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Vu de la place Victor-Hugo - Page 405

  • Le Juif et sa solitude

    Le Juif et sa solitude

    En prenant connaissance avec une certaine désolation de cette mini-controverse autour de la kippa, controverse où les responsables communautaires ont fait preuve d’une indigence intellectuelle inouïe et d’un manque totale de savoir-faire, un verset du Deutéronome, le cinquième livre du Pentateuque attribué à Moïse. Me revient à l’esprit. Parlant du peuple d’Israël, ce texte énonce ceci : c’est un peuple qui habitera en solitaire et il ne sera pas dénombré parmi les nations…

    Depuis l’époque où cette phrase à été couchée sur le parchemin, c’est-à-dire vers 622 avant notre ère, à l’occasion du règne du roi Josias (640-609), le sort du peuple d’Israël n’a pas varié, il est resté le même : il est condamné à la solitude, à l’élection, non pas pour vivre à l’aise et jouir du bienêtre mais pour subir une sorte d’élection-sanction, une élection-punition, puisque depuis cette époque les Juifs n’ont pas cessé d’être persécutés.

    Même cette belle allégorie de l’échelle de Jacob (Genèse 28 ; 11-19), ce rêve visionnaire devenu le patrimoine de l’humanité civilisée, fut interprété par les sources juives anciennes (Midrash, Talmud, etc…) comme étant une succession métaphorique d’exils et de défaites, depuis les Chaldéens de Nabuchodonosor jusqu’à l’’époque de la Rome antique… Et aujourd’hui, ce long cortège de souffrances et de brimades sanglantes s’enrichit des attentats islamistes qui visent des Juifs.

    Celles et ceux qui me font l’honneur de me lire presque chaque jour dans cette TDG savent que je verse jamais dans la victimisation. Mais aujourd’hui, il convient d’appeler les choses par leur nom. Les autorités françaises, soucieuses de ménager une part croissante de l’électorat, tentaient jusqu’ici de préserver les équilibres sans prendre trop de risque. Cette allusion est transparente.

    Certes, il y eut ce beau discours, très sincère, très éthique de Manuel Valls ce samedi soir dernier, et auquel j’ai d’ailleurs rendu hommage doublement : dans la TDG et dans JForum. Mais cette joie fut de courte durée puisque, dès le lendemain, on vit le chef de l’Etat se rendre à une invitation à boire un verre (et non une tasse) de thé… Un certain nombre de gens, se sentant concernés, ont marqué leur désappointement, reprenant l’antienne de la versatilité des hommes politiques, obnubilés par leur intérêt personnel avant toute chose.

    Ce que je retiens ici, en ce qui me concerne personnellement et malgré ma distance philosophique vis-à-vis d’une actualité brûlante, c’est un sentiment de grande solitude. En quelques jours, le destin sembla basculer. Valls a raison de dire que la France ne serait plus la France sans ses Juifs ; et je pense que ses lointaines origines espagnoles n’expliquent pas tout. C’est un homme qui a compris la détresse de plus en plus profonde de ces hommes, de ces femmes et même de ces enfants, qui vont bientôt devoir vivre comme des marranes du temps de l’Inquisition, rasant les murs pour se rendre chez eux, dans leurs lieux de prière ou les écoles de leurs enfants. Et tout cela en 2016 dans notre beau pays, la France !

    Des rumeurs persistantes font état d’un mécontentement croissant des grandes organisations juives américaines, inquiètes de ce climat délétère et surtout choquées par une certaine impéritie : et un appel téléphonique du président US à ce sujet, adressé au chef de l’Etat, n’est plus à exclure. Les Américains ont été choqués, eux qui n’avaient pas prévu l’attaque du 11 septembre, que les Français n’aient pu neutraliser Abahoud que grâce à une indication fournie par les Marocains !!

    Les islamistes ne parviendront pas à tout enflammer, ni à tout dértruire ; certes, ils organisent et réussissent à perpétrer des attentats un peu partout dans le monde, mais les coups qui leurs sont portés chaque jour dans leurs fiefs en Syrie et en Irak, accomplissent leur effet.

    Toutefois, ils vont remporter une victoire importante, quoique posthume : les Juifs d’Europe, et surtout de notre pays qui abrite la plus forte concentration du continent (un peu plus qu’un demi-million), se sentent seuls, les vieux réflexes réapparaissent, la longue, l’interminable complainte vibre de nouveau à leurs oreilles, ils se demandent si la France ne va pas devenir une étape supplémentaire sur la route d’un exil vieux de deux millénaires et qui n’est pas près de toucher à sa fin.

    Si l’on veut que cela change, il faut agir vite et ne pas se montrer conciliant envers ceux qui abusent des traditions d’hospitalité et de tolérance de cette grande nation qu’est la France.

  • Faiblesses et ambiguïtés de la Turquie

    Faiblesses et ambiguïtés de la Turquie

    Avant toute chose, il convient de présenter des condoléances à la Turquie pour ce terrible attentat et assurer l’Allemagne de notre compassion puisque les victimes sont pratiquement toutes de nationalité allemande. Mais cela posé, un certain nombre de questions demeurent : pourquoi donc la Turquie a t elle mis tant de temps à combattre Daesh ? Pourquoi ne rend elle pas hermétiques ses frontières avec la Syrie et l’Irak ? Enfin, pourquoi est elle obsédée par la question kurde au point de se voir dicter un large pan de sa politique étrangère ?

