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Vu de la place Victor-Hugo - Page 713

  • DSK, encore et encore

    Dominique Strauss-Kahn, encore et encore

     

    Hier soir, le tribunal des référés devant lequel DSK  a assigné une journaliste-écrivain et son éditeur parisien, a partiellement donné cause de cause au plaignant qui considérait qu’on l’avait sciemment abusé à des fins mercantiles. En réalité, la décision du tribunal est loin d’être aussi nettement en faveur du plaignant.

     

    Le non juriste que je suis n’entend pas disséquer cette décision mais il saute aux  yeux de tout observateur intelligent que la maison d’édition en question avait dû intégrer cette amende dans ses coûts et fera sûrement une bonne affaire : les gens étant ce qu’ils sont, ils enjamberont aisément la petite mise en grade exigée par le tribunal et se précipiteront avec avidité sur le texte en soi. Et c’est là que les choses sérieuses commencent.

     

    D’après ce qui est dit de ce livre, son auteur aurait (je dis bien aurait) tendu un piège sexuel à DSK connaissant son goût immodéré pour autant d’aventures sexuelles que possible. Et elle aurait d ès l’origine conçu le projet d’en rendre compte publiquement dans un livre. Telle est la thèse de DSK et de ses avocats.

     

    Je ne me prononce pas sur le fond, on est jugé par ses propres actes. Mais voilà le coup de la femme journaliste séductrice est très attesté de nos jours, y compris en France où maints hommes politique de tout premier plan y ont succombé, tirant d’une obscurité qu’elle n’auraient jamais pu quitter autrement des femmes qui ont su utiliser des armes dont elles disposent…

     

    Mais il y a aussi le rôle joué par ceux qui publient, je dis bien ceux au pluriel.

     

    Le constat qui s’impose est le suivant : sur toute la ligne il y a un déficit d’éthique. A ce propos, je voudrais rapporter un extrait d’un texte de Martin Buber (1878-1965) parlant de l’essence de la politique dans sa relation avec l’éthique texte publié dans le premier quart du XXe siècle :

    L’Occident moderne repose sur une dualité éprouvée séparant la politique de la religion. Il suffit d’entendre les politiques prononcer le mot éthique et les théologiens le mot action pour s’en convaincre… La politique a oublié d’être éclairée mais elle demeure puissante… La religion nous renvoie tous ces pâles reflets du sacré mais elle ne dispose d’aucun moyen d’imposer ses vues. Selon moi, on ne devrait pas rechercher ni éviter la politique. En principe, on ne devrait être ni politique ni apolitique. La vie politique fait partie de la vie. Avec ses lois et ses formes actuelles, elle subit la même déformation que notre civilisation en général. De nos jours, on qualifie cette déformation de politique et la déformation de notre vie professionnelle de technique. Pourtant, aucune de ces deux déformations n’est innée. La vie politique et la vie professionnelle sont amendables

     

    Et c’est aussi ainsi que le livre est devenu la marchandise la plus misérable qui soit

     

    Maurice-Ruben HAYOUN

    In

    Tribune de Genève du 27 février 2013

  • Boko haram ou la guerre des religions

    Boko haram ou la guerre des cultures et des religions

     

    Par-delà ces enlèvements, voire tous ces affreux massacres de chrétiens en oraison dans leurs églises nigérianes, on discerne de plus en plus nettement un rejet violent, voire sanglant de l’Occident et de tout ce qu’il représente, à savoir le christianisme avec sa doctrine trinitaire et sa culture, sa civilisation, toutes choses considérées  comme hautement condamnables, voire impures.

     

    A ma connaissance, c’est la première fois depuis bien des siècles qu’un groupe terroriste rejette ainsi en bloc toute civilisation non islamique, ses valeurs et sa religion, le judéo-christianisme. Il me revient à l’esprit une étude du grand islamologue et turcologue américano-britannique Bernard Lewis où l’on pouvait lire que les Ottomans, traumatisés par leur défaite militaire face à l’Occident chrétien se demandèrent où pouvait bien résider la supériorité de leur ennemi d’une part, et les raisons de leur propre défaite, d’autre part. Ils conclurent rapidement que les armées chrétiennes étaient mieux organisées, mieux entraînées et mieux équipées. La question se posa alors de savoir si la loi islamique permettait à de bons musulmans d’imiter les «infidèles»… Rendes vous compte !!

     

    Dans un autre ouvrage paru aux éditions Fayard, le même spécialiste s’ interrogeait sur les raisons de ce déclin, de cette véritable décadence : what went wrong ? Que s’est-il passé ? On a presque envie de dire … Mais qu’ est-ce qui s’est mal passé ?

