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Vu de la place Victor-Hugo - Page 807

  • Quand Alexandre Adler nous ouvre son cœur et nous livre sa vision de l’avenir…,

    Quand Alexandre Adler nous ouvre son cœur et nous livre sa vision de l’avenir…,

    Lorsque vous prendrez ce livre en main, si ce n’est pas déjà fait, vous ne le lâcherez plus, vous en lirez le contenu d’une seule traite et avec avidité. Dès l’ouverture qui fait officie de préface, vous vous sentirez puissamment entraîné par un Alexandre Adler qui mêle avec une éblouissante dextérité sujets d’actualité (crise iranienne, inquiétude israélienne) et exégèse traditionnelle de la Bible (talmud, midrash, Rashi)

    . Même pour les lecteurs qui connaissent un peu l’auteur, c’est une découverte.

    Tant d’années de militantisme d’extrême gauche ne sont pas venues à bout d’une âme juive qui a su préserver son identité et son essence. Il faut reconnaître, toutefois, qu’Alexandre Adler ne s’est jamais rendu coupable de la moindre bassesse qu’il aurait à se faire pardonner aujourd’hui. Toutefois, à le lire, on se rend bien compte qu’il revient de loin.

    Les premières pages sont une captivante présentation de la spiritualité juive, avec pour point central les deux moments kabbalistiques, celui de l’ancienne kabbale espagnole et enfin, celui du renouveau de Safed à partir du XVIe siècle. C’est un peu comme si Alexandre Adler jugeait cette expression intellectuelle plus légitime et plus authentique que la philosophie maïmonidienne dont l’auteur ne serait qu’une sorte de représentant juif de la pensée grecque…

    L’auteur se réapproprie deux mille d’histoire hébraïque et juive, remonte même à la monarchie davidique, voire plus haut encore, puisqu’il parle de la mort du roi Saül sur le mont Guilboé, évoque la destruction des deux temples de Jérusalem en -586 et en 70 par Titus, et laisse poindre son inquiétude à l’idée que les nouveaux maîtres de la perse moderne, les Mollahs, puissent perpétrer une nouvelle Shoah. Ces quelques pages sont traversées par une authentique émotion qui ne dégénère jamais en fébrilité.

    Ces quelques lignes écrites d’une plume ferme nous apprennent tout sur l’auteur : d’où il vient, ce qu’il cherche, les longs détours que la vie ou le hasard lui ont imposés, comment il a fini par se ressaisir et se retrouver tel qu’en lui-même, un fils d’Israël, de cette tradition juive trimillénaire qui a connu un renouveau sur la terre ancestrale après une si longue absence. Tout ceci, Alexandre le vit intensément et nous le fait partager

    Le lecteur ébahi voit défiler devant lui toute une galerie de grands hommes qui furent eux aussi égarés par les muses trompeuses des siècles, qui initièrent des révolutions sans vraiment connaître l’apaisement ni la sérénité : Marx, Einstein, Freud, Wittgenstein ( j’ai des réserves sur ce dernier nom), Arthur Schnitzler et tant d‘autres qui n’eurent pas l’heur de se présenter vraiment tels qu’ils furent en eux-mêmes.

    Il y a chez Alexandre quelque chose de jubilatoire dans cette redécouverte d’une tradition qui est sienne et dont il scrute les richesses avec une joie profonde, en se laissant guider par les maîtres qu’elle a produits au fil des siècles. L’auteur n’est pas attiré par une pratique juive bornée et mécanique, débouchant sur un ritualisme fossilisé ; ce qui l’intéresse, c’est un judaïsme jeune et dynamique, vivifiant, qui n’abdique pas devant les idéologies ni l’air du temps, un judaïsme digne de son histoire, porteur d’un projet d’avenir et animé d’une vision, comme au temps des prophètes.

    On lit ensuite une intéressante digression, sémillante d ‘intelligence, sur le féminin et le féminisme, notamment à travers les grandes figures bibliques, depuis Sarah jusqu’à la reine Esther dont le rouleau est examiné avec tant de soin par l’auteur : ce texte incorporé au canon biblique ne contient aucune référence explicite au Dieu d’Israël, ni à la terre d’Israël ni à la rédemption finale (gué’ulla) d’Israël. En fait, les spécialistes de la critique biblique rapprochent l’idéologie de ce texte de celle de l’histoire de Joseph en Egypte : le message est clair : on peut vivre heureux et en juif fidèle à la tradition ancestarle, même à l’extérieur des frontières de l’Etat juif. Esther y est devenue reine et Joseph vice-roi… Et les deux ont contracté une union maritale avec des conjoints… non-juifs !

    Dans ce même chapitre, l’auteur en vient à la place de l’étude dans la vie d’une famille juive traditionnelle. Le juif apprend la Tora chaque jour que Dieu fait, il la réinvente constamment comme l’incite à le faire cette phrase des sages du talmud : remue la, remue la dans tous les sens, tout y est , tout s’y trouve.

    Mais l’auteur n’oublie pas qu’l n’est pas seulement un normalien agrégé d’histoire, c’est aussi un chroniqueur inspiré dont les papiers sont attendus et lus dans els journaux ou écoutés sur les ondes. Je ne suis pas tout à fait d’accord avec la critique, modérée et intelligente qu’il fait du sionisme car je la trouve imprégnée d’une trop forte dose d’idéalisme, en revanche, j’ai lu avec ravissement les alliances, les connivences, voire les complicités qu’il suggère à Israël de nouer avec la Chine, l’Inde et même les pays arabo-musulmans. Sur ce dernier point, il me semble qu’il a parfaitement raison, Israël devrait devenir un modèle pour les Arabes, si ces derniers n’étaient pas aveuglés par une haine aussi tenace qu’injustifiée. Dans un récent discours de Nicolas Sarkozy, sa plume Henri Guaino a eu cette belle formule : Israël, ce miracle de la volonté et de la démocratie… Nul ne restera insensible à ce si bel hommage à la persévérance et l’ingéniosité pluriséculaires du peuple juif.

