Le 900. anniversaire de la mort du théologien musulman Al-Ghazali
En cette année 2011 nous commémorons le neuf centième anniversaire de la mort du grand théologien mystique musulman Abuhamid al-Ghazzali qui se distingua par ses profondes spéculations religieuses et ses attaques contre la philosophie gréco-musulmane de son temps. Il attaqua sévèrement le legs intellectuel d’Aristote chez les falasifa. Il se gaussa aussi des allégoristes qui vidaient le Coran de sa substance et les traita de borgnes car, disait-il, ils ne voyaient que d’un œil. Il rédigea à ce propos une réfutation en règle contre ces penseurs qui déparaient, selon lui, le message islamique originel. Le titre arabe de ce traité est Kitab al-rad fi-fadayih al-batiniyya) Réfutation des scandales des allégoristes.
Cet homme vit ses écrits traduits et commentés en hébreu, notamment par le grand philosophe averroïste juif Moïse de Narbonne (1300-1362). Il a aussi joui d’une certaine postérité en milieu chrétien médiéval où on le nommait al-Gazel.
En cette année 2011 il convient de rendre hommage à un homme qui, certes, avait la dent dure contre les juifs et les chrétiens, mais dont l’œuvre atteste d’un profond amour de la vérité. La sienne. Il était donc juste que le spécialiste que je suis lui rende hommage.
Au sein de la philosophie uive, le penseur qui lui ressemble le plus n’est autre que Juda ha-Lévi qui fut, à sa manière un adversaire très lettré et très érudit e la philosophie néo-aristotélicienne de son temps.
Pour ceux qui veulent aller plus loin, je vous renvoie à La philosophie juive (Collection U, Armand Colin, 2004) ; Geschichte der jüdischen Philosophie (WGG, Darmstadt, 2005) ; Petite histoire de la philosophie juive (Ellipses, 2008) ; La philosophie et la théologie de Moïse de Narbonne (Tubingen, JCB Mohr, 1989) ; L’exégèse philosophique dans le judaïsme médiéval (Tubingen, JCB Mohr, 1991)
ABUHAMID AL-GHAZALI (1058-1111)
Al-Ghazali perdit son père à un assez jeune âge. Avant sa mort, celui-ci avait confié la garde ses deux fils à un ami soufi, d’où l’orientation future d’Abuhamid qui fut placé dans un pensionnat où il put, en compagnie de son frère, poursuivre de solides études en matières traditionnelles. Auteur fécond, il rédigea une autobiographie intitulée Al-munqid min al-Dalal[1] (littéralement : ce qui nous préserve de l’erreur). Ainsi que nous le verrons infra, toute l’action de cet homme consistait à parvenir à la certitude, à bannir le doute et avoir de Dieu la plus grande science possible qui fût…