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Vu de la place Victor-Hugo - Page 596

  • Hommage à Monsieur Jean-Louis Borloo

    Hommage à Monsieur Jean-Louis BORLOO

    Il ne faut jamais désespérer. Voici un homme que j’appréciais très modérément et dont j’avais soutenu le rival, François Fillon, lorsque Nicolas Sarkozy envisageait de changer de premier ministre. M. Borloo m’apparaissait alors comme un animal essentiellement politique, avide de pouvoir et sacrifiant tout à ses ambitions. Je pensais d’ailleurs, bien au-delà de ce cas individuel, que le monde politique était inamendable, que ces hommes et ces femmes avaient autant besoin de pouvoir que nous de l’air qu’on respire, bref, je pensais le plus grand mal des édiles, et tout a changé hier soir lorsque j’ai appris par la radio que M. Borloo, gravement malade, rendait tous ses mandats et se retirait de la vie politique pour se concentrer sur sa santé. En quelques minutes, tout a changé. Généralement, les hommes et les femmes politiques font tout pour cacher la vérité sur leur état de santé ; quand ils sont mis en examen, ils nient les évidences et s’accrochent à leur fauteuil. Et là, vous avez un homme que rien ni aucune loi ne forçait à démissionner et qui, avec panache, renonce, se retire avec dignité, rendant ainsi à la politique son aura platonicienne qu’elle avait perdue depuis fort longtemps. Voyez le cas de certains chefs d’Etat qui tiennent au pouvoir bien plus qu’à leur vie. Jean-Louis Borloo nous a donné une leçon de dignité et de grandeur morale qu’on attendait depuis longtemps. Quel panache ! Je suis sûr que si l’on donnait aux écoliers de Genève ou de France un tel sujet de dissertation, ils couvriraient d’éloges l’ancien maire de Valencienne, cette petite ville du nord que M. Borloo a sorti de la misère (près de 20% de chômeurs à l’époque !)… Or, cela fait bien longtemps que les hommes et les femmes politiques ont cessé d’être des modèles pour la jeunesse.

    Dans la deuxième partie de ce papier qui se veut un hommage à un homme politique qui a placé avant son intérêt politique, une certaine conception de l’action publique, je voudrais, pour le dénoncer, m’en référer au vocabulaire animal, véritable bestiaire, en vogue dans ce monde si inhumain et si bestial des politiques. On parle de jeunes loups, de grands fauves, de l’absence d’amitié en politique, de larmes de crocodile, de chasser dans les mêmes eaux,  de grandes phalènes, de couper les jarrets, le liste est interminable… Et pourtant, l’opinion accepte cela avec résignation, sans s’élever contre un registre lexical indigne. Tout à l’heure, j’ai écouté Pascal Lamy, un très haut fonctionnaire qui a fait ses preuves depuis l’époque de Jacques Delors, parler du cerveau reptilien d’un très haut, mais très, très haut personnage de l’Etat… Je pense que vous voyez de qui il s’agit.

    Eh bien, M. Borloo vient de nous administrer la preuve du contraire : pour la première fois, un homme rompu aux combats inhumains de la politique, renonce, se retire, et se montre à nous sous son vrai jour avec une résolution non politique mais  authentiquement humaine : réconcilier les valeurs de l’humain avec celles de la politique, qui se présente comme un combat animal, parfois bestial, où il n’y a qu’un fauteuil avec un trop plein de prétendants. Lesquels sont prêts à tout pour arracher la victoire ! Encore un terme indigne : arracher ! Personne, pas même Dieu, n’a le droit d’arracher quoi que ce soit…

    Changer la politique présuppose que l’on change l’homme. Hier c’était impossible, depuis le cas de M. Borloo, on retrouve de l’espoir. Cela devient possible. Mais ne soyons pas naïfs, une hirondelle ne fait pas le printemps. Souvenez vous de deux présidents de la république très malades mais continuant à gouverner malgré un état de santé diminuée..

    Du fond du cœur je souhaite à M. Jean-Louis Borloo un prompt et définitif rétablissement. Et je souhaite aussi, avec mon indéracinable naïveté de philosophe optimiste que toute la classe politique s’inspire d’un si haut exemple. Mais ce n’est pas gagné…

  • Pour le centenaire de la guerre de 1914: Romain Rolland et Stefan Zweig en correspondance..

    Romain Rolland (1866-1944) et Stefan Zweig (1881-1942) : deux humanistes face à la barbarie de la première guerre mondiale

     

    Depuis quelques mois on assiste à une sorte de renaissance de ces deux auteurs, jadis liés par une amitié si indéfectible que même les horreurs et les folies de la première guerre mondiale n’ont pas réussi à détacher l’un de l’autre. Et pourtant, les tentations et aussi les occasions de se haïr et de s’entredéchirer n’ont pas manqué.  Certes, certains échanges épistolaires entre Rolland et Zweig ne furent pas à l’abri de vives tensions mais les deux hommes ont toujours réussi à le surmonter.

