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Vu de la place Victor-Hugo - Page 705

  • La fête de Pessah, la Pâque juive

    La fête de Pessah, la Pâque juive.

    Depuis hier soir, au crépuscule, les juifs du monde entier célèbrent Pessah, la Pâque juive, censée commémorer la sortie d’Egypte. Le terme hébraïque Pessah provient, selon l’étymologie fournie par la Bible elle-même, du verbe PSH qui signifie enjamber, sauter par dessus quelque chose. En l’occurrence, il s’agit ici de Dieu qui épargne en les enjambant les demeures des fils d’Israël lors de son élimination des premiers-nés des  Egyptiens, coupables de retenir son peuple Israël en esclavage. Là-dessus est venue se greffer la tradition de l’agneau pascal dont le sang devait maculer les linteaux des demeures d’Israël en Egypte afin que Dieu puisse épargner les siens. Il s’agit  ici assurément d’une représentation populaire d’un mythe fondateur voulant accréditer la présence protectrice de Dieu dans l’Histoire, et notamment dans celle d’un peuple qu’il s’est choisi et qu’il a élu. Ce sont là les racines de l’élection d’Israël, même si selon les philosophes modernes les plus profonds, Martin Buber et Emmanuel Levinas, la notion d’élection doit être prise dans le sens d’une mission. Non pas «missionarisme» comme le faisait à une certaine époque l’église catholique mais une charge consistant à se faire l’apôtre du Dieu unique auprès du reste de l’humanité.

    Nos frères chrétiens ont changé entièrement la symbolique de cette fête qui renvoie dans la Bible à la sortie d’Egypte, conçue comme le premier événement national du peuple d’Israël en tant que peuple et non plus en tant qu’agrégat de bandes d’anciens esclaves en rupture avec tout le monde. C’est à une personnalité hors du commun qu’incomba la tâche redoutable d’unifier ces hordes rebelles sans foi ni loi mais que Dieu avait choisies pour en faire son peuple : Moïse, fils d’Amram et de Yochébéd.

    Mais voilà, depuis des siècles, la critique biblique a sérieusement remis en question la nature de la mission de Moïse, voire même carrément douté de son existence historique. D’autres comme Ernst Sellin ( 1867-1948) n’ont pas douté mais émis la thèse de l’assassinat de Moïse dans le désert par ce peuple que lui-même qualifiait de peuple à la nuque raide  Au moins deux versets bibliques lui mirent la puce à l’oreille : Moïse lui-même qui se sent menacé et qui dit textuellement au sujet de ses opposants : Encore un peu et ils me lapidaient… (‘od me’at u-sékalouni) et un passage d’Osée, un prophète de le seconde moitié du VIIIe siècle avant Jésus, qui y fait une allusion transparente… Freud s’est, comme chacun sait, emparé de cette idée qui lui a permis de douter l’origine israélite de Moïse et d’en faire le fils illégitime d’une princesse égyptienne laquelle aurait, pour expliquer la naissance de cet enfant issu d’amours inavouables, inventé une nouvelle version : j’ai trouvé cet enfant, abandonné dans une corbeille flottant sur le Nil…

    Yossef Hayyim Yeruschalmi a longuement et talentueusement pointé les faiblesses du raisonnement de Freud dans son ouvrage Le Moïse de Freud dont nous avons longuement rendu compte ici-même dans la Tribune de Genève… Mais l’hypothèse reste séduisante. Toutefois, si elle s’avérait, elle ruinerait les bases de la religion d’Israël, ainsi que celles autres religions monothéistes.

    Mais Moïse, qu’il ait ou non existé, qu’il fût un Israélite ou un prince Egyptien, n’était pas pour autant sorti du creuset de la critique : même ceux qui admettent son existence historique jettent un regard soupçonneux sur la réalité de la théophanie qui lui fut accordée aux pieds du Mont Sinaï. On prête à son beau-père Jéthro, le grand prêtre de Madian, la paternité de la religion d’Israël. Moïse réfugié en pays madianite où il a trouvé une épouse Sepjora, aurait repris la divinité de son beau-père dont la Bible elle-même reconnaît que ce dernier offrit des sacrifices à Dieu et qu’il conseilla à son gendre comment introduire une réforme judiciaire au sein du peuple. C’est dire l’influence que cet homme dont la mont Sinaï faisait partie du territoire a pu exercer sur Moïse, le grand prophète-législateur d’Israël. Cette thèse ou plutôt cette hypothèse s’appelle l’hypothèse kénite et ferait de la religion, voir du Dieu d’Israël un sous produit de la divinité et du culte de Jéthro… Le problème est que ce Dieu là, devenu le Dieu d’Israël, était celui de la tribu kénite, les descendants de Caïn…

    Dans son excellent ouvrage intitulé Moïse (Jérusalem, 1944 ; traduction française aux PUF en 1957, repris en 1986 dans quadrige), Martin Buber tente de s’en prendre à cette hypothèse madiano-kénite selon laquelle le Dieu du Sinaï ne serait plus celui des patriarches au motif qu’il scelle une alliance avec les enfants d’Israël. S’il les connaissait déjà, une alliance ne s’imposait plus… Buber répond qu’il ne faut pas confondre conversion et simple identification. Et qu’un homme qui croit en une divinité, lorsqu’il est témoin d’un prodige ou d’un miracle, en l’admettant en sa créance, a naturellement tendance à l’attribuer au Dieu en lequel il croit. D’où le phénomène de fusion ou d’identification.

