L’apprentissage de l’anglais, une atteinte à la francophonie ?
C’est bien connu et on ne reviendra pas là-dessus, ce serait enfoncer une porte ouverte : les Français se prennent pour la huitième merveille du monde. Leur langue leur semble être celle que parlaient Adam et Eve au paradis ! Et l’on se souvient des récriminations justifiées des touristes à Paris, ces dernières années, butant sur des interlocuteurs qui ne comprenaient pas un traître mot d’anglais. Heureusement, les choses se sont améliorées ; même les policiers, notamment les plus jeunes, comprennent un peu l’anglais, jamais l’allemand, mais nos voisins d’outre-Rhin sont largement bilingues…
La langue anglaise ! Voilà le prétendu corpus delicti. Or, il faut apprendre l’anglais sans que cela ne fâche contre le français. Voyez ici même à Genève, tout le monde parle français mais tout le monde parle aussi l’anglais et parfois même l’allemand comme à Berne et à Zurich… Mais en France, il y a un certain nombre de gens qui développent un point de vue antinomique : chaque progrès de l’anglais serait, selon eux, une défaite pour le français et un recul de la francophonie.
Il faut se rendre à l’évidence : l’anglais s’est acquis des positions presque inexpugnables. Il faut regagner des parts de pays et de locuteurs sans dénigrer la langue de Milton. Cela ne sert à rien.
En revanche, ce qu’ l’on pourrait faire, sans contrarier personne : c’est enseigner le français, soigner l’écriture des journaux, corriger les journalistes, couronner les bons écrivains. Ne jamais confondre le succès avec le talent.
J’ai remarque que les Africains parlent le plus souvent un français plus correcte que les Français de France. Même à Kigali, j’ai un jour suivi une interview sur France 24 où un jeune manager exposait dans un français châtié les objectifs de son usine. En Normandie, les paysans locaux ne parlent pas aussi bien…
On observe aussi un phénomène que j’ai relevé même sur les télévisions satellitaires arabes : l’introduction de néologismes en langue arabe, à partir de l’anglais, comme : salle de presse, droits de l’homme, chute du régime, etc…
Ce qui montre que toutes les langues sont sœurs. En France, contrairement à l’Allemagne et à la Suisse ou aux USA, on ne lit guère la Bible. Revoyez les passages du livre de la Genèse où Adam nomme les choses ; relisez l’épisode mythique de la tour de Babel et de la confusion des langues, présentée comme une véritable plaie de l’humanité…
Et comme le disait un poète ancien : toutes les langues sont étrangères, la traduction n’étant qu’ un processus de naturalisation en direction de l’humain.