     

    Et on se retrouve toujours à la case départ, le rejet de l’Occident et la volonté d’en revenir à un avenir situé dans le passé, à un état antérieur où tout allait bien mieux, une sorte d’adaptation islamique du mythe du paradis perdu, du Paradise lost de Milton… C’est d’ailleurs le sens premier de Salaf, le fondement, la base.  Et les salafistes sont justement les partisans d’un tel retour en arrière.

     

    Voici une citation tirée d’un ouvrage du grand Karl Mannheim que ces gens ne liront jamais, mais tout de même :  Parmi les penseurs utopistes, il existe un groupe qui se réfugie dans le passé et tente d’y trouver une époque ou une société au sein de laquelle une certaine manière de transcender le réel dominait le monde. Et à travers cette reconstruction romantique, ils tentent de spiritualiser le présent… (Ideology and utopia, New York, p 259.

     

    L’ancien ministre de l’intérieur français, Jean-Pierre Chevènement, disait à ses interlocuteurs musulmans que l’on pouvait revenir aux fondements les plus reculés, les plus anciens, sans devenir  nécessairement des fondamentalistes… C’est-à-dire que la quête légitime du passé n’obère pas la conquête pacifique d’un avenir encore plus radieux.

     

    Nous sommes bien loin d’une telle évolution. Mais je le répète, c’est la première fois depuis des siècles qu’une telle évolution, le rejet total et absolu de l’Occident s’exprime aussi nettement.

     

    Voyez l’Egypte, pays ruiné et au bord du gouffre, voire de la guerre civile, où un islamiste ose dire à la télévision d’Etat que l’existence des pyramides est incompatible avec une pratique aine et conséquente de sa religion…

     

    Or, sans les rentrées d’argent générées par le tourisme, le don du Nil comme disait Hérodote serait encore plus misérable… Dieu seul sait où ces gens s’arrêteront et quand ils retrouveront le chemin de la saine raison…

     

    Maurice-Ruben HAYOUN

    In Tribune de Genève du 26 février 2013

     

  • L'interview télévisée de François Fillon

    L’interview télévisée de François Fillon

     

    Quand on revoit les principaux passages de l’interview de François Fillon d’hier, on se rend compte que l’homme s’est enfin émancipé de la pesante tutelle de son ancien chef, le président de la République Nicolas Sarkozy.

     

    On a vu apparaître un homme décomplexé, libre de ses mouvements, s’exprimant avec aisance et montrant qu’il était désormais seul à déterminer son action. Avec le temps, on se demande comment un tel homme a pu tenir durant cinq années à Matignon avec, de l’autre côté de Paris, un président tonitruant, hyper présent, le traitant même de simple collaborateur alors que la fonction de Premier Ministre est des plus importantes, y compris dans le cadre de la Ve république.

     

    Comment expliquer la longévité et le parcours sans faute de François Fillon à Matignon ? Probablement par ses qualités intrinsèques mais aussi par la présence à ses côtés durant toute cette période d’un excellent directeur de cabinet, un homme de grande culture et un véritable bourreau de travail, toujours présent à son poste, du matin au soir, y compris certains jours fériés.  Ce tandem Fillon-Faugère a été à toute épreuve, a résisté à tout, y compris au moment où il fut question de changer de premier ministre et de nommer Jean-Louis Borloo. Ce dernier ne manque pas de qualités mais il n’a peut-être pas la même solidité que François Fillon.

     

    Venons en à la question majeure : François Fillon ira-t-il jusqu’au bout ? Se présentera-t-il contre Nicolas Sarkozy ?  Il y pense certainement et ira au terme de sa démarche. A-t-il des chances de l’emporter ? Ce n’est pas exclu mais il ne faut pas prophétiser car en quatre ans tant de choses peuvent se passer. Et ce fut probablement en cela que N. Sarkozy a commis une lourde erreur : il aurait dû changer de cap au moins deux bonnes années avant le scrutin au lieu de songer à renvoyer François Fillon avant de se raviser (heureusement). Ce dernier semble avoir médité cette occasion manquée, d’où sa volonté de prendre son temps.

     

    La question qui se pose aux simples citoyens que nous sommes est la suivante : quelle sera à ce moment là, en 2017, la situation de la France ? De tout cœur, je l’espère meilleure. Mais la montée du chômage, le ralentissement de l’activité et la désindustrialisation du pays nourrissent nos doutes.

     

    La bonne nouvelle est, en état de cause, l’émancipation de François Fillon vis-à-vis d’un homme, semblable au Dieu de Plotin, centré sur soi, replié sur lui-même et pris dans une sorte de narcissisme éternel.

     

    Maurice-Ruben Hayoun

    In Tribune de Genève du  25 février 2013