    Peu de gens ont relevé que le «printemps arabe» survint à un moment où la cause palestinienne ne bouche plus entièrement l’horizon des peuples islamiques, une cause derrière laquelle tous les tyrans, tous les potentats d’Orient et d’ailleurs, s’abritaient pour opprimer leurs peuples, leur refuser les libertés fondamentales et se maintenir ainsi indéfiniment au pouvoir.

    Ce livre est à maints égards une réévaluation originale et intelligente du destin d’Israël et de son avenir. L’auteur montre que le jeune Etat juif n’appartient pas vraiment à son environnement régional, plongé dans l’obscurantisme moyenâgeux. Si la raison reprenait le pouvoir, Israël serait un phrase pour tous ses voisins.

    Avec ce livre, qu’il faut absolument lire, Alexandre Adler a gagné son triple A

     

    Maurice-Ruben HAYOUN

     

    Alexnadre Adler, le peuple-monde. Destins d’Israël. Albin Michel, 2011

  • La campagne présidentielle en France : Sarkozy, Hollande, Mélenchon

    La campagne présidentielle en France : Sarkozy, Hollande, Mélenchon

     

    Que se passe-t-il au sein de la campagne présidentielle ? Un subtil jeu de billard à trois bandes est en cours et il pourrait bien profiter à Nicolas Sarkozy. Certes, les sondages ne sont pas vraiment fiables, même s’ils indiquent tout simplement une tendance.

    Cependant, ce qui est en train de se dérouler sous nos yeux montre qu’il faut toujours se méfier de ses propres amis, ou, à tout le moins, de ceux qui prétendent se situer dans le même camp.

    Jean-Luc Mélenchon a distancé Marine et François Bayrou. C’est donc le troisième homme qui monte. Donc, plus il monte et plus il prend des voix aux deux autres candidats. A qui en prend il le plus ? A Fr Hollande, évidemment. Donc, Mélenchon monte, Hollande baisse et Sarkozy au mieux monte lui aussi ou se stabilise. Partant, c’est Hollande qui perd.

    Comment s’expliquent alors les pronostics du second tour et ont-ils vraiment une pertinence ? J’en doute personnellement. Mais le problème posé est celui du report des voix. Pouvons nous être sûrs que la majorité des voix du front de gauche se reporteront vraiment sur le candidata socialiste ? De prime abord oui, mais quand on regarde la composition très hétéroclite de cet électorat, on constate qu’il est essentiellement protestataire et guère marqué idéologiquement. Je veux dire qu’il n’est pas discipliné au plan idéologique. Ce qui signifie que certains resteront sagement chez eux le jour du vote, d’autres se laisseront convaincre par Hollande et d’autres, enfin, par Sarkozy…

    Dans quelles proportions ? Bien malin qui le dira et c’est là tout le problème.

    Cependant, la vraie question est celle de l’abstention, près de 32%. Du jamais vu.

    Et pourquoi une telle attitude ? Parce que les Français savent enfin que la marge de manœuvre du futur élu sera en tout état de cause, très réduite.

    L’heure est à la prudence. Un vieux proverbe judéo-arabe que les Marocains citaient souvent, alors que j’étais un petit enfant, mêlait le bon sens à l’ironie : mieux vaut, disaient-ils, un âne qui connaît le chemin de la maison que celui qui ne le connaît pas.

    Nous ne comparons aucun candidat à un âne…

  • Richard Wagner, un antisémite, maître spirituel de Hitler ?

    Richard Wagner, un antisémite, maître spirituel de Hitler ?

    A propos du livre de Pierre-André TAGUIEFF, Wagner contre les juifs (Berg International, 2012)

     

    Définir aussi précisément que possible l’antisémitisme de Wagner, sans tomber dans l’anachronisme, ni céder à des raccourcis faciles, tel est l’objectif largement atteint de ce nouveau livre de notre éminent collègue Pierre-André Taguieff. Depuis le beau livre du grand historien israélo-hongrois Jacob Katz qui avait travaillé sur cette même question (Der Fall Wagner, Le cas Wagner), deux écoles s’affrontent sur cette question, à la fois épineuse et cruciale : existe-t-il une ligne historique directe ou indirecte entre la détestation des juifs par Wagner et l’antisémitisme exterminateur des Nazis ? En termes plus crus : Wagner a-t-il été d’une manière ou d’une autre une sorte de maître à penser d’Hitler, au point de l’influencer dans son génocide largement planifié du peuple juif ? De la réponse à cette question dépend l’honorabilité ou, au contraire, la déchéance morale du grand musicien. Sans même parler du discrédit qui rejaillirait alors immanquablement sur son œuvre. Il y a, comme vient de l’écrire deux tendances, grosso modo : l’une prétend que l’auteur de toute cette mythologie musicale germanique n’avait rien à voir avec l’hitlérisme et que sa judéo phobie, largement partagée par d’innombrables secteurs de la population allemande au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, faisait partie du Zeitgeist, tandis que l’autre entend établir un rapport incontestable de cause à effet entre les écrits théoriques de Wagner et l’antisémitisme racial et génocidaire des Nazis.

    Pierre–André Taguieff a subtilement évité cet écueil dès son titre puisqu’il parle d’un Wagner contre les juifs. Sans plus. Le reste, le lecteur attentif le découvrira s’il a, comme nous l’espérons, la patience de regarder les choses de près.

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