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Vu de la place Victor-Hugo - Page 398

  • L’abominable attentat d’Ankara

     

    L’abominable attentat d’Ankara

    Que ce soit Daesh ou le PKK qui se trouvent derrière l’attentat d’Ankara, le monde civilisé ne pourra que le condamner sans réserve aucune. Cela montre que tous doivent unir leurs efforts pour combattre le terrorisme devenu un fléau mondial. J’écoutais hier un reportage sur la ville de Raqqa, pseudo capitale de Daesh, où il était dit que l’Etat islamique avait fait tuer ses opposants même très loin de ses frontières. C’est dire que les tentacules s’étendent partout dans le monde. On l’a vu avec les attentats de Paris et la chasse à l’homme en Belgique.

    Pourquoi cet attentat à Ankara, mais aussi à Stockholm ? Il faut bien reconnaître que la Turquie se trouve dans une situation délicate et que ses atermoiements dans la crise syrienne n’ont pas facilité les choses.

    Résumons les faits : dès le début de la crise syrienne, la Turquie a tenté de jouer les médiateurs, ce qui était éminemment louable. Et puis il y eut la répression aveugle de Bachar qui a conduit à la rupture des relations et a incité la Turquie à aider, en fermant les yeux, les soldats de Daesh, admis à recevoir à travers la frontière turque, renforts en hommes et armes, munitions, etc…

    Au fond, les fronts n’étaient pas très nets et surtout la coalition d’une part, les Turcs, d’autre part, ne poursuivaient pas les mêmes objectifs. Pour les Turcs, qui se décidèrent enfin à entrer dans le conflit, l’ennemi principal et obsessionnel, c’est le PKK, ce n’est pas Daesh qui n’était qu’une variable d’ajustement, si je puis dire.

    Mais il faut reconnaître à la Turquie un mérite incontestable, même s’il n’a jamais cessé d’être ambigu : accueillir sur son sol plus de deux millions de réfugiés syriens, tout en s’en servant pour arracher des concessions et de l’argent à l’Union Européenne ! Or, chacun sait que la Turquie ne fera jamais partie de l’Europe, ce serait une terrible modification des équilibres ethniques, sociaux et religieux… Enfin, pour les trois milliards promis et non encore versés, certains Etats de l’UE rechignent et ne veulent pas donner leur accord, arguant des ambiguïtés savamment distillées par le gouvernement turc, héritier de la diplomatie ottomane

    Les attentats qu’il faut condamner avec la dernière énergie et sans la moindre réserve s’expliquent par les revirements de la politique turque dans la conflit syrien : vos alliés d’hier, même secrets, ne resteront pas inertes si vous vous retournez soudain contre eux. Et même les puissances occidentales somment l’armée turque de cesser ses bombardements contre les Kurdes du nord de la Syrie. Ankara ne veut rien entendre et voit d’un très mauvais œil le rapprochement entre ces mêmes puissances occidentales et les Kurdes. Ankara redoute d’être le dindon de la farce et on la comprend. Mais d’un autre côté, elle a toujours refusé de régler le problème kurde qui finira bien par aboutir à la création d’un Etat, mordant sur l’Iran, l’Irak, la Syrie, la Turquie…

    C’est donc la question kurde qui détermine l’action ou l’inaction de la Turquie. Il faut assouplir les positions, et cela est impossible avec l’actuel sultan.

    En conclusion, la crise syrienne a des métastases qui n’en finissent pas de nous inquiéter car elles touchent le monde entier.

    Il existe cependant un responsable, c’est Barack Obama qui n’a pas voulu intervenir dès le début et a préféré laisser pourrir la situation. C’est un stratégie erronée car Daesh s’est fondu dans la population, rendant quasi impossible la reconquête d’une ville comme Mossoul, forte de deux millions d’habitants…

    La suite, nul ne peut la prédire.