     

    Les maisons d’édition parisiennes semblent s’être donné le mot : Albin Michel vient de publier le premier volume de la correspondance entre Rolland et Zweig ; Gallimard a publié en fascicules distincts de merveilleuses nouvelles de Zweig et une maison, moins grande mais tout aussi talentueuse, Bartillat, vient de faire paraître l’imposant journal de Vézelay (1938-1944) de Rolland, au soir de sa vie. On dispose donc d’un panorama complet de deux intellectuels qui assistent quasi impuissants à la ruine de l’Europe, sombrant dans un abîme de haine et de violence absolument inouïes…

     

    En cette année de centenaire de la guerre de 1914, on se demande comment une telle erreur de jugement et d’appréciation des différents gouvernements, a été possible. Comment deux nations désormais si proches et si fraternelles ont pu s’entredéchirer à ce point… Les journaux intimes ainsi que les correspondances d’hommes célèbres offrent l’opportunité –rare- de découvrir ce qu’ils pensaient vraiment du monde qui les entourait et des événements qu’ils vivaient. Cette remarque s’applique d’autant plus à ces deux hommes qui se faisaient confiance, chérissaient la paix et l’amitié entre leurs deux peuples et ne confondaient jamais patriotisme et nationalisme. Dès la fin de l’année 1914, Rolland rappelle qu’il ne faut pas confondre victoire et valeur. Il publia son célèbre appel Au de la mêlée dans le Journal de Genève  le 15 septembre 1914.

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  • Ke nouveau gouvernement français; les leçons à en tirer

    Le nouveau gouvernement français : les leçons à en tirer

    Bien sûr, il faut souhaiter bonne chance à ce gouvernement dont les Français attendent beaucoup et notamment qu’il jugule le chômage, rétablisse le pouvoir d’achat, réinstalle la sécurité et traite efficacement la dette. Est ce que les conditions sont réunies pour parvenir à un tel objectif ? La question se pose sérieusement. Mais il y en d’autres que le récent remaniement dont ce gouvernement est issu pose avec acuité : ne faut il pas changer les institutions, passer de la Ve à la VIe république ? Revoir les pouvoirs quasi monarchiques du chef de l’Etat ? Il est la clef de voûte de l’ensemble, il peut même dissoudre l’assemblée nationale, ce qui, d’une certaine manière, le place au-dessus de la volonté populaire. C’est lui qui décide à quel moment il peut remercier le premier ministre. Enfin, il a, sans le dire vraiment, deux domaines réservés, la défense car il est le chef des armées et la politique étrangère qu’il est le seul à déterminer en fin de compte. Tous ces dispositifs étaient vraiment nécessaires du temps du général de Gaulle et étaient appelés à lutter efficacement contre l’instabilité politique. Aujourd’hui, près de 60 ans après 1958, cela ne s’impose plus puisque la France est devenue, comme les autres pays voisins, une province parmi d’autres au sein de l’U.E.

    Et cela pose assurément les limites de la marge de manœuvre de M. Manuel Valls. D’ailleurs, le gros défi du nouveau pouvoir est avant tout la négociation avec Bruxelles et la nécessité dictée par l’Europe de combattre les déficits : la maison France n’est plus maîtresse chez elle…

    Par ailleurs, est ce qu’on peut remanier comme on l’a fait il y a quelques jours ? Est ce qu’on peut ainsi remercier un gouvernement et son chef alors que ce dernier n’a fait qu’appliquer, avec des fortunes diverses, les instructions du président ? Voilà une mentalité française que les voisins ne comprennent pas. Certains n’hésitent plus à dire que la France n’a pas quitté le régime monarchique… Demandez à la chancelière allemande ce qu’elle en pense…

    Il faudra donc changer les institutions. Je ne crois pas que le gouvernement actuel soit en mesure de le faire. Il faudra pourtant en passer par là.

    Une dernière interrogation : ce nouveau gouvernement sera t il en mesure de gagner les prochaines élections européennes ? D’après tous les sondages connus, c’est hors de sa portée. On a déjà entendu un ancien ministre critiquer son parti, le PS, qu’il traite de coque vide. Cela pose aussi la question du maintien de Harlem Désir à sa tête. On ne peut pas dire qu’il ait brillé par des initiatives courageuses et innovantes, se contentant d’emboîter le pas à un gouvernement inexpérimenté et paralysé par d’innombrables couacs.

    Le changement, c’est ce que les Français aiment et pourtant ils le redoutent et le nouveau gouvernement qu’on leur offre ressemble étrangement au précédent.

    Il faut prendre les problèmes à bras le corps, le taureau par les cornes. L’Union Européenne n’attendra pas la France éternellement