    On le voit, les questions soulevées par la Bible sont très nombreuses et le plus souvent insolubles. Pourtant, la foi des croyants a su se frayer un chemin et se maintenir au cours des siècles, voire des millénaires. Or, la foi, la croyance authentique crée, génère son objet.

    Les chrétiens voient dans la Pâque le miracle de la résurrection qu’ils attendaient ardemment tandis que leurs frères juifs conservent le souvenir de la libération du joug de l’esclavage.

    Difficile de rapprocher les deux points de vues en dépit d’un dialogue sincère et d’une amitié retrouvée. Il faudrait qu’un jour l’amour des hommes et la Grâce divine infligent un démenti salvifique à la phrase belle mais assez désabusée de Martin, aucune religion n’est un morceau de paradis tombé sur terre…

  • La manifestation contre le mariage pour tous d'hier à PAris

    La manifestation contre le «mariage pour tous», hier à Paris

    Images très frappantes hier soir à la télévision à propos des heurts entre la police et les manifestants dans le quartier de l’Etoile et des Champs Elysées. C’est la première fois depuis fort longtemps que de telles scènes de violence se produisent ainsi au cœur même de la capitale française.

    Le ministère n’aurait pas dû confiner la manifestation dans des secteurs très étroits : c’est la cause principale des violences. Par ailleurs, tout en respectant la volonté de la majorité actuelle d’appliquer les réformes pour lesquelles elle a été élue, il faut aussi veiller à ne pas diviser le pays,  la minorité a elle aussi le droit de dire ce qu’elle pense, dans le calme et le respect de la loi.

    Personnellement, je ne savais pas que les opposants à cette mesure étaient aussi fortement mobilisés. Etait ce une raison pour faire donner les CRS contre des femmes et des bébés dans des poussettes ? Il faut faire très attention à ne pas exciter les oppositions.

    Cela dit, les gens ne comprennent pas très bien pourquoi on se focalise sur des thèmes sociétaux alors que la France est engagée dans une guerre contre les islamistes au Mali et que la situation économique est très délicate, les plans sociaux se succédant les uns aux autres. Ajoutez à cela la mise en examen d’un ancien président de la République et l’élection de justesse d’un député UMP, devançant d’à peine 8OO voix le candidats du Front national, et vous aurez la température exacte du pays. Et certains ajoutent même à ce tableau la côte de popularité anormalement basse du président de la République.

    Ce pays, la France, est un vieux pays doté d’un solide bon sens et de beaucoup d’expérience. Il faut l’aider à évoluer sans le forcer ni le violer. Si l’on veut que les choses avancent sereinement il convient d’en tenir compte.

  • La Turquie et Israël, vers un rétablissement mais sans réchauffement

     

    La Turquie et Israël : vers un rétablissement mais sans réchauffement.

     

    Si l’on devait chercher désespérément  ou presque un élément constructif ou une retombée positive du voyage du président Obama au Proche Orient (hormis son aspect touristique à Bethlehem et à Pétra) ce serait sans conteste le rétablissement de relations normales mais non plus chaleureuses entre Jérusalem et Ankara. En effet, avec l’Arabie Saoudite et les monarchies du Golfe, il s’agit de deux alliés solides des USA dans cette région en proie à des soubresauts depuis toujours : M. Obama avait donc tout intérêt à pacifier les relations entre ces deux puissances régionales. Et Ankara est de surcroît membre de l’OTAN. Enfin, les difficultés de M . Erdogan tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de son pays l’on rendu moins récalcitrant.

     

    DE son côté, Israël a fait un geste puisque M. Netanyahou a appelé son homologue turc pour lui présenter des excuses, suite à la riposte israélienne contre les convois turcs désireux de se rendre à Gaza malgré  l’interdiction de Tsahal.  Saül Liebermann s’y opposait avec quelque raison mais comme il est actuellement empêché, le premier ministre a pu agir.

     

    L’affaire avait été préparée par les Américains et par quelques rencontres discrètes. Les ambassadeurs ont été envoyés à leurs postes respectifs et il semble que la situation en Syrie et les remous en Egypte aient convaincu le premier ministre turc que son meilleur allié, fiable, puissant et démocratique, n’était autre qu’Israël. M. Erdogan a pris son temps, il a fini par comprendre que les impératifs de politique intérieure ne devaient jamais peser sur les bons choix à l’extérieur.

     

    C’est un bon signe pour la suite. M.Erdogan n’ignore pas que les USA et Israël vont sûrement agir en Iran dans les semaines qui viennent, eu égard au retour du beau temps et de la saison chaude.

     

    La Michna, une partie du Talmud dit que celui qui vient se purifier doit bénéficier de toutes les facilités. On lui facilite la tâche. Ha-ba lehitthér, messsaye’im lo/

     

    Maurice-Ruben HAYOUN

    In Tribune de Genève du 24 mars 2013