Les commémorations du 11 novembre
Dans une poignée d’années, cela fera un siècle que l’armistice aura été signé entre le Reich wilhelmien et les alliés dont la France et l’Angleterre. En France, ce jour fait l’objet d’un passage en revue des troupes sur les Champs Elysées, le chef de l’Etat ranime la flamme, s’incline devant la tombe du soldat inconnu et rend hommage à tous les morts pour la France.
Comme l’usure du temps est absolument imparable, il a fallu rénover le symbole de cette commémoration, pour la bonne raison que les survivants de cette guerre ne se comptent même plus sur les doigts d’une seule main. On a donc étendu cette cérémonie du souvenir aux soldats tombés en Afghanistan.
Le 11 novembre, jour férié depuis près d’un siècle, est très important non pas pour ranimer les rancœurs ni pour nourrir un esprit revanchard, mais pour inciter à la paix et à la fraternité. Quand on pense à toutes ces guerres entre la France et l’Allemagne, à ce inutile bain de sang qui dura des années et à ces destructions massives qui n’ont servi à rien, on se prend à rêver d’une autre manière de gérer les conflits.
Récemment, le comité du Prix Nobel a couronné l’Union Européenne, suscitant ici et là, des réflexions désabusées, voire franchement critiques. De telles réserves sont totalement injustes : l’Europe a pansé ses plaies, il n y a plus de conflits territoriaux sur notre continent, plus de guerres, plus de déportations ni de crimes comme on a en a connus lors de la seconde guerre mondiale : couronner l’Union Européenne, c’est couronner la paix.
Permettez moi d’achever cette brève rétrospective par une évocation de nature plus personnelle : quand j’étais jeune chercheur, boursier de la fondation Alexandre von Humboldt, je travaillais sur les manuscrits hébraïques de la Staatsbibliothek de Munich qui se trouve au beau milieu d’une très large avenue, la Leopoldstraße. Tout en haut trône un imposant monument nommé das Siegestor (l’arc, le portail de la victoire). Et chaque fois que je quittais la division des manuscrits pour aller manger ou rentrer à l’hôtel, je méditais l’inscription sur le frontispice de ce monument :
Dem Sieg geweiht, zum Frieden mahnend : dédié à la victoire mais exhortant à la paix.
C’est aussi cela 11 novembre.
Maurice-Ruben HAYOUN
In Tribune de Genève du 11 nov. 2012