  • Nicolas Sarkozy mis en examen

    Nicolas Sarkozy mis en examen

    La presse, une fois de plus, n’a pas rapporté la chose dans son intégralité. Certes, l’ancien chef de l’Etat voit la justice se pencher sur son cas, ce qui n’est jamais totalement anodin, en dépit de la présomption d’innocence, mais il échappe à l’affaire bigmalyon qui était d’une tout autre gravité. Rendez vous compte : s’il avait été inquiété même sur ce sujet, c’était la fin. Or, toute la presse ne retient qu’une chose, la mise en examen, ce qui déclenche toutes les suppositions : va t il rester à son poste ? Va-t-il renoncer aux primaires ? Est ce la fin de sa carrière politique ? etc…

    Toutes spéculations qui permettent aux journalistes de vendre du papier ou de maintenir en haleine un public sursaturé de telles nouvelles. Et par delà ces apparences, il y a un autre problème, souvent évoqué dans ces mêmes colonnes, les relations entre la politique et la justice.

    Ces rapports ne sont pas toujours sereins mais je ne conteste nullement à la justice le droit de faire respecter la loi, laquelle est votée par les élus, donc les hommes et les femmes politiques. Non point, ce qui pose problème, c’est l’instrumentalisation de la justice ou la volonté de certains de se venger d’hommes politiques qui ne sont pas de leur bord et qu’ils font passer sous leurs fourches caudines. D’ailleurs, le cas s’était produit avec l’ancien chef de l’Etat qui fut, par la suite, innocenté.

    Il semble, cependant, en ce cas d’espèce, que les charges (je ne dis pas l’accusation) soient assez lourdes. Au fond, si Nicolas Sarkozy a un problème avec la justice, nous lui souhaitons de le régler au mieux.

    Mais nous avons un vrai problème avec les contacts judiciaires et politiques : comment faire pour qu’aucun juge ne s’acharne sur un dirigeant politique qui n’est pas de son bord ou tout simplement qu’il n’aime pas ? Peut-on changer les hommes ou les femmes qui disposent d’un immense pouvoir, voire celui de nous priver de notre liberté, peut on attendre d’eux ou d’elles qu’ils dominent leurs passions et rendent la justice sereinement ?

    Je sais que nos magistrats dont l’écrasante majorité fait très bien son travail, n’aiment pas du tout qu’on parle de leur aspect humain et donc faillible. Et pourtant, il le faut. Aurions nous la cruauté de dresser la liste de très graves erreurs judiciaires ? Songez qu’auparavant, on ne pouvait même pas contester en appel les décisions des assises !

    Il y a de nombreuses années, Jean-François Burgelin avait fait une communication devant l’Académie des Sciences Morales et Politiques dont le texte abrégé fut publié par le journal Le Monde. Et dans cet article, il insistait sur la différence entre le juge et le justicier, tout en déplorant que certains faisaient une confusion entre ces deux fonctions. Il ajoutait même qu’il lui était parfois arrivé d’être intimement convaincu de la culpabilité d’un justiciable, mais que faute de preuve, il s’est toujours résigné à acquitter la personne comparaissant devant lui. L’intime conviction n’est pas une preuve.

    Il faudrait que les juges reçoivent des cours de philosophie du droit de Hegel et de quelques autres, notamment de Kanr qui évoque les racines métaphysiques du droit, à distinguer nettement de la justice. Ainsi les juges comprendraient mieux ce qu’on attend d’eux, tout en reconnaissant que leur profession est très difficile.

    Mais, que cette lacune soit un jour comblée ou non, ces Messieurs et ces Dames doivent se souvenir qu’ils rendent la justice au nom du peuple français.

    D’un autre côté, nous devons faire pression sur le gouvernement, quel qu’il soit, pour que la justice soit dotée des moyens matériels lui permettant de fonctionner normalement.

    Et donc d’éviter les erreurs judiciaires.