    On se souvient du cas de Kobané, maintes fois évoqué ici même/ Les Turcs se refusaient à intervenir, ils ne laissaient pas passer les Kurdes de Turquie porter secours à leurs frères menacés d’extermination par Daesh. La Turquie avait déployé des chars d’assaut à la frontière mais restait l’arme au pied. Et lorsque Ankara a rejoint en apparence la coalition occidentale, ses chasseurs bombardiers visaient surtout le PKK ou d’autres mouvements de résistance kurde. Pendant un temps assez prolongé, la Turquie a laissé entrer et sortir de son territoire des convois militaires de Daesh, elle a laissé les nouvelles recrues franchir sa frontière, elle a permis que les blessés de Daesh soient soignés dans ses hôpitaux ; et selon la presse et les services russes, la Turquie verrait d’un assez bon œil le trafic du pétrole de Daesh, permettant aux terroristes de bénéficier du nerf de la guerre, l’argent des hydrocarbures.

    La Turquie a ensuite habilement manœuvré pour faire pression sur l’Europe, exigeant 3 milliards d’Euros afin de fixer chez elle les deux millions de réfugiés (vrais ou faux), lesquels pourraient submerger l’Europe si Ankara ouvrait les vannes… Et ce n’est pas tout : Ankara a obtenu que soient réactivées les négociations avec l’Europe pour une adhésion… Tout en sachant des deux côtés, que la Turquie ne sera jamais admise en Europe, d’autant que les événements actuels prouvent chaque jour, l’inanité d’une telle démarche ou d’un tel projet.

    Mais voilà, malgré tout cela, l’effondrement de cette Turquie menacerait gravement les intérêts européens. L’armée turque, même pléthorique et mal équipée, incapable de faire taire le soulèvement kurde, reste une pièce essentielle dans le dispositif de l’OTAN. Si l’Etat turc entrait en déliquescence, car cet état n’est fort qu’en apparence, ce serait la fin. Le problème est qu’un autre danger plane avec plus d’insistance sur ce pays, c’est la question kurde. Ankara n’a jamais voulu prendre au sérieux les revendications kurdes d’autonomie interne, les considérant comme une menace contre son intégrité territoraile. On peut comprendre cette attitude, mais il y a d’autres points de vies qui se laissent défendre tout aussi bien.

    L’identité turque pourrait s’enrichir d’un élément kurde, ce serait un apport et non une perte. Les Kurdes constituent une part non négligeable de la population et certaines villes ou régions turques sont majoritairement habitées par des Kurdes… Or, ces lieux sont pratiquement assiégés par l’armée d’Ankara.

    Enfin, il y a la méfiance turque face au rapprochement entre les mouvements kurdes et l’US Army. Ankara, comme je le rappelais plus haut, est très inquiète à ce sujet. Et cette continuité territoriale à sa frontière (contrôlée à 80% par ces mêmes Kurdes) constitue pour elle une préoccupation majeure…

    Pourquoi avoir fait tout ce rappel, tout ce tour d’horizon ? Parce qu’ils expliquent, sans jamais justifier ni surtout excuser cet attentat horrible et absolument condamnable.

    La Turquie se trouve dans une situation hautement délicate. La guerre est à ses portes. A l’intérieur, elle combat le terrorisme et aussi les mouvements autonomistes kurdes. Et voilà, à l’extérieur, que pour alléger la pression russe sur ses alliés en Syrie, elle a abattu (légalement ou illégalement) un chasseur bombardier russe… Cela commence à faire beaucoup.

    Ankara doit choisir son camp et éloigner d’elle toute ambiguïté. Et les fondements de cet état turc doivent être revus dans ce sens. Ce n’est pas M. Erdogan qui a commis trop d’erreurs, notamment vis-à-vis d’Israël qui était jadis un allié fidèle de son pays, qui pourra mener à bien cette vigoureuse réforme.

    La sagesse reviendra peut-être un jour dans ce Proche Orient qui défie toutes les lois de la logique.

  • Une primaire à gauche pour 2017 ?

    Une primaire à gauche pour 2017 ?

    Le journal Libération, journal solidement ancrée à gauche, avec à sa tête Laurent Joffrin, publie ce manifeste lequel n’a que peu de chance d’être traduit dans les faits. Pour une raison très simple : vu l’état de l’opinion et vu la popularité relative du chef de l’Etat, il n’est pas certain qu’il sorte victorieux de cette compétition électorale. Il y a même des chances pour que la base du PS ne vote pas pour lui.

    Il existe aussi un autre indice qui, pour le moment, n’entrouvre aucune fenêtre pour l’opposition de gauche à François Hollande : c’est l’absence de tout candidat de substitution. Martin Aubry n’ira pas, aucun des frondeurs n’ira, Montebourg n’a aucune chance et ne tentera l’expérience que s’il veut que son ami Hollande morde la poussière. Reste Jean-Luc Mélenchon qui n’a aucune chance mais qui pourrait régler ses comptes avec le chef de l’Etat en le faisant battre dès le premier tour : il est en mesure de lui retirer 3 ou 4% des suffrages, ce qui serait fatal à Hollande.

    Est ce que Cécile Duflot voudra y aller ? Ce n’est pas à exclure. Elle est jeune, a encore du chemin à faire, mais elle aussi a un compte à régler avec le président actuel. Résumons nous : le danger ne peut venir que de Duflot, Mélenchon ou Montebourg, du côté de la gauche…

    Et que se passe t il à droite ? Pour le moment, c’est Alain Juppé qui tient la corde, mais je ne pense pas que cela va durer, Sarkozy est un animal politique sans pareil, c’est un peu son côté jeune chiraquien : autant besoin du pouvoir que de l’air à respirer !

    Les autres candidats ne feront qu’un tour de piste, la question se réglera entre Juppé et Sarkozy . Mais lequel représente le plus grand danger pour Hollande ? Il est trop tôt pour le dire… Et il faut se méfier des sondages qui n’ont raison que parfois !