervention du président Nicolas Sarkozy hier sur France 2, en compagnie de Laurent Delahousse. Mon impression est que les déclarations étaient justes, bonnes et bien fondées mais que, parfois, l’ancien chef de l’Etat avait un peu de mal à se contrôler, à se retenir… Cela montre qu’il était sincère. Est ce suffisant ? Je crois que oui.
En fait, depuis près de deux ans, la France semblait frappée de langueur, un parti majoritaire qui tourne à vide et une opposition qui ressemblait à un véritable champ de ruines. Aujourd’hui, la France cesse d’être unijambiste. Il va y avoir des débats et il ne se passera pas de jour sans que Nicolas Sarkozy ne combatte la politique de son successeur.
L’intervention d’hier se voulait modérée mais au fur et à mesure que l’heure passait l’ancien président a viscéralement stigmatisé la politique de son successeur. Il a repris l’incroyable répétition (Moi, président) qui avait été déterminante lors du grand débat : ce soir là, le sort de NS avait été scellé.
Mais l’essentiel est ailleurs. Très adroitement, NS a évité de donner son programme, il a habilement remis ses deux challengers à leur place (Alain Juppé et François Fillon) avec un suffisant « j’ai besoin d’eux», sous entendu, ils se rallieront à mon beau panache blanc…… Ceci n’augure guère de paisibles lendemains dans le camp de l’opposition : si Alain Juppé se met à défendre un programme présidentiel dès aujourd’hui, Fr. Hollande peut espérer jouir d’un répit, mais celui-ci ne sera pas long. On connaît la constitution du monde politique : chacun négocie son ralliement et pour obtenir le plus de choses on fait monter les enchères pour mieux sa ranger par la suite, après avoir obtenu la promesse qu’on ne sera pas oublié../ Cela s’appelle obtenir des compensations.
Que va faire NS désormais ? Il va sûrement emporter la présidence de l’UMP sans coup férir ; il va rebaptiser ce parti, remobiliser les donateurs, insuffler un nouvel esprit à des structures vraiment vermoulues. La chose la plus délicate sera l’élaboration d’un programme présidentiel. A lui seul, le nouveau parti de NS ne pourra jamais l’emporter. Il faudra négocier des alliances et ce ne sera pas facile.
Mais la France attend. Les Français souffrent, ce n’est une surprise pour personne. En revanche, ce qui est nouveau, c’est que le président de la République l’a clairement reconnu lors de sa dernière conférence de presse : il ne dispose plus de marge de manœuvre, selon certains journaux (Le Monde) il ne peut même plus agir. C’est probablement cette paralysie, au moins apparente et que l’on espère passagère, qui a poussé NS à sortir de son silence. Il a très bien compris que le peuple n’attendra pas, les bras croisés, que près de 34 mois s’écoulent… Les graves incidents de Morlaix sont peut-être les prodromes de développements inquiétants.
En effet, une certaine improvisation du gouvernement (annonce impromptue de la disparition de la première tranche d’imposition) a choqué, jusque dans le camp de la gauche. On a l’impression que le premier ministre est penché sur le guidon et réagit au coup par coup. Or, il faudrait être animé d’une vision et porteur d’un projet.
Les Français devraient forcer leur nature et imiter leurs voisins allemands qui ne reculent pas devant une grande coalition : il faudrait un gouvernement d’union nationale. Et ceci ne fait pas partie de la culture politique française où majorité et opposition s’excommunient mutuellement. Le gouvernement dispose d’une majorité relative qui lui permet de gouverner. Mais dans cette course d’obstacles, il y aura dans quelques semaines, le vote du budget. Et là les frondeurs verront grossir leurs rangs…
Et que fera NS à ce moment là ? C’est là toute la question…