Remous politiques en France..
Comme on le laissait entendre dans le précédent papier, celui d’hier notamment, un hiatus prend place entre un président originellement socialiste et qui se dit aujourd’hui socio-démocrate et une majorité socialiste qui se veut socialiste et entend le rester. Ce scénario est absolument inédit car on pouvait tout prédire sauf cela : les députés pensent avant tout à leur réélection et non à celle d’un homme qui s’est servi d’eux pour ne réaliser que ses aspirations personnelles alors qu’eux devront rendre des comptes à leur propre électorat… …
Pour une fois, les enjeux sont contradictoires, pour ne pas dire opposés, entre un président et sa majorité parlementaire. Les choses se sont envenimées et le Premier Ministre a dû calmer le jeu hier à l’Assemblée : ce n’était plus à l’opposition qu’il s’adressait mais à sa majorité qu’il tentait de rassurer. Alors que l’oukase présidentiel enterrait purement et simplement la loi sur la famille, les députés socialistes ne l’entendent pas de cette oreille et veulent présenter des projets de loi de leur propre chef qui reprendront les thèmes auxquels ils tiennent. On peut les comprendre puisqu’ils sont élus sur un programme précis.
François Hollande a enfin pris conscience des réalités de la France contemporaine ; il a compris que certaines pesanteurs sociologiques et d’incontournables nécessités économiques rendaient un certain pragmatisme absolument présent : la politique est l’art du possible. Pour être élu, on se livre à toutes sortes de promesses car on n’attrape pas des mouches avec du vinaigre, mais une fois élu, on fait ce qu’on peut et on se maintient au pouvoir. Mais l’agenda d’un président ne coïncide pas toujours avec celui des députés de son propre camp. Seuls les naïfs croient encore que lorsqu’on fait un bout de chemin ensemble, la vie est un long fleuve tranquille.
Alors que va t il se passer ? François Hollande n’est pas un novice en politique, il a prévu cette petite fronde et lors de sa conférence de presse (le 14 janvier) il a prévenu que le gouvernement engagerait sa responsabilité à l’Assemblée. En langage clair : si vous en avez le courage, censurez donc mon gouvernement et vous verrez. De mon côté, je vous dissoudrai et convoquerai de nouvelles élections. Et vu l’impopularité qui règne dans le pays, vous serez laminés, la droite reviendra, je gouvernerai avec elle, et quant à vous, vous aurez tout perdu.… Etes vous candidats au suicide ? La seule possibilité qui s’offre à vous, est la suivante : me suivre sans faire d’histoires…
Les députés, comme tous les hommes politiques à tous les niveaux, optent pour la continuité ; entendez : ils veulent continuer à disposer de leur place. Donc le gros des députés suivra docilement. Mais une scission est toujours possible, voire inévitable. La gauche de la gauche, comme on dit, rejoindra le front de gauche, tandis que le président pourra toujours se constituer une majorité d’idées, si chère à Edgar Faure..
Après tout, si l’on pousse dans ses conséquences ultimes la profession de foi social-démocrate, c’est à cela qu’on aboutit.
On dit souvent que les hommes ne discernent jamais entièrement ce qui se passe dans les replis les plus intimes du cœur des femmes. Cela vaut aussi pour les hommes politiques.