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Vu de la place Victor-Hugo - Page 788

  • Les suites de l’élection du candidat islamiste Mohammed Moursi en Egypte

    Les suites de l’élection du candidat islamiste Mohammed Moursi en Egypte

     

    Vous connaissez tous l’inoubliable phrase du général de Gaulle au sujet des pays arabo-musulmans : vers l’Orient compliqué, je voguai avec des idées simples.

    Cette phrase s’impose à notre esprit quand on démêle l’écheveau égyptien qui vient de connaître son aboutissement.

    J’ai observé jour après jour, sur les télévisions arabes les développements en Egypte. Je ne croyais pas, au début, que les généraux sauraient éviter la confrontation avec leurs adversaires d’hier. Je ne pensais qu’ils auraient surmonter leurs habitudes et ne pas tripatouiller les urnes. En une phrase, je pensais qu’ils n’auraient en vue que leurs intérêts à très court terme et qu’ils propulseraient au poste suprême l’un des leurs, l’ancien Premier Ministre du Pr Hosni Moubarak, le général Chafiq. Eh bien, il n’en fut rien. Les généraux égyptiens avec à leur tête le maréchal Tantaoui m’ont agréablement étonné.

     

    Ils ont fait preuve d’intelligence politique et ont parfaitement illustré le concept hégélien dit de la patience du concept : on analyse une situation donnée à partir d’éléments dont on dispose, on conclut de ce qui existe à ce qui va se produire, et quand on est sûr que l’avenir va nous donner raison, on ne fait pas d’obstruction, pas de violence, on attend simplement. Or, telle n’est pas, en général, l’attitude des militaires…

     

    Les généraux ont d’abord commencé par faire travailler les juristes de la cour constitutionnelle, lesquels se sont empressés d’annuler les élections législatives pour un simple vice de forme. M. Moursi était pris au piège : pouvait-il désavouer une cour suprême de justice alors qu’il briguait les suffrages de ses concitoyens et que ce serait cette même cour qui proclamerait les résultats ? La mort dans l’âme, il dut s’abstenir, se déclarant confiant en la sagesse de la dite cour…

     

    Ensuite, les généraux se sont octroyés à eux mêmes de larges pouvoir, protégeant leurs privilèges et leurs prérogatives. Une fois que ces réformes furent adoptées (en dépit de certains recours et d’une remise en cause partielle) ils ont accepté la victoire de leur adversaire d’hier.

     

    J’ai bien écouté les discours de M. Moursi le soir de son élection et les jours suivants, y compris los de son investiture. On voit bien que les généraux lui ont fait une pressante explication de texte. Il a dû donner des gages et a insisté sur sa volonté de donner à son pays un régime civil (comprenez : non religieux) et qu’il adressait au monde un message de paix. Il est vrai qu’il n’a pas dit au monde entier, mais dans le reste du discours, il spécifiait que son pays respecterait et honorerait les accords internationaux. En fait, ce sont ses lieutenants qui ont pris soin de parler des Palestiniens et de leur situation.

     

    Quel est l’agenda secret des généraux, étant entendu que c’est bien la première fois depuis plus de 60 ans qu’un civil (et quel civil !) occupe le pouvoir ? Les amitiés politiques, les conceptions d’avenir du pays ne sont pas partagées par ces deux sources du pouvoir, l’une émanant de l’armée, rempart du régime, l’autre issue des Frères musulmans dont l’objectif demeure l’érection d’une société religieuse axée sur la nation islamique.

     

    Dès lors, le pari des maîtres de l’armée apparaît aussi clairement que possible : le président Moursi, bien que formé dans une université américaine, n’a aucune expérience gouvernementale et ne va pas tarder à réaliser que c’est bien difficile de contenter une nation arabe de 90 millions d’âmes… Il ne réussira jamais à redynamiser une économie endolorie par une révolution incessante ; il ne réussira pas à endiguer un chômage endémique, ce qui est la clé de voûte du problème actuel : comment intégrer au marché du travail tant de jeunes désœuvrés ?

