Vive Noël, vie son sapin et ses santons…
Je commencerai cette note par une référence à mon regretté collègue Bruno Etienne, grand politologue de l’université d’Aix en Provence. Il disait, en parlant de la laïcité, que la France est un pays catho-laïque. Ni entièrement catholique ni entièrement laïque. Et il avait bien raison. Je suis très étonné de voir que certains se retranchent derrière le dogme d’une laïcité fermée et obtuse pour réclamer l’éloignement des sapins et des crèches des édifices publics en France. Noël fait partie de notre culture, quand les lumières et les étoiles et les sapins ornent nos rues et nos immeubles, ce n’est plus un symbole religieux mais un fait culturel. Il ne faut pas oublier que la religion a été la première éducatrice de l’humanité. Cela même Averroès et ses commentateurs médiévaux l’avaient admis. Carl Schmitt l’a bien expliqué dans sa Théologie politique, recueil de quatre conférences tenues au début du XXe siècle dans son pays. La religion a sécrété une culture dont les valeurs sacrées se sont graduellement transformées en principes humanistes. Noël ne fait de mal à personne. Le christianisme n’a pas apporté que des mauvaises, il a aussi transformé notre monde par son évangélisation. C’est lui, malgré toutes les fautes commises, qui a tiré les Barbares de leurs barbarie. Cette fête des lumières, si bien enracinée à Lyon a quelque chose à voir avec la fête juive de Hanoukka dont l’intérêt majeur, par-delà le fait religieux est de couper l’obscurité de l’hiver, de mettre dans nos cœurs cette lumière qui nous manque durant les mois de novembre et de décembre. Donc pourquoi ce faux procès qui va encore diviser la France dont les racines judéo-chrétiennes sont incontestables ? Les familles françaises se réunissent la veille du 25 décembre pour un dîner convivial mais qui sont ceux qui pensent à la nature religieuse de ces joyeuses agapes ? Ils sont très peu nombreux. Ce qui risque de se passer, c’est une nouvelle ligne de démarcation entre les Français : ceux qui y tiennent et ceux qui n’y tiennent pas. Et je peux vous dire que les premiers formeront l’écrasante majorité. Le drame est qu’on va les assimiler à des gens extrémistes, des xénophobes, des racistes et ainsi de suite. Mais laissez donc les gens vivre comme ils l’entendent. Quand je vais dans un restaurant étoilé, je ne demande pas que l’on écarte de la carte ou du menu les mets interdits par ma religion. Ceux que la vue de la crèche ou du sapin révulse n’ont qu’à fermer les yeux. C’est valable tant pour Noël que pour Hanoukka. La concierge de mon immeuble va bientôt installer un sapin dans le hall, c’est bien. Elle le fait chaque année. Et une bonne majorité des occupants des lieux ne sont pas chrétiens…