  • La Syrie, la Turquie et la Russie : la guerre dans la guerre…

    La Syrie, la Turquie et la Russie : la guerre dans la guerre…

    On parle parfois d’une loi dans la loi, d’un miracle dans un autre miracle, dans le cas qui nous occupe on peut hélas parler d’une guerre dans la guerre.

    En raison de la survenue dans le conflit syrien d’un nouveau belligérant, la Turquie, qui , depuis le début du conflit, n’a jamais perdu de vue ses propres intérêts. On se souvient de Kobané, il fallut toute la force de persuasion des USA et de l’UE pour que les Turcs cessent enfin de fermer les yeux sur les mouvements de Daesh, permettant ainsi aux Kurdes syriens de libérer la ville. Mais depuis près de trois jours, l’armée turque bombarde les Kurdes depuis son propre territoire ; or ces kurdes là se trouvent du même côté que Bachar et la Russie : ils avancent dans le nord de la Syrie, aidant à reconquérir des localités qui vont leur permettre de faire la jonction avec d’autres territoires du Kurdistan, ce qui nourrit le phantasme d’un ensemble autonome kurde bénéficiant de la continuité territoriale. Pour Ankara, c’est un cauchemar, c’est le souvenir de la guerre civile, c’est la phobie du démembrement. Les USA et l’UE peuvent pleurer du matin au soir, les Turcs ne relâcheront pas leur pression, ce qui risque de les mettre au contact des troupes et de l’aviation russes, provoquant une confrontation armée entre les deux pays. On en est déjà largement aux invectives, les Turcs accusant les Russes d’agir comme des terroristes lesquels leur rendent la monnaie de leur pièce avec autant de délicatesse.

    Le conflit syrien va changer de nature et de configuration, ce qui a hélas échappé à l’OTAN et aux USA ; ne parlons pas de l’UE qui n’existe que sur le papier et ne dispose d’aucune force armée crédible.

    Changement sur le terrain : on se rend compte que les Russes ont jeté toutes leurs forces dans la mêlée, en quelques mois ils ont rétabli la situation sur le terrain en faveur de Bachar qui n’hésite plus à dire qu’il entend reconquérir toute la Syrie, cela prendra le temps que cela prendra. Il faut bien reconnaître que Poutine a bien synchronisé l’activité de son armée avec celle de sa diplomatie : un vrai disciple de von Clausevitz ! Mais il tire surtout profit de l’incapacité proverbiale d’un Obama, véritable ombre de lui-même…

    Mais ce qui est pire, c’est qu’après les Turcs les Saoudiens entrent dans la danse avec pour objectif majeur, non pas d’exterminer Daesh comme ils le prétendent, mais la volonté de réduire l’influence iranienne en Syrie Et si les choses devaient se préciser, on assisterait alors à un guerre régionale de grande envergure. Il est évident que le Moyen Orient tout entier en sortirait profondément transformé. Tous ces pays aux frontières arbitraires et imposées par les anciennes puissances coloniales vont chercher à se renforcer, ce qui va les mettre en conflit avec d’autres intérêts, notamment ceux des pays voisins. Et la question kurde va ressurgir avec violence : qui arrêtera les Kurdes victorieux sur lesquels les USA s’appuient et qui se sont révélés être les alliés les plus forts et les fiables du Pentagone sur le champ de bataille ?

    Les Turcs ont compris qu’ils risquaient d’hériter d’un sérieux problème généré par la crise syrienne… Mais voilà ils font partie de l’OTAN et s’ils ont une confrontation armée avec les Russes, on risque de devoir se porter à leur secours.

    Peut-on dans les prochaines décennies empêcher ou simplement retarder l’avènement d’un Kurdistan indépendant et démocratique ? C’est peu probable, les Turcs devront soit accorder une plus large autonomie, soit faire avec.

    Je ne pense pas que l’actuel président soit l’homme de la situation. Surtout s’il lance sa division blindée contre la Syrie…