     

    A moins que tout ne trompe, ce nouvel élu ne tiendra pas plus de deux ans. Il aura été, comme on dit en allemand, entzaubert (perdu son attractivité). Une sorte de président intérimaire, de transition…

     

    Et l’armée reprendra la main qu’elle n’aura, de toute manière, jamais abandonnée…

  • A Genève durant la canicule…

    A Genève durant la canicule…

     

    Rentré à Paris hier soir après plusieurs jours passés à Genève, je n’ai pu écrire mes blogs. Je vais me rattraper. J’ai été invité par notre sympathique ami et excellent journaliste M. Olivier DELHOUME qui a magnifiquement animé une soirée Jean-Jacques Rousseau où sont apparus toutes les personnalités genevoises les plus en vue, mais des personnalités françaises telles que M. Luc FERRY qui a conquis son auditoire comme d’habitude.

     

    Je me suis rendu compte que je me trouvais rarement à Genève au cours des derniers jours de juin et que je n’avais encore jamais vécu une telle canicule. Je n’étais le seul. A l’ hôtel mais aussi dans les restaurants et dans les rues, les visiteurs du Proche Orient, reconnaissables aux nombreuses femmes voilées les accompagnant, se plaignaient d’avoir fui la chaleur étouffante de leurs pays d’origine pour en retrouver une autre tout aussi incommodante que la leur.

     

    En revanche, peu de genevois dans les rues et les restaurant, tous ou presque étaient montés dans leurs chalets en montagne pour fuir la canicule.

     

    Cela m’a rappelé les chaleurs d’Eilat et de Tel Aviv au cœur de l’été. Sinon, j’ai vu sur la place, face au lac, des Syriens venus manifester contre le régime de leur président actuel qui massacre allégrement son peuple. Je doute que Kofi Anan puisse ranimer sa mission mort-née, et déjà l’opinion syrienne récuse une telle résolution qui fut adoptée a minima par les participants. Comment imaginer que des opposants puissent parler ou négocier avec le boucher de leur peuple ? Je crois que M. Kofi Anan devrait se mettre à la rédaction de ses Mémoires qui seront fort intéressantes.

     

    Il faut en Syrie un nouveau régime qui fasse table rase du passé.

     

  • La France et l’Allemagne

    La France et l’Allemagne

     

    On a l’impression que les positions se figent entre les deux pays. Un récent article de l’économiste Daniel Cohen, paru dans le journal Le Monde, résumait avec beaucoup de justesse l’incompréhension franco-allemande, le contraire même de la deutsch-französische Verständigung.

     

    La chancelière fédérale ne veut plus entendre parler de ces Euro-bonds, de sinistre mémoire pour elle. La mutualisation des dettes lui fait horreur et le gouvernement français a probablement commis une erreur (en raison de sa jeunesse et de son inexpérience économique) en axant son propos autour de cette mesure. Aux yeux des Allemands, cela a réactivé l’image assez défavorable que l’on se fait des Gaulois de l’autre côté du Rhin.

     

    Il faut savoir présenter la notion de croissance d’une façon plus orthodoxe. Or, les Allemands ont peu goûté (pour parler en termes diplomatiques) les toutes premières mesures du gouvernement français en faveur de la retraite à 60 ans, le smic, etc… Aux yeux de nos voisins, on ne peut revenir à l’équilibre en creusant les déficits.

     

    Il y aura donc beaucoup de travail à faire pour rapprocher les points de vue. Cependant, on ne peut pas dire que le nouveau pouvoir n’adapte pas son discours. Il prépare progressivement le pays à de nouvelles mesures fiscales dont la charge serait équitablement répartie entre les différentes classes sociales. Au fond, c’est bien pour cela qu’il a été élu.

     

    Ce qui est frappant entre les Français et les Allemands, c’est à la fois cette nécessaire proximité et cette incontournable différence. Je me souviens de mes années passées à l’Université de Heidelberg en qualité C4 Professor : toute la journée, j’étais heureux de travailler en Allemagne, de profiter des bibliothèques, de ce sérieux germanique séculaire, mais le soir j’étais étreint par une irrépressible nostalgie ; nostalgie de la douceur de vie parisienne, de ce laisser-aller, de cette indolence des Français… Qui fait la joie de vivre. En d’autres termes, on ne vit pas que pour travailler.

     

    Mais ne dit-on pas que les couples qui tiennent le plus sont basés sur des attirances ou des répulsions surmontées ?